Journal mathématique de Gauss
Le Journal mathématique de Gauss (allemand : Mathematisches Tagebuch von Carl Friedrich Gauß[1]) est un journal personnel écrit par Carl Friedrich Gauss, où il a noté (en latin et sous une forme elliptique) ses découvertes mathématiques entre 1796 et 1814.
Historique[modifier | modifier le code]
En 1796, Carl Friedrich Gauss, alors âgé de 19 ans, découvre la construction de l'heptadécagone régulier à la règle et au compas. Il entame alors un journal mathématique, où il note cette découverte (qu'il publiera deux mois plus tard) ; il continue à noter ses résultats, d'abord très fréquemment (70 entrées durant les dix-huit premiers mois), puis plus irrégulièrement jusqu'en 1814 (entrée n° 146), date à partir de laquelle son intérêt pour les mathématiques pures semble avoir diminué.
Le Journal est redécouvert en 1897 et publié en 1903 par Felix Klein[2] ; il fait partie de l'édition de 1917 des œuvres complètes de Gauss[3],[4].
Une traduction française annotée a été publiée par Pierre Eymard et Jean-Pierre Lafon en 1956[5]
Exemples[modifier | modifier le code]
Ces notes sont écrites en latin, le plus souvent sous une forme très abrégée et parfois codée.
L'entrée 1, datée du , est « Principia quibus innititur sectio circuli, ac divisibilitus eiusdem geometrica in septemdecim partes etc. » ([Principes sur lesquels reposent la division du cercle et sa divisibilité géométrique en 17 parties, etc.]), mentionnant sa découverte de la construction de l'heptadécagone régulier à la règle et au compas.
L'entrée 18 (), est « ΕΥΡΗΚΑ. num. = Δ + Δ + Δ », affirmant sa découverte d'une preuve de ce que tout entier est somme de trois nombres triangulaires, un cas particulier du théorème des nombres polygonaux de Fermat.
L'entrée 43 (), est « Vicimus GEGAN » ([Nous avons conquis GEGAN]). Elle est restée mystérieuse[6] jusqu'en 1997, lorsque Kurt Biermann découvrit un manuscrit de Gauss[7] l'amenant à penser que GEGAN était l'inverse de l'acronyme NAGEG pour « Nexum medii Arithmetico-Geometricum Expectationibus Generalibus » ([Le lien attendu avec la moyenne arithmético-géométrique]), se rapportant à la relation entre cette moyenne et les fonctions elliptiques.
La dernière entrée (146, datée du ) rapporte une observation reliant les résidus biquadratiques et les fonctions elliptiques associées à la lemniscate, relation peut-être prouvée par Gauss par la suite, et démontrée « élémentairement » par Chowla en 1940[8]. Plus précisément, Gauss y remarque que si est un nombre premier de Gauss et si est divisible par , alors le nombre de solutions de la congruence , en incluant et , est .
Notes et références[modifier | modifier le code]
- Publié par Felix Klein sous le titre Gauß' wissenschaftliches Tagebuch (journal scientifique de Gauss).
- Klein 1903.
- (de) Carl Friedrich Gauß, Werke, Königlichen Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen ; texte sur internet : GDZ.
- Gauss 2005.
- Eymard et Lafon 1956.
- Gegan veut dire « parti » ou « disparu » en allemand, mais pourquoi des majuscules ?
- Biermann 1997.
- Chowla 1940.
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Pierre Eymard et Jean-Pierre Lafon, « Le Journal mathématique de Gauss : Traduction française annotée », Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, vol. 9, no 1, , p. 21-51 (lire en ligne)
- (de) Kurt-R. Biermann, « Vicimus NAGEG. Bestätigung einer Hypothese », Mitt., Gauß-Ges. Gött., vol. 34, , p. 31-34 (zbMATH 0888.01025)
- (en) S. Chowla, « The last entry in Gauss's diary », PNAS, vol. 35, , p. 244-246 (JSTOR 88178)
- (en) G. Waldo Dunnington, Jeremy Gray (dir.) et Fritz-Egbert Dohse (dir.), Carl Friedrich Gauss : Titan of Science, MAA, , 2e éd. (1re éd. 1955), 537 p. (ISBN 978-0-88385-547-8, lire en ligne)
- (de) Carl Friedrich Gauss et Kurt-R. Biermann (dir.), Mathematisches Tagebuch, 1796-1814, Francfort-sur-le-Main, Verlag Harri Deutsch (de), coll. « Ostwalds Klassiker der Exakten Wissenschaften » (no 256), , 5e éd., 234 p. (ISBN 978-3-8171-3402-1, MR 2167978)
- (en) J. J. Gray, « A commentary on Gauss's mathematical diary, 1796-1814, with an English translation », Expositiones Mathematicae (nl), vol. 2, no 2, , p. 97-130 (MR 783128)
- (de) Felix Klein, « Gauß' wissenschaftliches Tagebuch 1796-1814 », Mathematische Annalen, Springer Berlin / Heidelberg, vol. 57, , p. 1-34 (DOI 10.1007/BF01449013)