Cadet social

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

La notion d'ethnologie de cadets sociaux désigne, notamment au Nigéria et au Cameroun, un statut de cadet qui ne permet pas d'hériter, ce qui en fait un groupe dominé. Cette exclusion foncière peut conduire à la révolte ou à la dissidence.

Genèse de la notion[modifier | modifier le code]

D'après le chercheur Franck Beuvier, la notion de cadet fait débat depuis les années 1950 en anthropologie. Les inégalités entre aînés et cadets (notamment dans l'héritage) conduisent, dans les chefferies Grassfield par exemple, à distinguer les cadets comme groupe social. Chez Jean-Pierre Warnier, dans les années 1990, le terme "cadet social" apparaît. L'idée de conflit structurel entre aînés et cadets, héritiers et non héritiers, s'inspire de Claude Lévi-Strauss qui a théorisé les structures élémentaires. L'africanisme en France de 1950 à 1970 s'attache à la question des cadets, par une approche "par le bas" inspirée de la méthode marxiste. Cette tension entre aînés et cadets est favorisée par l'ordre colonial. Selon Meissallioux, il s'agit d'un conflit politique (rapport de domination entre groupes sociaux) en plus d'un conflit familial (rapport entre personnes). Bayart, dans un écrit sur le Cameroun, évoque les "dépendants" parmi lesquels figurent les esclaves, les cadets, les fils et les femmes. Bayart emploie le terme hégémonique pour évoquer cette stratification, ce qui s'inspire de l'hégémonie culturelle du philosophe marxiste Antonio Gramsci.

Franck Beuvier énumère des termes rattachés au cadet : "déshérité, pauvre, natif marginal, citoyen camerounais sans importance, célibataire, loyaliste, asexué"[1].

La notion de "cadet social" est parfois élargie aux groupes dominés d'Afrique subsaharienne, comme les femmes. Les cadets voient leur mobilité sociale réduite et disposent de moins de pouvoir [2].

Conséquences du statut de cadet[modifier | modifier le code]

Les bandes et gangs de jeunes recrutent souvent des cadets sociaux : ils "se nourriraient de [leur] frustration" ou de leur "manipulation", d'après un article de la revue Afrique Contemporaine[3].

Boko Haram tend à recruter des cadets. Ces derniers ne pouvant pas hériter dans le système coutumier traditionnel, le mode d'héritage foncier étant "en pratique réservé au seul aîné mâle". Ainsi, il est possible que cette exclusion structurelle constitue un vivier pour Boko Haram [4].

Références[modifier | modifier le code]

  1. BEUVIER Franck, « La figure du « cadet » Grassfields. Contribution à l’histoire d’un concept anthropologique », Cahiers d'études africaines, 2020/1 (n° 237), p. 31-61. DOI : 10.4000/etudesafricaines.28900. URL : https://www.cairn.info/revue-cahiers-d-etudes-africaines-2020-1-page-31.htm
  2. « Être femme en Afrique subsaharienne : la fin des « cadets sociaux » ? », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 25 juin 2014, https://calenda.org/287461
  3. CHAMPY Muriel, PEATRIK Anne-Marie, « Pour une anthropologie critique de la jeunesse en Afrique », Afrique contemporaine, 2016/3 (N° 259), p. 116-117. DOI : 10.3917/afco.259.0116. URL : https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine1-2016-3-page-116.htm
  4. Mehdi Saqalli, Pabamé Sougnabé, Sylvain Ferrant et Fabrice Gangneron, « Exclusions foncières des cadets et vivier pour Boko Haram : hypothèse et proposition méthodologique », Espace populations sociétés. Space populations societies, nos 2022/1,‎ (ISSN 0755-7809, DOI 10.4000/eps.12385, lire en ligne, consulté le )