André Vitalis

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
André Vitalis
Fonction
Professeur émérite (d)
Biographie
Naissance
Nationalité
Formation
Activité
Autres informations
A travaillé pour

André Vitalis, né sur le Larzac à La Cavalerie le , est un universitaire français, professeur à l’université Bordeaux-Montaigne, où il a dirigé, de 1996 à 2005, le Centre d’études des médias et la formation doctorale en sciences de l’information et de la communication[1].

Parcours[modifier | modifier le code]

André Vitalis est diplômé de Sciences Po Paris, titulaire d’un doctorat d’État en science politique et d’une habilitation à diriger des recherches en sciences de l’information et de la communication[2].

Avant de rejoindre Bordeaux, il a enseigné à l’Université de Nantes (1973-1990) et à l'université Rennes II (1991-1993). Invité par l’Université du Québec à Montréal pendant l’année universitaire 1987-1988, il a effectué par la suite de nombreuses missions d’enseignement en Afrique, au Proche-Orient, en Chine et en Russie[3].

Thématiques de recherche[modifier | modifier le code]

Ses travaux de recherche concernent la problématique « informatique et libertés » et les enjeux socio-politiques des médias. Il a notamment consacré plusieurs ouvrages, ainsi que de nombreux articles et communications internationales, à l’étude de l’informatique comme une technologie de surveillance dont une démocratie doit contrôler les usages. Son approche socio-politique des médias les considère, de façon innovante pour l'époque, comme le résultat du croisement de plusieurs logiques : une logique technique, qui définit le champ des possibles ; une logique économique, qui détermine le champ des utilisations rentables ; et une logique sociale, qui détermine la position particulière du consommateur, avec ses besoins et ses désirs.

Informatique et Libertés[modifier | modifier le code]

Son ouvrage Informatique, pouvoir et libertés, publié en 1981 et préfacé par Jacques Ellul, constitue la première étude universitaire sur la globalité des enjeux de l’informatisation de la société en termes de libertés[4],[5]. Y est longuement analysé le système SAFARI (système automatisé pour les fichiers administratifs et le répertoire des individus) qui est à l’origine de la prise de conscience, en France, des dangers du fichage informatique.

Il a été consultant auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) de 1987 à 1994[6], à une époque où cette institution avait un véritable pouvoir de décision. En 1988, à l’occasion du 10e anniversaire de la CNIL, il publie une étude de synthèse des travaux de celle-ci[7]. Poursuivant ses travaux dans un cadre international[8], il contribue en 2005 à un rapport sur l’histoire de la protection des données à caractère personnel en France[9], dans le cadre d'une recherche concernant sept pays, financée par la NSF.

De façon plus spécifique, il s'intéresse aux menaces inhérentes à plusieurs technologies informatiques émergentes, et notamment la vidéosurveillance[10], [11], [12]. En 2000, il présente les menaces liberticides de la vidéosurveillance dans un exposé introductif à la 22e Conférence mondiale des commissaires à la protection des données[13], tenue à Venise, où il intervient aux côtés d'Umberto Eco. Il étudie également les risques de la biométrie[14], notamment celle basée sur la génétique[15].

Son ouvrage Le profilage des populations, co-écrit en 2014 avec Armand Mattelart, décrit l'état des libertés dans le contexte des sociétés post-disciplinaires et la captation massive des données à caractère personnel par des monopoles privés à l’échelle mondiale[16]. Cet ouvrage a fait l'objet de critiques très positives dans plusieurs médias de grande audience[17],[18],[19].

Il est membre fondateur du CREIS (Centre de recherche et d'enseignement informatique et société)[20] qui, depuis le début des années 1980, rassemble les enseignants-chercheurs qui travaillent sur ce thème. Il assure également la présidence du CECIL (Centre d’études sur la citoyenneté, l’informatisation et les libertés)[21] depuis sa création, en 2007. Parrainée par des personnalités de premier plan dans la défense des droits de l’homme, tels Louis Joinet[22], Stefano Rodotà, Spiros Simitis et Simon Davies, le CECIL a notamment édité, avec la Ligue des droits de l’homme, un Guide de survie des aventuriers d’Internet[23].

Enjeux socio-politiques des médias[modifier | modifier le code]

Lors de l’apparition de la télématique au début des années 1980, il effectue les premières analyses sur l’implantation de ce nouveau système de communication dans des municipalités innovantes, en s’intéressant au jeu des acteurs locaux et au modèle de communication proposé[24].

Par la suite, il propose une nouvelle approche des usages des techniques de communication, en rupture avec les approches alors dominantes qui déniaient tout pouvoir à l’usager ou au contraire lui en attribuaient trop. Définis comme le résultat de l’interaction entre plusieurs logiques techniques, économiques et sociales, les usages, dans un contexte de surabondance de médias et de nouvelles technologies, contribuent à une transformation de l’espace et du débat publics[25].

Ses recherches prennent, au cours de la décennie suivante, deux directions principales. Une première, encore insuffisamment explorée, concerne les temporalités médiatiques. Les médias participent à l’avènement d’un régime de temps particulier centré sur un présent détaché du passé et de l’avenir[26],[27]. De plus en plus chronophages, ils sont en concurrence avec d’autres temporalités de la vie quotidienne, qu’ils rythment selon des modalités différentes en fonction de la classe d’âge[28]. L'usage systématique des techniques de communication, y compris dans un but de manipulation, l'amène à s'interroger sur la protection des personnes face à elles[29].

La seconde direction, qui a pris aujourd’hui une importance croissante, a trait aux mutations apportées par les techniques numériques, et spécialement Internet, par rapport à la citoyenneté. Au moment de la marée noire de l’Erika en 1999/2000, Internet s’est révélé comme un puissant outil d’expression et de mobilisation citoyennes[30]. Malheureusement, des études ponctuelles concernant le travail ou les mondes de la justice et de l’action sociale[31] montrent que les techniques numériques sont loin d’avoir toujours des effets positifs. Seule une vue d’ensemble de la transition numérique peut permettre de prendre la mesure de ses enjeux socio-politiques et, notamment, avec la domination de monopoles privés à l’échelle mondiale, des risques d’une nouvelle forme de féodalisme[32].

André Vitalis est co-directeur de la collection Médias et nouvelles technologies aux Éditions APOGEE, diffusées par les PUF. Il a dirigé et fait soutenir 25 thèses de doctorat en sciences de l'information et de la communication[33].

Ouvrages[modifier | modifier le code]

  • L’incertaine révolution numérique, ISTE Editions, , 153 mm x 229 mm, 118 p. (ISBN 978-1-78-405155-6) ; voir [7]. Traduit en anglais : The Uncertain Digital Revolution, ISTE Ltd / Wiley, , 155 mm x 224 mm, 118 p., (ISBN 978-1-78-630086-7) ; voir [8]
  • Le profilage des populations. Du livret ouvrier au cybercontrôle, avec Armand Mattelart, Éditions La Découverte, , 137 mm x 221 mm, 223 p. (ISBN 978-2-70-717631-8). Traduit en espagnol : De Orwell al cibercontrol (traduit par Juan Carlos Miguel de Bustos), GEDISA, , 153 mm x 225 mm, 232 p., (ISBN 978-8-49-784884-8) ; voir [9]
  • Medios de comunicación e identidad. Estudio comparativo Aquitania y Andalucía, dir. avec Juan Antonio Garcia Galindo, Ediciones ALFAR, 2015, 150 p., (ISBN 978-8-47-898609-5) ; voir [10]. Ouvrage issu d'un rapport de recherche éponyme disponible sur HALSHS [11]
  • La vie privée à l’heure des médias, dir. avec Patrick Baudry et Claude Sorbets, coll. Labyrinthes, Presses universitaires de Bordeaux, 2002, 197 p., (ISBN 978-2-86-781294-1) ; voir [12]
  • Médias, temporalités et démocratie, dir. avec Bernard Castagna, Michaël Palmer et Jean-François Tétu, Éditions Apogée, 2000, 155 mm x 230 mm, 160 p., (ISBN 2-84-398072-0) ; voir [13]
  • Vers une citoyenneté simulée. Médias, réseaux et mondialisation, dir. avec Serge Proulx, Éd. Apogée, , 155 mm x 230 mm, 272 p., (ISBN 978-2-84-398027-5) ; voir [14]
  • Médias et nouvelles technologies : pour une socio-politique des usages, dir., Éd. Apogée, 1994, 155 mm x 230 mm, 160 p., (ISBN 978-2-90-927541-3) ; voir [15]
  • L’ordinateur et après: 16 thématiques sur l'informatisation de la société, avec Carrier, Hoffsaes, Blanchet, Assié, Hudon, Ed. Gaëtan Morin/Eska, 1989, 302 p., (ISBN 978-2-89-105299-3).
  • Dix ans d’informatique et libertés, avec F. Paoletti et H. Delahaie, préface de Jacques Fauvet, Economica, 1988, 256 p., (ISBN 978-2-71-781411-8)
  • Informatique, pouvoir et libertés, préface de Jacques Ellul, Economica, 1981 et 1988 (2e édition), 154 mm x 239 mm, 218 p., (ISBN 978-2-71-781459-0) (également disponible au format numérique) ; voir [16]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Présentation d'André Vitalis sur le site du Laboratoire MICA : [1]
  2. Son diplôme a été obtenu en septembre 1968, dans la section Service Public. Il a soutenu sa thèse de doctorat à l’Université de Rennes le 9 juin 1979 et son habilitation à l’Université de Nantes le 17 octobre 1989.
  3. Notice biographique André Vitalis in Frédéric Rognon, Génération Ellul, Labor et Fides, 2012, pp. 316-322, (ISBN 978-2-8309-1438-2)
  4. Dominique Desbois, « Informatique, pouvoir et libertés. À propos du livre d'André Vitalis [note critique] », Revue française de sociologie, nos 23-2,‎ , p. 301-309 (lire en ligne).
  5. Benoît Gauthier, « André Vitalis, Informatique, Pouvoir et Libertés, Paris, Economica, 1981, 212 p. », Politique, vol. 1, no 2,‎ , p. 169–176 (ISSN 0711-608X, DOI 10.7202/040408ar, lire en ligne, consulté le )
  6. Annexe 5 sur l’organisation des services, 14e Rapport d’activité de la CNIL, La Documentation française, juin 1994, p. 352
  7. Dix ans d’informatique et libertés, avec F. Paoletti et H. Delahaie, préface de Jacques Fauvet, Economica, 1988, 256 p., (ISBN 978-2-71-781411-8)
  8. La protection des renseignements personnels en France et en Europe : approches éthique et juridique, in Vie privée sous surveillance, Ed Y. Blais, Montréal, 1994, pp. 117-138
  9. History of key developments in privacy protection in France, rapport US NSF Program on ethics and values of technology in Global Privacy Protection, Edward Elgar (dir. J. Rule), 2008, 33 p.
  10. Contrôle politique et démocratisation des technologies nouvelles, rapport pour le séminaire sur la démocratie électronique du Conseil de l’Europe, Sénat, Palais du Luxembourg, Paris, 23/, 13 p.
  11. Nouvelles technologies, nouvelles régulations ? À propos de la vidéosurveillance, avec E. Heilmann, rapport IHESI/CNRSix, 1996, 94 p.
  12. André Vitalis, « Le regard omniprésent de la vidéosurveillance », Le Monde diplomatique, no 528,‎
  13. Vidéosurveillance, sécurité et libertés, septembre 2000 (texte paru dans les actes de la conférence et repris par la revue Terminal, n° 84, 2003)
  14. Identités biométrisées et contrôle social (avec F. Pellegrini), rapport de recherche Inria, RR-9046, [2]
  15. Banques de données génétiques et libertés individuelles, in Ordre biologique et ordre technologique, Ed. Champ Vallon, 1994, pp. 226-232
  16. Lionel Francou et Quentin Verreycken, « Armand Mattelart et André Vitalis, Le profilage des populations. Du livret ouvrier au cybercontrôle », Liens socio / Les comptes-rendus,‎ (lire en ligne)
  17. Igor Martinache, « Le profilage des populations », Alternatives économiques,‎ , p. 87
  18. Laurent Etre, « Des dispositifs de contrôle invisibles », L'Humanité,‎ , p. 23
  19. Marie Descamps, « Le profilage des populations », Sciences Humaines,‎ (lire en ligne)
  20. Site web du CREIS [3], éditeur de la revue Terminal (consulté le 20 février 2022)
  21. Site web du CECIL [4] (site inaccessible depuis l'incendie du centre de données qui l'hébergeait, le )
  22. Décès de Louis Joinet, Site web du CREIS, 2 octobre 2019, [5] (consulté le 19 février 2022)
  23. Guide de survie des aventuriers d’Internet, 2018, (ISBN 979-10-97596-00-2)
  24. Les enjeux socio-politiques et culturels du système télématique Telem, rapport au Ministère des PTT/service de la prospective, 1983, 262 p.. Voir extraits dans Télématique : promenade dans les usages (dir. M. Marchand et C. Ancelin), La Documentation française, 1984.
  25. Le rôle des usagers dans les politiques des télécommunications, de l’informatique et des technologies de l’audiovisuel, avec T. Vedel, rapport Association Descartes, 1993. 60 p.. Compte-rendu du rapport par Fanny Carmagnat, Réseaux, Volume 13, n° 72-73, 1995.
  26. Médias, temporalités et démocratie, dir. avec Bernard Castagna, Michaël Palmer et Jean-François Tétu, Éditions Apogée, 2000.
  27. Les médias et le nouvel ordre du temps, actes du colloque Alexandrie, métaphore de la francophonie : la transmission des connaissances des savoirs et des cultures, Bibliotheca Alexandrina, Alexandrie, mars 2006, CIDEF-AFI, pp. 245-255.
  28. Temporalités médiatiques et vies quotidiennes, avec J.-C. Domenget, K. Turcin, rapport Conseil régional d’Aquitaine/MSHA, 2004, 159 p.. Référence au rapport et extraits : Discordance des temps, (dir. V. Carayol et A. Bouldoire), Ed. Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine, 2011, pp. 95-107.
  29. La protection de la personne face aux techniques de communication (avec H. Maisl), in Dictionnaire critique de la communication, PUF, 1993, pp. 1273-1277.
  30. Le rôle d’Internet dans les crises et controverses environnementales, (dir.), rapport Ministère de l’écologie/CDE, 2005, 137 p. Référence au rapport et extraits : Environnement : décider autrement, (dir. L. Mermet et M. Berlan-Darqué), L’Harmattan, 2009, pp. 259-279, (ISBN 978-2-296-07663-1).
  31. La transformation numérique de l’action sociale : ce que nous enseignent cinquante ans d’informatisation, in L’avenir du numérique dans le champ social et médico-social, Ed Eres, 2020, pp. 23-31.
  32. L’incertaine révolution numérique, ISTE Editions, , 118 p.
  33. [6].

Liens externes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]