Hubert Lyautey

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 Hubert Lyautey
Hubert Lyautey

Surnom Lyautey l’Africain
Nom de naissance Louis Hubert Gonzalve Lyautey
Naissance
Nancy (France)
Décès (à 79 ans)
Thorey (France)
Origine Drapeau de la France France
Arme Armée de terre
Dignité d'État Maréchal de France
Années de service 1873 – 1925
Commandement 10e corps d'armée, Rennes
Conflits Guerres coloniales
Première Guerre mondiale
Faits d'armes Conquête du Maroc
Distinctions Maréchal de France
Médaille militaire (1915)
Grand-croix de la Légion d'honneur (1913)
Grand-croix de l'Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand
Hommages Inhumé aux Invalides depuis 1961.
Autres fonctions Résident général de France au Maroc (1912 - 1925)
Ministre de la Guerre (décembre 1916 - mars 1917)
Élu à l'Académie française (1912, fauteuil 14)
Famille Hubert Joseph Lyautey (grand-père)
Inès de Bourgoing (épouse)
Signature de Hubert Lyautey

Hubert Lyautey, né le à Nancy et mort le à Thorey, est un général, maréchal de France et membre de l’Académie française. Sa notoriété reste liée à son action au Maroc.

Officier de cavalerie pendant les guerres coloniales, il sert notamment sous les ordres de Joseph Gallieni au Tonkin (1894-1897) et à Madagascar (1897-1902). Il y pratique une « politique d’alliance ». Il va l'appliquer par la suite. Au grade de général, il sert en Algérie (1903-1910). Il est chargé de la pacification de la région frontalière algéro-marocaine. Après le traité de Fès de mars 1912, il devient le premier résident général du protectorat français au Maroc. Il met en oeuvre une politique de collaboration avec les élites religieuses et civiles. Grand-croix de la Légion d’honneur en 1913, il est élevé à la dignité de maréchal de France en 1921. En désaccord avec le cartel des gauches à propos de la guerre du Rif, il quitte ses fonctions en 1925.

De 1927 à 1931, il organise l'exposition coloniale internationale de Vincennes.

Il est brièvement ministre de la Guerre lors de la Première Guerre mondiale, de décembre 1916 à mars 1917. Académicien, élu en 1912 et reçu en 1920, il est aussi président d'honneur des trois fédérations des Scouts de France.

Biographie[modifier | modifier le code]

Une éducation militaire[modifier | modifier le code]

Hubert Joseph Lyautey, mort en 1867.
Albert de Mun, 1841-1914.

Louis Hubert Gonzalve Lyautey est issu d'une famille d'origine franc-comtoise (commune de Vellefaux), qui s'est illustrée lors des campagnes du Premier Empire. Par sa mère, il descend des Grimoult de Villemotte, famille de la noblesse normande venue s'enraciner en Meurthe-et-Moselle à Crévic. Il a hérité d'eux une grande maison de maître connue sous le nom de château de Crévic, où il a pris l'habitude d'entasser ses souvenirs. Les Allemands, au début de la guerre, vont incendier sa maison pour se venger de son rôle au Maroc[1]. La famille Lyautey compte de nombreux officiers. Son arrière-grand-père, Pierre Lyautey, était ordonnateur en chef des armées de Napoléon. Il a eu quatre fils : Just, capitaine, mort au combat; Antoine Nicolas, général de brigade d'artillerie; Charles René, intendant général, et Hubert Joseph Lyautey, général de division d'artillerie et sénateur du second Empire[2] (grand-père d'Hubert Lyautey). Hubert-Joseph L. a eu pour fils Just Lyautey, polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées.

Hubert Lyautey avait un frère, Raoul Aimé Lyautey (29 juillet 1856-15 mars 1935), également dans la carrière militaire. Elève de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr puis de l'École de cavalerie de Saumur et de l'École de guerre, officier de cavalerie, il servit dans les chasseurs à cheval et les hussards et acheva sa carrière comme colonel de cuirassiers.

Il effectua une carrière exclusivement métropolitaine, dans l'est de la France. Il a participé à sa première campagne en 1914-1919. Il était commandeur de la Légion d'honneur et titulaire de la croix de guerre, de la croix du combattant, de la médaille commémorative de la guerre de 1914 et de la médaille interallié. Il était domicilié à Nancy. Il était le père de l'écrivain Pierre Lyautey (1893-1976).

Hubert Lyautey naît le au 10 rue Girardet à Nancy[3]. En , à l'âge de dix-huit mois, il fait une chute du balcon du premier étage de l'hôtel de la Reine à Nancy, maison de sa famille maternelle[4]. La blessure qu'il s'est faite à la tête détourne l'attention, on s'aperçoit quatre ans plus tard que la colonne vertébrale est atteinte[5]. Soigné par le chirurgien Velpeau[6], Hubert Lyautey doit rester alité pendant deux ans. Il subira plusieurs interventions chirurgicales, portera des béquilles et un corset de fer garni de cuir pendant dix ans. Cela l'obligera à rester fréquemment alité mais lui donne le goût des livres[7]. — l'hypothèse a été émise que l'atteinte de la colonne vertébrale n'était pas directement la conséquence de l'accident mais un mal de Pott[5] —. Immobilisé, il passe son temps à lire des livres d'histoire : l'épopée napoléonienne, récits d'explorateurs, de voyageurs et de missionnaires. Dans le même temps, il subit l'influence de sa tante Berthe, fervente catholique et royaliste[8].

Just Lyautey, muté à Dijon, place en son fils Hubert au lycée[9] de cette ville. Il y passe le baccalauréat en 1872[10]. Après une nouvelle mutation à Versailles[10], son père l'inscrit au lycée Sainte Geneviève, tenu par des jésuites, et situé alors à Paris dans le 5e arrondissement. Il y prépare le concours d'entrée à l'École polytechnique pour devenir ingénieur[11]. Marqué par la défaite française de 1870 et l'invasion prussienne — qu'il a vue de près à Dijon — en octobre 1873, Lyautey intégre l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, promotion archiduc Albert (1873-1875). Ses résultats sont excellents. Lyautey y nourrit sa réflexion de rêves de grandeur et d'une profonde recherche spirituelle[11].

Il rencontre Prosper Keller, Olivier de Fremond, Antonin de Margerie et Albert de Mun. Il sort de l'école et mène à Paris la vie mondaine d'un jeune officier. En pleine quête spirituelle, Lyautey est séduit par le catholicisme social d'Albert de Mun (Mouvement de pensée qui s'oppose aux excès du libéralisme mais refuse les solutions révolutionnaires).

Albert de Mun a créé en 1871 l'Œuvre des cercles catholiques d'ouvriers pour défendre les intérêts matériels et moraux des ouvriers et éviter des épisodes comme celui de la Commune de Paris. Il correspondra jusqu'à sa mort avec Lyautey[12].

La France est devenue républicaine et anticléricale[13]. Monarchiste de raison, légitimiste par romantisme, Lyautey ne cache pas ses opinions catholiques et royalistes. D'après certains historiens, il envisage la question de la vocation religieuse ; il fait à deux reprises une retraite en montagne, au monastère de la Grande Chartreuse[14].

Débuts de carrière[modifier | modifier le code]

En 1875, classé 29e sur 281, il sort de Saint-Cyr. En , il est admis à l'École d'application d'État-major, de Paris. Deux ans plus tard, il est lieutenant. A l'occasion d'un congé, il part deux mois en Algérie avec ses camarades de promotion Prosper Keller et Louis Silhol. Cette première découverte de l'Algérie le passionne. De retour en France, il est affecté au 2e régiment de hussards en . Il le suit quand il est transféré en Algérie à la fin de l'année. Il y passe deux ans, d'abord à Orléansville, puis à Alger. Il critique la politique coloniale française et prône un « système plus civilisé et plus humain ».

En 1882, promu capitaine, il est muté au 4e régiment de chasseurs à cheval à Bruyères, dans les Vosges. Il est envoyé en Italie pour rédiger un rapport sur la cavalerie de ce pays. Il voyage vers Rome, fait un détour par Göritz en Autriche. C'est le lieu de l'exil du comte de Chambord. Celui-ci, averti des rumeurs de prochain ralliement du Pape à la République, charge Lyautey d'une mission auprès de Léon XIII. Il est reçu en audience le . Il en sort déçu : pour lui, l'opinion du pape est déjà faite.

à l'occasion d'une revue militaire, Lyautey rencontre le général L'Hotte, inspecteur de la cavalerie en résidence à Tours et ancien écuyer en chef du Cadre noir. L'Hotte, devant la personnalité du jeune officier, le choisit comme aide de camp. Pendant les quatre années passées auprès du général L'Hotte, Lyautey voyage à travers la France, et ses villes de garnison, et s'initie à la tactique militaire, qui est alors en complet renouvellement.

A cette époque, Lyautey se laisse gagner par un certain scepticisme religieux. Ses années passées en garnison, son retour au contact de la troupe, son affectation en 1887 au 4e régiment de chasseurs à cheval (basé à Saint-Germain-en-Laye), ont nourri son esprit. Il mûrit des idées novatrices sur la fonction de l'armée. Au 1er escadron qu'il commande, il bouleverse les habitudes. Avec l'accord de son chef de corps, le colonel Donop, il décide de créer :

  • un réfectoire, (jusque-là, les soldats n'avaient aucun endroit pour manger) ;
  • un foyer pour les soldats avec bibliothèque, billard et jeux ;
  • des cours pour illettrés ;
  • une commission consultative pour permettre aux soldats de donner leur avis.
Eugène-Melchior de Vogüé

Ces nouveautés transforment son 1er escadron en escadron modèle. Proche de Paris, il a des contacts avec le milieu intellectuel. Le diplomate et écrivain Eugène-Melchior de Vogüé joue un rôle clé auprès de lui, comme autrefois Albert de Mun. Chez lui, il rencontre François Coppée, José-Maria de Heredia, Henri de Régnier, Ferdinand Brunetière, Paul Desjardins, Paul-Gabriel d'Haussonville[15]… Séduit par sa conception de l'armée nouvelle, par les réformes engagées, Vogüé lui demande en 1891 d'écrire un article pour la célèbre Revue des deux Mondes. Il sera intitulé Du rôle social de l'officier dans le service militaire universel. Il sera réédité ensuite sous le titre le Rôle social de l'officier[16].

Les règlements en vigueur imposent une autorisation : il ne l'a pas réclamée. Le texte n'est pas signé. Mais son auteur est vite connu. Un débat se crée sur l'action éducatrice de l'armée au-delà de sa fonction purement militaire. Lyautey veut dépasser les rapports de classes. Il voit le service militaire universel comme l'unique moyen de former la jeunesse sur une base égalitaire[17]. Le battage autour de cet article fondateur fait affluer de toute la France des lettres d'encouragement et des dons. André Le Révérend note qu'avec les sommes reçues, Lyautey peut financer l'achat de 133 000 livres pour les bibliothèques de soldats qui se créent dans les régiments[18]. Les amis de Vogüé décident la même année de créer une association pour promouvoir leurs idées : "l'Union pour l'action morale", fondée le , est présidée par Desjardins. Lyautey est un des quinze membres fondateurs[19]. C'est l'occasion pour lui de faire la connaissance de jeunes gens de son âge. Ils font des carrières brillantes et deviennent ses amis : outre Desjardins, Henry Bérenger, Max Leclerc, l'éditeur, Victor Bérard, helléniste, Arthur Fontaine, Henri Lorain, l'homme des Semaines sociales, Jean, André et Max Lazard[17](162). Deux d'entre eux, Arthur Fontaine et Max Lazard, comptent parmi les pères fondateurs de l'Organisation internationale du Travail.

Lyautey au Tonkin en 1896

Lyautey est nommé chef d'escadron au printemps 1893. Il est affecté au 12e hussards, à Gray. A l'automne, il est à l'état-major de la 7e division de cavalerie. En , le général de Boisdeffre veut le faire changer d'air après les remous causés par son article. Lyautey part pour l'Indochine[15]:27.

Il est désabusé : il s'attend à trouver une garnison de plus, l'exotisme en prime. Dès les escales de Suez et de Singapour, il remarque l'activité des troupes anglaises, et l'état d'esprit de leurs officiers[15]:27-28. À Saïgon, il est reçu par le gouverneur général Lanessan. Ce dernier lui explique qu'il ne faut pas détruire les cadres du pays conquis mais gouverner avec le mandarin, non contre le mandarin; qu'il faut respecter les traditions et s'efforcer de se rallier les élites[15]:29. Il esquisse pour Lyautey tout un pan de la doctrine que ce dernier appliquera plus tard au Maroc[20].

Il rejoint l'état-major du corps d'occupation à Hanoï, au Tonkin. Il y fait une deuxième rencontre décisive : Gallieni. Fort de ses vingt ans de colonies, Gallieni lui expose sa doctrine : « la conquête civilisatrice ». Pour lui, le succès militaire est nécessaire, mais il n'est rien si on ne lui ajoute pas un travail simultané d'organisation : routes, télégraphe, marchés, cultures. La pacification avance comme une tache d'huile, comme une grande bande de civilisation[15]:32. Lyautey le suit en campagne et le voit pacifier des régions frontalières, construire des villes. Nommé Gouverneur général par le gouvernement, Gallieni doit partir pour Madagascar où la situation est mauvaise. En 1896, il rend à Armand Rousseau, gouverneur du Tonkin, un rapport issu de son expérience : il assigne à tout officier colonial un triple rôle : diplomatique, politique et militaire[21].

Gallieni et son état-major à Madagascar en 1900 (Lyautey debout à gauche)

Gallieni fait appel à Lyautey qui arrive à Tananarive en . Sa première mission est de pacifier la zone dissidente du nord. Il a carte blanche de Gallieni. Il en profite pour construire des routes ou créer des villes (sa passion d'enfance) comme Ankazobe, épargner un chef rebelle. il compare ses cinq ans de proconsulat avec la situation qu'il retrouve en France à chaque permission : le scandale de l'affaire Dreyfus ne fait que s'étendre. Guillaume Jobin dit à cet égard qu'il est un des rares officiers d'état-major dreyfusards[22]. Maurois le voit plutôt écartelé[15]:45-46.

En , lors d'une de ces permissions, il tient une conférence sur le thème de la politique coloniale. Elle paraît aussi dans la Revue des Deux-Mondes sous le titre « Du rôle colonial de l'armée ». Il y insiste sur l'importance d'une bonne administration des territoires conquis.

En 1900, Lyautey est nommé colonel et Gallieni lui confie le commandement de la province du sud, avec mission de la pacifier. Sa campagne durera deux ans. Sa tâche accomplie, il rentre en France début 1902 et prend le commandement du 14e hussards, basé à Alençon.

Il ronge son frein. A l'été 1903, il est invité chez son ami Jules Charles-Roux. Il y rencontre le gouverneur général de l'Algérie, Charles Jonnart. Ce dernier lui parle de l'insécurité qui règne à la frontière algéro-marocaine : des tribus dissidentes y lancent des razzias en Algérie et retournent se mettre à l'abri au Maroc. À sa demande, Lyautey lui expose les méthodes utilisées à Madagascar. Jonnart approuve. Il se lie d'amitié avec Eugène Étienne, député d'Oran, franc-maçon et plusieurs fois ministre[23]. Peu après, de nouvelles attaques meurtrières ont lieu. Le poste d'Aïn Sefra est menacé. En septembre, Lyautey est nommé en Algérie, réclamé par le gouverneur général.

Installé à Aïn Sefra, promu général de brigade, il constate que de nombreux services lui échappent : artillerie, convois, intendance. Il réclame de les avoir tous sous ses ordres. Il réclame aussi et obtient le droit de correspondre directement avec le ministre en cas d'urgence, sans passer par la hiérarchie[15] :53-55. Au cours de l'hiver 1903-1904, il découvre les traditions berbères et les décors du bled, à Figuig et ailleurs. L'immobilisme lui pèse. Il installe un camp au Maroc à Berguent (Aïn Beni Mathar). Paris n'admet pas qu'il ait franchi la frontière, et, le , lui ordonne de se replier. Il demande un sursis à exécution car il a donné sa parole aux tribus locales de les protéger. Il met sa démission dans la balance. Les Affaires étrangères sont vent debout. Sur fond de crise ministérielle, Jonnart finit par faire admettre la solution proposée par Lyautey : ajouter à ses forces un détachement marocain pour sauver la face vis-à-vis des grandes puissances[15] :65-67.

La conférence d'Algésiras n'accorde à la France que des droits limités au Maroc. Lyautey est nommé à la tête de la division d'Oran en 1907. Sur ordre de Paris, il occupe Oujda, réprime un soulèvement des Beni Snassen et parvient à pacifier la zone frontière. Début 1908, les tribus se sont soulevées au Maroc à l'instigation de Moulay Hafid. Le général d'Amade est bloqué à Casablanca. Clemenceau envoie Lyautey en mission sur place. À son retour, ce dernier plaide la cause de d'Amade devant Clemenceau : il lui a conseillé d'attendre avant de procéder à l'évacuation de Settat qui lui était prescrite, lui explique l'importance de cette position. Clemenceau cède et annule l'ordre[24]:103-107. Lyautey est rappelé fin 1910, pour prendre le commandement du corps d'armée de Rennes.

Lyautey et Foucauld près de Beni Abbès (1905)
Henry de Castries à l'époque où il cartographie le Maroc

En Algérie, il a rencontré Charles de Foucauld[14] et Isabelle Eberhardt. Celle-ci fut sa médiatrice auprès des tribus arabes. Il appréciait son non-conformisme et sa liberté d'esprit. Lyautey est affecté par sa disparition prématurée[25] le à la suite d'une crue[26]. Il fera en sorte que sa dépouille et ses manuscrits soient retrouvés dans sa maison d'Aïn Sefra. Il avait connu Charles de Foucauld jeune officier lors de son premier séjour en Algérie. Il l'a reçu à Aïn Sefra, est allé le voir à Béni Abbès. En Algérie, il a fait la connaissance d'Henry de Castries, explorateur et géographe : il avait cartographié les confins du Maroc et commencé à écrire sur l'histoire du pays. Lyautey l'a fait nommer colonel dans la territoriale, affecté en 1910 à Tanger, avec mission de continuer ses recherches.

Résident général au Maroc (1912-1916)[modifier | modifier le code]

Lyautey décorant Madani El Glaoui (octobre 1912).
Mangin décoré par Lyautey en 1912.
Photo d'un homme en complet gris à rayures, portant un chapeau mou et des gants, et échangeant avec un général de brigade
Lyautey avec Paul Deschanel, président de la Chambre des députés française (Casablanca, 1914).
Le sultan Moulay Youssef, père de Mohammed V.

Lyautey reste moins de deux ans à Rennes. Il suit les cours du Centre des hautes études militaires, et participe à des manœuvres avec Joffre.

En , à la suite du coup d'Agadir, Joseph Caillaux et Jules Cambon négocient un accord avec l'Allemagne. Cet accord est ratifié en . Il est urgent d'établir le protectorat. Les tribus se sont soulevées quand le sultan Moulay Hafid a confié le poste de grand vizir à Si Madani El Glaoui [n 1]chef de la tribu des Glaoua. Ce dernier a été destitué en 1911 mais la révolte continue. Les troupes françaises ont du mal à la contenir.

En , le ministre de France à Tanger, Eugène Regnault est destiné à être le premier Résident. Il fait signer au sultan Moulay Hafid un traité de protectorat. Ce traité reconnaît la souveraineté du Sultan, mais il n'a pas l'initiative des lois. Il n'a que le droit de s'y opposer en refusant de signer les dahirs. En échange, la France l'appuiera contre les dangers possible. En outre, le maintien de l'ordre, la défense, les finances, les relations extérieures lui échappent[27]. En avril de la même année, une révolte des troupes marocaines à Fès oblige le gouvernement français à changer ses plans. Il envisage un Résident militaire plutôt qu'un civil. Le choix se porte sur Lyautey. Par un décret du [28], il devient le premier résident général de France au Maroc.

Il débarque le à Casablanca en compagnie de sa nouvelle recrue, Henry de Castries, et est accueilli par le colonel Gouraud. A Fès, il doit se présenter au sultan. En cours de route, il rencontre l'architecte et aquarelliste, Maurice Tranchant de Lunel. Il l'embauche pour en faire son directeur des Antiquités, Beaux-Arts et Monuments historiques du Maroc. À Fès, il trouve une ville en révolution et s'attend au pire. Une attaque des tribus est imminente. Ses officiers réussissent à desserrer l'étau et à mettre en fuite les tribus. Lyautey accepte que le Sultan quitte Fès pour Rabat. Fès était minérale, resserrée dans ses remparts et enserrée dans les montagnes, il s'y est senti prisonnier. La nouvelle capitale du Maroc, le siège de la Résidence, devient Rabat. C'est une ville ouverte sur l'océan, verdoyante et disposant de larges espaces. Ce transfert n'a pas calmé Moulay Hafid, en dépression, et qui finit par abdiquer. Il est remplacé par son demi-frère, Moulay Youssef. La continuité de l'administration du Sultan est assurée par le grand vizir El Mokri, nommé en 1911, qui servira toute la dynastie alaouite jusqu'en 1955.

Les premiers problèmes que Lyautey doit affronter sont territoriaux : trois zones de dissidence échappent à son contrôle et menacent la stabilité du pays : à l'est, la poche de Taza bloque l'accès à l'Algérie et lui coûtera son poste ; au centre, la rébellion des Zaïans autour de Khénifra ; au sud, le prétendant El Hiba vient d'entrer dans Marrakech et a pris des otages français. Après avoir reçu des assurances du Glaoui, Lyautey envoie le colonel Mangin affronter les dix mille guerriers d'El Hiba le . Avec l'aide de l'artillerie, il les met en déroute. Le 1er octobre, Lyautey fait son entrée triomphale à Marrakech, ses palais et ses jardins.

Le prétendant El Hiba, en contestant la nomination du Sultan, remettait en cause un des piliers de la politique de Lyautey : s'appuyer sur les autorités légales, obtenir leur adhésion en montrant qu'il les respectait et les protégeait. La protection était dans le texte même du traité signé en début d'année. Quant au respect, Lyautey porte une attention méticuleuse pour recréer la dignité du sultan Moulay Youssef. Il écrit à Albert de Mun : « J'ai écarté soigneusement de lui toutes les promiscuités européennes, les automobiles et les dîners au champagne. Je l'ai entouré de vieux Marocains rituels. Son tempérament de bon musulman et d'honnête homme a fait le reste. Il a restauré la grande prière du vendredi, avec le cérémonial antique. Il a célébré les fêtes de l'Aïd el-Seghir avec une pompe et un respect des traditions inconnus depuis Moulay Hassan… »[29].

Il est élu à l'Académie française le 1912 (Il ne sera reçu qu'après guerre). Il est fait grand-croix de la Légion d'honneur l'année suivante. Les hommes politiques français le pressent d'en finir avec les autres rébellions. Il refuse, économe du sang de ses soldats. Il préfère user de patience et de persuasion et obtenir le ralliement des rebelles, qui sera d'autant plus solide. Il écrit : « Ce pays-ci ne doit pas se traiter par la force seule… Je me garderais bien d'aller m'attaquer à des régions qui sont “en sommeil”, qui se mettraient en feu si j'y pénétrais, en me coûtant beaucoup de monde et de peine… Si l'opinion impatiente préfère les coups d'éclat prématurés à cette méthode plus lente mais si sûre, on n'avait qu'à ne pas m'envoyer ici[30] ».

Voilà énoncé un deuxième fondement de la doctrine de Lyautey. Un moyen de pacification privilégié est l'utilisation des goums. Ils sont créés en 1908, recrutés dans les tribus marocaines. Lyautey fixe leur statut en 1913. Ces formations militaires doivent faire le lien avec la population indigène, faciliter l'administration des tribus, voire aider à établir des contacts avec les tribus rebelles.

Son projet de liaison ferroviaire avec l'Algérie se heurte au verrou de la poche de Taza. Il faut engager l'armée pour sécuriser le parcours. C'est à Gouraud qu'il revient en de commander les troupes. Il réussit au prix de durs combats et est rejoint par les forces venues d'Algérie que commande le général Baumgarten[24]:178. Dans la foulée, en juin, le général Henrys réduit le bastion zaïan et libère Khénifra. En juillet, Gouraud est rappelé à Rabat par Lyautey : la guerre est déclarée.

Informé par Paris, Lyautey écrit : « Mais ils sont fous ! Une guerre entre Européens, c'est une guerre civile… C'est la plus énorme ânerie que le monde ait jamais faite[15]:118,[31] ! »

L'entrée en guerre de la France implique pour le Maroc : l'envoi de troupes, et envoi de fournitures agricoles massives. Une partie du territoire est occupé et on manque de bras dans les régions agricoles. Lyautey s'engage à envoyer immédiatement vingt bataillons et six batteries. L'état-major veut dégarnir le pays pour se replier sur la côte. Lyautey sait le risque d'embrasement qui pourrait suivre le retrait total des troupes qui sont au contact des rebelles, à Taza et autour de Khenifra[n 2]:124. Il refuse, l'état-major laisse faire[24]:191. C'est la stratégie de la « coquille d'œuf » : une armature légère pour donner l'impression que les forces sont toujours là, armature souvent faite de territoriaux venus de France ou de colons en uniformes de légionnaires ou de zouaves[15]:121. Les fournitures agricoles s'élèvent à 100 000 quintaux de blé en 1915, 235 000 en 1916, plus encore pour l'orge et la laine[24]:192.

La Poste de Rabat
La cathédrale de Rabat
Le Palais de Justice de Casablanca
Le Palais de Justice de Rabat (depuis, siège du Parlement)

Lyautey a créé en 1914 une direction de l'architecture et constitué une équipe placée sous la houlette d'Henri Prost, architecte urbaniste. Prostest chargé des plans des villes nouvelles : Rabat (à partir de 1914) et Casablanca (à partir de 1917)[32] en respectant les cœurs de ville anciens, et construisant au dehors des médinas. Et au besoin, mettre en valeur les monuments anciens . La tour Hassan à Rabat est dégagée et mise en perspective[33]. Dans l'équipe, on trouve aussi Tranchant de Lunel[n 3], déjà cité. Une série d'architectes vont passer par l'agence d'Henri Prost avant de s'établir à leur compte[34]. Au premier rang Albert Laprade[35], constructeur de la Résidence (actuel ministère marocain de l'Intérieur) et de la poste à Rabat. Ou Adrien Laforgue (frère de Jules)[34], à qui l'on doit la gare, la cathédrale Saint-Pierre de Rabat aux tours en forme de minaret, le Palais de Justice (actuel Parlement) et d'autres immeubles à Casablanca et à Rabat. Enfin, Antoine Marchisio, futur constructeur avec Prost de l'hôtel de la Mamounia à Marrakech, et Joseph Marrast, concepteur du Palais de Justice de Casablanca.

Le jardin d'Essais botaniques de Rabat
Parc de la Ligue Arabe à Casablanca

En 1913, Lyautey recrute un spécialiste des espaces verts publics pour une mission de conseil temporaire. Le jardinier en chef de la ville de Paris Jean-Claude Forestier est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet[36]. Au terme de sa mission, Forestier remet un rapport de 69 pages sur la politique à suivre en matière d'urbanisme[34],[37]. Il recommande un verdissement des grandes villes marocaines. Sauf Marrakech, les villes étaient pauvres en espaces verts publics. Il demande que les villes nouvelles soient distinctes des médinas. Il veut imposer le respect de l'environnement aux architectes-urbanistes : ils devront inclure dans leurs plans des parcs et des promenades. Lyautez lui confie la conception de deux des nouveaux parcs de Rabat : le jardin du Belvédère, emplacement choisi pour ses vues[37], et le jardin d'Essais botaniques qui accueillera une collection de plantes rares[38]. Saïd Mouline nous apprend en outre qu'il a suggéré à Lyautey le nom d'Henri Prost[37] ! En 1915, Tranchant de Lunel dessine les plans du jardin andalou de la casbah des Oudayas. En 1924, Marcel Zaborsky, élève d'Édouard André, sera chargé du jardin du Triangle de vue, à Rabat (depuis jardin Nouzhat Hassan)[39]. En 1916, Albert Laprade réalise le grand parc Lyautey de Casablanca, depuis parc de la Ligue arabe. Ces espaces verts ont été repris en main et restaurés sous le règne de Mohammed VI.

L'entrée en guerre supprime les contraintes imposées par la conférence d'Algésiras (interdiction de construire des chemins de fer à voie normale (en outre, ceux à voie étroite devaient être réservés aux usages militaires) ; obligation de lancer des adjudications internationales pour les achats de matériels ou les grands travaux). Lyautey lance l'électrification du pays par centrales thermiques, en attendant les premiers barrages. Il programme la construction de routes[15]:128 et de ports. Des gisements de phosphate ont été découverts qui les nécessitent. Un consortium est formé en 1913 pour le port de Casablanca, en chantier depuis 1900, mais dont chaque tempête démolit les digues. Il comprend Schneider, la Compagnie marocaine et la société de travaux publics des frères Jean et Georges Hersent. Une énorme digue parallèle à la côte, le brise-lames, délimite un plan d'eau accessible aux plus gros cargos de l'époque, ainsi qu'aux navires à passagers de la Compagnie Paquet. Le port sera inauguré en 1923. Les Hersent construisent celui de Fedala (depuis, Mohammédia). À Kénitra, au nord de Rabat et à l'embouchure du Sebou, un port fluvial est créé et une ville moderne édifiée : ce sera Port-Lyautey.

Lyautey s'appuie sur les institutions du Maroc traditionnel : administration du sultan (Makhzen), administration des Habous, assemblées de notables et tribus. Il développe le corps des officiers des Affaires indigènes, héritiers des Bureaux arabes d'Algérie[40], pour des tâches civiles et de renseignement. Il s'inspire d'une expérience tunisienne pour implanter au Maroc en 1913 le corps des contrôleurs civils (appelés par les Marocains sidi el Hakem[41]), poste doté d'un prestige certain (beaucoup finissent préfets ou ambassadeurs). Deux administrations coexistent, l'une militaire, l'autre civile, selon un découpage du Maroc en zone militaire (zone tribale et confins), et zone civile (Rabat et le Rharb, Casablanca et la Chaouia)[42]. Les officiers des affaires indigènes opèrent en zone militaire, les contrôleurs civils dans les grandes régions centrales. Lyautey précise leur mission : adapter graduellement le pays aux formes modernes de civilisation, effectuer une mission de conseil et d'assistance, pas d'administration directe, travailler en coopération avec les autorités locales, pachas et caïds[43], qui ont des compétences étendues en matière de justice et d'impôts. Lyautey impose sa vision aux partisans d'une administration directe.

Une kasbah de l'Atlas, aquarelle de Tranchant de Lunel (collection privée)

Lyautey crée en le Service des Beaux-Arts, Antiquités et Monuments historiques. Il est confié à Tranchant de Lunel. Il est composé d'architectes et de peintres. Ses missions :

  • la sauvegarde des monuments historiques de l'antiquité (essentiellement romaine) et de la période islamique ;
  • le relevé des inscriptions historiques ;
  • la sauvegarde des objets d'art et d'ameublement ;
  • la conduite des fouilles archéologiques[44].

Ce service est aidé par les militaires des services topographiques et du génie[45] et par des artisans locaux recrutés et formés spécialement aux styles anciens (almohades, mérinides, etc.) dans des ateliers d'art indigène[46]. Tranchant est assisté par son confrère Maurice Mantout, futur architecte de la Grande Mosquée de Paris, et par Prosper Ricard, chargé de l'enseignement des arts indigènes. Pendant la guerre, les territoriaux, les blessés, les mobilisés sont réclamés par Lyautey : les peintres Joseph de La Nézière, Henri Avelot et Gabriel Rousseau, les photographes Jean Rhoné et Lucien Vogel, les architectes Georges Beaumet, Marcel Rougemont et Léon Dumas, l'archéologue Maurice Pillet[47].

Médersa Bou Inania, Fès, époque mérinide
Musée des Oudayas

Bénéficient du classement et d'un programme de restauration : les médersas de Meknès, Marrakech (médersa Ben Youssef) et Fès (médersas Bou Inania et Attarine).

Lyautey impose une consultation du service des Beaux-Arts sur tous les projets de construction dans ou hors des médinas. Pour ces dernières, il impose le respect des règles ancestrales[48]. Il favorise les artisans marocains à travers des ateliers d'art indigène. Il sauvegarde les branches d'activité non concernées par la restauration des monuments.

Constatant qu'il ne restait plus que deux vieux relieurs à Fès, il les incite à former des apprentis pour perpétuer leur métier[49]. Sauvegarder des objets d'art et d'ameublement implique la création de musées. Il fait acheter plusieurs collections ethnographiques et dès 1915, deux musées voient le jour : celui des Oudayas à Rabat, dirigé par Prosper Ricard, et le musée du Batha à Fès[50].

La foire de Casablanca, 1915, affiche de Joseph de La Nézière

L'arrivée de Lyautey a provoqué un appel d'air en France et en Afrique du Nord : les colons sont arrivés par milliers chaque mois avant la guerre[15]:116. Au début les infrastructures et les logements manquent. Il refuse la colonisation de peuplement pour éviter l'accaparement des terres. Le dahir (décret royal) du interdit l'aliénation des terres collectives[51] et rend difficile leur acquisition par les colons. Il réserve en priorité aux Marocains les postes dans l'administration et les entreprises, pour assurer leur promotion[52] et s'oppose aux arrivées massives de nouveaux venus. Les résistances sont considérables et cette politique sera abandonnée par la suite. Cet afflux va assurer le développement économique du pays.

En agriculture, il suit une double politique : encourager les grosses exploitations confiées à des colons (le pays devient autosuffisant et à l'abri des famines), mais aussi fournir des aides aux petits agriculteurs et éleveurs marocains, sous forme de prêts sans intérêt.

Dès 1912, il crée le service forestier, dirigé pendant des décennies par Paul Boudy[53]. L'industrie de transformation prend le relais avec la création de cotonneries, huileries, minoteries, conserveries et scieries[n 4]. À l'entrée en guerre, on découvre dans le consulat allemand abandonné les éléments d'une remarquable organisation commerciale : des échantillons de tout ce que pouvait produire le Reich…, des échantillons aussi des produits souhaités par le Maroc[15]:128-129. Lyautey décide de promouvoir la production locale et nationale. Une grande foire a lieu à Casablanca en 1915. Une troisième foire aura lieu en 1917 à Rabat, sur le plateau de l'Agdal[54].

Ministre de la Guerre[modifier | modifier le code]

Lyautey, ministre de la Guerre, visite les blessés.
Février 1917 : Guynemer parle à Lyautey.
Lyautey dans les tranchées.

Le , Lyautey reçoit un télégramme d'Aristide Briand, président du Conseil. Il lui propose le poste de ministre de la Guerre. Philippe Berthelot a suggéré son nom[15]:134. Lyautey hésite : la situation s'est tendue au Maroc : un sous-marin a amené des émissaires allemands auprès d'El Hiba (expédition menée par Edgar Proebster). D'autre part, la situation du front est catastrophique. Les pertes sont énormes. Lors d'une permission en 1915, Lyautey avait pu mesurer l'ampleur des pertes  ; il avait parlé de « gaspillage effréné et désordonné » en raison de l'éparpillement des responsabilités et de l'absence de direction d'ensemble[24]:199-201. Briand lui propose de le remplacer par Gouraud en qui il a toute confiance. Il finit par accepter. Il quitte le Maroc le , passe par Madrid saluer le roi Alphonse XIII, et arrive à Paris le .

Il réclame l'unité de commandement. Or, un comité de guerre de cinq membres est crée. Et sont détachés du du ministère de la Guerre : le Ravitaillement, confié à Herriot, les Fabrications de Guerre confiées à Albert Thomas, les Transports et le Service de Santé transformés en sous-secrétariats d'État.

Joffre est remplacé par Nivelle, face à un Pétain plus réservé[55](41). Le 23, Lyautey reçoit Nivelle qui lui soumet son plan d'attaque. Plus tard, Lyautey déclare au colonel Renouard, envoyé par Nivelle : « Voyons mon petit, c'est un plan pour l'armée de La Grande-duchesse de Gérolstein »[n 5]. Le 25, il reçoit Joffre, qui parle de démission[55](49). Le , Lyautey part pour Rome, assister à une importante conférence interalliée sur le front d'Orient. Lyautey revoit le comte de Linange, Autrichien, en résidence surveillée en tant qu'ennemi, vieil ami de Lyautey qui se souvient de ses attaches lorraines… Il va prier à Saint-Pierre pour, confie-t-il à Wladimir d'Ormesson, protester contre la fermeture de l'ambassade de France près le Saint-Siège[55](57-58) ! La conférence n'aboutit à rien.

Fin janvier, il constate l'éparpillement des pouvoirs : l'état-major n'est plus au ministère, rue Saint-Dominique à Paris, mais au Grand Quartier Général basé à Chantilly, et se comporte comme un second ministère[55]:72 : le G.Q.G. formule directement ses demandes d'approvisionnement et de transport aux directions concernées, sans coordination avec la rue Saint-Dominique. Lyautey veut mettre sur pied un pilotage centralisé de l'administration de la guerre : « Avant toute chose, ne fallait-il pas connaître l'ensemble des besoins, apprécier l'urgence relative de ces besoins, réduire, au besoin, tel ou tel transport ? Il en allait de même des questions relatives à l'utilisation des effectifs, et surtout de celles qui s'appliquaient au ravitaillement général des armées et de la nation[55](73) ».

Le , Lyautey reçoit rue Saint-Dominique le colonel Renouard, chargé de lui expliquer dans le détail le plan de l'offensive Nivelle. Renouard avoue à son ministre qu'il ne croit pas plus à ce plan[15]:151. Cette entrevue a été décrite par Maurois et reprise par tous les biographes de Lyautey.

Lyautey veut renvoyer Nivelle et le remplacer par Foch. Briand s'y oppose.[24]:218.

Le roi Albert 1er

Janvier et  : nombreuses inspections du front. , exercice de tanks près de Compiègne avec Nivelle et Franchet d'Espèrey.

, Dunkerque, il visite l'armée belge et salue le « roi-soldat », Albert Ier. Il dîne avec le Premier ministre belge, Charles de Broqueville.

, il remet à Foch la médaille militaire et à Guynemer une décoration anglaise. En passant rapidement au milieu des ruines de Crévic.

23 et 24 février, il parcourt le front britannique, rencontre le maréchal Douglas Haig et le Prince de Galles.

26 février, Calais, importante conférence franco-anglaise, en présence de Briand et Lloyd George[55](81).

La défection de l'allié russe est de plus en plus évidente. Lyautey reporte ses espoirs sur les Etats-Unis pour assurer ses approvisionnements. Max Lazard, à chaque retour de voyage, lui fait des rapports détaillés[n 6],[55](109) sur la mission militaire de la France aux États-Unis.

Depuis son arrivée à Paris, les parlementaires de gauche le présentent comme une sorte de Bonaparte au retour d'Égypte, prêt à fomenter un coup d'État[15]:154.


Ils sont d'autant plus irrités qu'il brouille les cartes : il passe pour de droite, mais affiche des préoccupations sociales; il refuse de mettre au pas le Maroc, conflit qui sera récurrent jusqu'à son départ en 1925. Lyautey crée une direction de l'Aviation[55](86). Le général Guillemin est nommé. L'opposition organise un débat en comité secret à partir du . Lyautey n'en veut pas. Le résultat de ces réunions est connu des Allemands. Du 11 au 14 au matin, il est à Londres pour des discussions avec les Anglais sur la nécessaire unité de commandement[55](89). L'après-midi du 14, devant les députés réunis en comité secret (tribunes évacuées), une bronca interrompt son discours. Il démissionne le soir même. Il dit à Guillaume de Tarde : « Tu avais raison, je n'ai jamais rien compris à cette race »[15]:156.

Lyautey envoie le texte de son discours aux responsables politiques ; seul Gaston Doumergue répond qu'il l'approuve entièrement[55](110).

Deux jours après, Briand démissionne. Il est remplacé par Alexandre Ribot, avec Paul Painlevé comme ministre de la Guerre.

Le , le nouveau chef du gouvernement demande à Lyautey de reprendre son poste au Maroc. L'offensive Nivelle, déclenchée en avril, est un désastre. Fin avril, Painlevé décide l'unité de commandement. Il appelle Foch au commandement suprême des armées et Pétain au poste de chef d'état-major général chargé de faire le lien avec les Alliés.

Début mai, il est de retour à Paris, rencontre Ribot, Painlevé, Poincaré, Foch et Pétain[55](123). Clemenceau revient au pouvoir à la fin de l'année. Il avalise ces décisions et, pour certaines, les renforce[55](103-104 & 122).

Retour au Maroc (1917-1925)[modifier | modifier le code]

Poursuite du programme[modifier | modifier le code]

L'équipe Lyautey en 1925.
Wladimir d'Ormesson en 1919
Pierre Viénot, ministre.

Lyautey quitte Paris le . Il s'arrête à Madrid pour s'entretenir avec le roi et le chef du gouvernement. Alphonse XIII lui fait discrètement savoir qu'il aimerait le voir soutenir l'idée d'une paix séparée avec l'Autriche. L'empereur Charles Ier et l'impératrice Zita y travaillent. Il refuse de s'engager[55](131). Le , selon Maurois, il échappe à une torpille. Il arrive à Casablanca et retrouve une équipe de fidèles.

Lyautey aime à s'entourer de jeunes gens[56].


Sur la photo de 1925, on peut voir, debout de gauche à droite : le capitaine Pélier,le colonel Huot (l'homme de l'ombre est dans l'ombre),le Maréchal,Pierre de Sorbier,le commandant Ract-Brancaz,le capitaine Fouques-Duparc,Émile Vatin-Pérignon,le capitaine Deschanel,le comte de Saint-Quentin,le capitaine Bourgin.


Assis, à l'extrême-gauche : le lieutenant Durosoy et, au premier plan au centre, Gaston Palewski.


Dans le premier cercle et sur toute la durée, on trouve, côté militaires : le général Poeymirau, le chef militaire, mort en 1924 ; le général Gueydon de Dives, chef d'état-major en 1914, suivi du colonel Jean Delmas, mort en 1921 ; le capitaine Bénédic, futur colonel, chef du cabinet militaire ; le colonel Berriau, chef des affaires indigènes et du renseignement, mort en 1918[57], suivi du colonel Huot; Maurice Durosoy, arrivé en 1924 comme aide de camp, puis chef de cabinet du maréchal, futur général.

Officiers d'ordonnance : Wladimir d'Ormesson, Édouard Champion (l'éditeur), Joseph Pélier, Yves de Boisboissel, Louis Guillon, Fouques-Duparc, etc.


Les membres de son cabinet militaire : le commandant Ract-Brancaz (du service du renseignement), Georges Spillmann (du même service, futur général), le commandant Cellier, Aimery Blacque-Belair (le lieutenant des Dialogues sur le commandement de Maurois), le capitaine et secrétaire d'ambassade Étienne de Felcourt, chargé des renseignements extérieurs, Alfred Droin, l'officier poète[15]:121 96-97, François de La Rocque, à l'état-major de Lyautey de 1913 à 1916, puis brièvement en 1925 comme lieutenant-colonel chargé du deuxième bureau.


Trois militaires ont succédé à Lyautey comme résident général : Charles Noguès et Alphonse Juin, qui l'ont servi au plus près, et Augustin Guillaume, qui n'a que brièvement été au cabinet de Lyautey. Juin l'a suivi en France en 1925, et a continué à le servir au sein du Conseil supérieur de la guerre.

Côté civils, le premier cercle comprend : Robert Billecard, chef du cabinet civil de 1912 à 1914, suivi de M. Révilliod et d'Émile Vatin-Pérignon ; Paul Tirard, secrétaire général du Protectorat en 1913-14, suivi d'André Lallier du Coudray ; Pierre de Sorbier, d'abord chef du cabinet diplomatique, puis secrétaire général adjoint du Protectorat en 1917, enfin secrétaire général de 1920 à 1924[58] ; Charles de Saint-Aulaire, diplomate, au Maroc depuis 1902, délégué à la Résidence générale de 1912 à 1916, suivi d'Urbain Blanc ; Guillaume de Tarde, secrétaire général adjoint du Protectorat, puis directeur des affaires civiles de 1917 à 1920 ; François Piétri, chef des services financiers jusqu'en 1924, inspecteur des finances et futur ministre ; René de Saint-Quentin, chef du cabinet diplomatique, futur ambassadeur.

Dans le second cercle, on trouve : Henri Gaillard, diplomate, secrétaire général du gouvernement chérifien (poste supprimé en 1917), Félix de Vogüé, seul fils survivant d'Eugène-Melchior, Pierre Viénot, secrétaire particulier[59] ainsi que Georges Hutin[n 7], Gaston Palewski, Gérard de Launay, Henry de Castries et son successeur à la tête du service historique, Pierre de Cenival[60], Tranchant de Lunel (jusqu'à son renvoi en 1923), son successeur, Jules Borély, Paul Boudy, chef du service forestier, Henri Prost et plusieurs de ses collègues architectes.

Parmi les anciens membres de l'équipe, quatre lui ont consacré des livres : Guillaume de Tarde, Wladimir d'Ormesson, les généraux de Boisboissel et Durosoy.

La Mamounia centenaire !

L'économie du Maroc est stimulée après guerre par une découverte en 1917 : les phosphates de Khouribga. Depuis 1908, on sait qu'il y a des phosphates au Maroc (C'est une des raisons de l'intérêt des Allemands pour le pays). L'importance du gisement de Khouribga est considérable. On prévoit que la quasi-totalité de la production devra être exportée. Lyautey prend deux décisions : d'abord, l'exploitation sera confiée à l'Office chérifien des phosphates, créé en 1920. Ensuite, les travaux du port de Casablanca, toujours en cours, sont modifiés : on crée un quai des phosphates, doté de larges surfaces d'entrepôts, de grues dédiées et de liaisons ferroviaires.

L'exploitation commence en 1921. C'est une manne pour le pays. La Banque de Paris et des Pays-Bas, évincée de l'exploitation des phosphates, se rattrape en obtenant, toujours en 1920, la concession du transport ferroviaire au Maroc. Elle crée à cet effet la Compagnie des chemins de fer du Maroc (CFM). Ses débuts sont très lents, tant que la traction électrique n'a pas été adoptée (1925). Cette compagnie devient célèbre dans le monde entier quand elle construit un hôtel de luxe à Marrakech en 1923 : la Mamounia. Suivent des hôtels rachetés à la Compagnie générale transatlantique (Palais Jamaï à Fès, Transatlantique de Casablanca, Meknès et Agadir). La concession de l'électricité suit celle des chemins de fer ; elle est accordée en et autorise, entre autres, la construction de plusieurs barrages sur l'Oum Errabiâ. Une société est créée en  : Énergie électrique du Maroc (EEM), chapeautée encore par la Banque de Paris et des Pays-Bas, qui la contrôle directement ou via la CFM. Dès , une grosse centrale thermique entre en service sur le site des Roches Noires à Casablanca. Un an plus tard, démarrent les travaux des premiers barrages[61].

Didier Daurat (musée Guillaumet)
La ligne Latécoère en 1922

Si le Maroc a naturellement été en retard sur la métropole pour les chemins de fer, il n'en va pas de même pour l'aviation, dont Lyautey a vite compris le potentiel. Déjà, pendant la guerre, il a obtenu en 1916 l'envoi de deux escadrilles pour parer au déficit de troupes au sol, qui servent à la reconnaissance et au bombardement. Elles sont équipées de Voisin et de Farman, et servent en particulier dans la région de Taza et celle du Tafilalet[62]. C'est en 1918 que l'industriel Pierre-Georges Latécoère décide de développer les liaisons aériennes avec le Maroc, et au-delà l'Afrique de l'Ouest et l'Amérique du Sud ; il crée à cet effet la CEMA (Compagnie Espagne-Maroc-Algérie) avec laquelle le gouvernement signe un contrat pour le transport du courrier, comprenant une subvention annuelle de Lyautey. Le , Latécoère est à bord du vol d'essai du Salmson 2A2 qui relie Toulouse à Casablanca, vol effectué en 11h45. À son arrivée, il remet à Lyautey le journal de la veille et à la générale un bouquet de violettes fraichement cueilli[63]. Le , vol inaugural de la ligne postale sur Breguet XIV avec aux commandes Didier Daurat, qui est par la suite le patron de la ligne du Maroc. En , le roi Albert Ier de Belgique en visite à Rabat exprime le souhait de revenir en France en avion et Lyautey organise son voyage, mais tout le monde tremble, y compris le pilote[64]. A voir une photo de l'appareil, il devait falloir un certain courage pour monter à bord ! De 1919 à 1921, il y a eu de nombreux accidents mortels, au point que Lyautey a dû interdire aux membres de son cabinet de prendre l'avion[65]. À l'été 1922, Latécoère demande à Lyautey son aide pour définir les escales de la future ligne vers Dakar. Lyautey confie les reconnaissances nécessaires au capitaine Joseph Roig[66], le chef d'escale de Latécoère au Maroc, et à un officier de goumiers qui sert d'interprète[n 8]. En , premier vol vers Dakar. En 1924, Latécoère transporte 2 000 passagers et des millions de lettres sur la ligne du Maroc. Cependant, durant toutes les années 1920, les escales du sud, Cap Juby (Tarfaya) et Villa Cisneros (Dakhla) posent un problème majeur d'insécurité, avec de nombreux équipages capturés, blessés, ou même tués (voir les aventures de Jean Mermoz et de Saint-Exupéry), les Espagnols étant incapables de pacifier la région et Lyautey se voyant interdire d'y intervenir.

Haras national de Meknès

La colonisation officielle des terres s'est faite sous Lyautey par :

  • rachat de terres guich. Puisque la protection du sultan est assurée par la France, ce statut devient obsolète,
  • rachat de biens habous,
  • rachat de 50 000 ha à de grandes sociétés foncières,
  • confiscation de 30 000 ha appartenant à des Allemands ou Austro-Hongrois,

soit au total quelque 200 000 ha de lots de colonisation officielle, auxquels il faut ajouter les achats privés. Trois corps sont créés pour développer l'agriculture : officiers des eaux et forêts, ingénieurs du génie rural et inspecteurs de l'agriculture. Le service des forêts est confié à Paul Boudy et celui du génie rural à Jacques Nacivet, qui obtient en 1923 que l'hydraulique agricole, si importante au Maroc, soit détachée de la direction des travaux publics et placée sous sa coupe. Quant aux inspecteurs de l'agriculture, ils ont entre autres pour mission la vulgarisation des techniques agricoles, et la distribution d'engrais et de semences. Les cultures passent dans la Chaouia entre 1915 et 1923 de 201 000 ha à 422 000, dont de 16 000 à 31 000 ha pour les lots de colonisation[67]. Quant à la production globale, elle passe de 1915 à 1924 pour les céréales de 13,8 à 22,2 millions de quintaux, et pour les bovins de 548 000 têtes à 1 568 000[68]. Fin cavalier et passionné d'équitation, Lyautey ne manque pas d'imprimer sa patte dans ce domaine. Il a repéré dès 1912 un vétérinaire militaire, le colonel Théophile Monod. Il lui confie le service de l'élevage nouvellement créé, avec en ligne de mire les pur-sang arabes. Ce dernier crée en 1914 le haras de Meknès, qui a pour première tâche les remontes militaires, puis après la guerre l'amélioration génétique et la promotion du jumping[69].

Bernard Boutet de Monvel
Jacques Majorelle

À son retour en 1917, Lyautey a continué de plus belle à récupérer les spécialistes dont il avait besoin et qui étaient au front, qu'ils soient réaffectés ou réformés ; c'est ainsi qu'il invite le Lorrain Jacques Majorelle à venir. Henry de Castries, il y a peu dans l'Oise, retrouve son service historique qui est érigé en Institut historique du Maroc[70]. Plusieurs architectes arrivent, dont Auguste Cadet. Bernard Boutet de Monvel, affecté en 1917 à la base aérienne de Fès, est incité par Lyautey à reprendre ses pinceaux. Il fera en particulier le portrait en pied du maréchal. Le service des Beaux-Arts est la même année à l'origine d'une découverte majeure : les tombeaux saadiens de Marrakech, murés depuis deux siècles, qu'il étudie et publie[71]. Ce service est étoffé en 1918 avec la création d'un Office des arts indigènes, confié à Joseph de La Nézière. En 1919, il est rattaché à la direction de l'Instruction publique, des Beaux-Arts et des Monuments historiques à la tête de laquelle vient d'être nommé Georges Hardy. Puis en 1920, l'ensemble du service des Beaux-Arts est réorganisé en trois sections :

  • monuments historiques, palais et résidences, confiée à Edmond Pauty
  • arts indigènes (ateliers, enseignement, musées) confiée à Prosper Ricard et Joseph de La Nézière, épaulés par des ethnographes comme Jean Gallotti et une cohorte de peintres, dont fait partie Azouaou Mammeri[n 9]
  • antiquités, confiée au spécialiste de Volubilis, Louis Chatelain[72]
Jean Gallotti, Le Jardin et la Maison arabes au Maroc (1925)

En 1923, le service est en crise : Lyautey doit renvoyer son chef, Tranchant de Lunel, pris dans des affaires de mœurs et de drogue. Il n'est remplacé qu'en 1924, par Jules Borély. Cadeau de départ du service au maréchal en 1925 : le beau livre de Jean Gallotti Le Jardin et la maison arabes au Maroc (deux tomes) illustré par Albert Laprade, avec une lettre-préface de Lyautey lui-même : « Vous avez écrit un livre non seulement d'artiste et d'érudit, mais d'amoureux. Un soir de cet été [1925], j'ai pu feuilleter votre manuscrit resté longtemps sur ma table, au milieu des préoccupations que vous savez. C'était comme lorsqu'on pénètre, à la fin d'une journée accablante, derrière les murs hostiles d'une casbah, dans un jardin de cyprès, où vous assaillent la fraicheur des fontaines, le parfum des roses et le vol des colombes ».

Jusqu'à la fin de la guerre, Lyautey avait mobilisé les peintres pour des relevés des monuments à sauver. Ce travail achevé, il incite les artistes de passage (tels que Raoul Dufy) à rester au Maroc en mettant des ateliers à leur disposition et s'occuper activement de la promotion des peintres et sculpteurs, en parrainant de nombreuses expositions au Maroc, à Marseille et à Paris, avec l'aide en particulier de la galerie Georges Petit. Il les structure également. Il y a bien une association des peintres orientalistes en France, mais il veut faire émerger une école proprement marocaine. L'Association des peintres et sculpteurs du Maroc est créée en 1922, placée sous la tutelle de Georges Hardy. Elle comprend au départ douze membres : Jean Baldaoui, Jean Hainaut, Raphaël Pinatel, Paul Lafond, Édouard Brindeau de Jarny, Marcel Vicaire, André Lenoir, Mattéo Brondy, Edmond Pauty, Albert Laprade, Gabriel Rousseau, Blanche Laurent-Berbudeau[73]. Autour d'eux, on peut encore citer : Jules Galand et Bernard Boutet de Monvel, deux officiers-peintres, Tranchant de Lunel, André Suréda, Henri Derche, Charles Duvent (honoré de plusieurs commandes officielles), Camille Josso, Azouaou Mammeri et bien sûr Jacques Majorelle, qui s'installe à Marrakech en 1922. Leurs thèmes favoris sont les médinas, les fantasias et les kasbahs de l'Atlas. Pour accueillir leurs œuvres, un musée d'art moderne est créé en 1923 à Rabat. Il porte le nom du grand ancien, Eugène Delacroix, dont les carnets du Maroc sont célèbres[74].

De 1917 à 1925, un nouveau contingent d'architectes arrive au Maroc : Marius Boyer, Edmond Brion, Auguste Cadet, Jean Balois, Albert Greslin, dont le principal centre d'intérêt est la ville de Casablanca en pleine expansion. Leur style est foisonnant et fait appel à toutes les références, du néo-mauresque à l'art déco, avec souvent des créations très personnelles qui font la richesse de la ville. Certains ont été appelés par Lyautey lui-même. Mais leurs plus belles réalisations datent d'après son départ, comme le siège de la Banque d'État du Maroc à Rabat, par Brion et Cadet, à la façade ornée de pierre ocre (pierre de Salé) richement sculptée (depuis, Bank Al-Maghrib).

Jérôme et Jean Tharaud (de droite à gauche)
André Maurois, Lyautey (1931)

Par le recours aux écrivains, Lyautey s'est directement impliqué dans une autre forme de mise en valeur du Maroc : frappé par le rôle que Loti a pu jouer vis-à-vis de la Turquie[n 10], il invite, cornaque, cajole toute une série d'écrivains, reconnus ou non. S'ils arrivent sans le sou comme Jérôme et Jean Tharaud, il subvient à leurs besoins matériels et en est payé de retour par des livres qui participent au mythe : Rabat ou les heures marocaines, Marrakech ou les seigneurs de l'Atlas, Fès ou les bourgeois de l'Islam[55](141-143). Des résidents sont mis à contribution : Joseph Vattier (Âmes maghrébines, 1925) ou Aline Réveillaud de Lens (Derrière les vieux murs en ruines, 1922). Des écrivains reconnus sont invités : Edith Wharton en 1917 (In Morocco, 1919), Claude Farrère en 1920 (Les Hommes nouveaux, Lyautey l'Africain, 1922). Le maréchal connaît Paul Desjardins, l'homme des décades de Pontigny, depuis trente ans. Il l'invite à Rabat avec André Gide et d'autres auteurs de la NRF ; il lui présente Pierre Viénot et Aimery Blacque-Belair qui sont à son cabinet et que Desjardins embauche pour ses décades[75]. Divers auteurs de la NRF s'intéressent au maréchal (Roger Martin du Gard et Jean Schlumberger notamment). Autre habitué des décades : André Maurois, invité lui aussi, obtient le droit de rédiger la biographie de Lyautey, la seule qui paraît de son vivant. On peut encore citer Jacques Ladreit de Lacharrière, qui s'intéresse au Maroc depuis le début des années 1910 et a publié de nombreux articles sur Lyautey, André Chevrillon (Visions du Maroc, Marrakech dans les palmes, Un crépuscule d'Islam), et Henry Bordeaux, qui a fait dans les années 1920 de longs séjours au Maroc et en a tiré plusieurs récits, romans ou essais : Un printemps au Maroc, Le Miracle du Maroc, Henry de Bournazel, ou Le Gouffre[76]. Reste un cas un peu à part, celui de Jean Giraudoux, car s'il est venu au Maroc, c'est en service commandé, en tant que responsable du service des œuvres françaises à l’étranger dépendant du Quai d'Orsay. Le courant passe tout de suite avec Lyautey, dont l'influence le marque durablement, notamment ses conceptions urbanistiques[77]. Giraudoux retrouve d'ailleurs au Maroc son camarade de lycée Albert Laprade[78]. Plus étonnant, la personnalité de l'écrivain semble avoir séduit le Sultan[79]. Giraudoux et Lyautey se revoient par la suite en France, en particulier au moment de l'Exposition coloniale.

Le programme de pacification, laissé entre parenthèses pendant la guerre, est repris ensuite, car des tribus sont à nouveau entrées en rébellion dans le Rif, vers Taza, dans le Moyen-Atlas et dans le Sud. Lyautey veut certes pacifier mais aussi rêve de reformer l'empire chérifien du temps de Moulay Ismaïl, de la Méditerranée au Sénégal[24]:243:267-280. Les caïds alliés, Goundafi et Glaoui, sont mis à contribution pour la rébellion du Souss où des tribus sont restées fidèles à El Hiba. Le général Aubert sécurise (provisoirement) la zone de Taza en 1918, le général Maurial fait de même dans le Moyen-Atlas. Le colonel Doury écrase une harka qui menaçait le Tafilalet. Une opération exemplaire a lieu en à Ouezzane. C'est un des sanctuaires les plus vénérés du Maroc, situé dans une région du Rif devenue inaccessible au Makhzen en raison de la présence de tribus qui l'ont mise en coupe réglée. Lyautey veut mettre fin à cette situation en évitant toute effusion de sang, en raison de la présence de ce sanctuaire. Il envoie donc des troupes commandées par Poeymirau et en même temps engage des négociations qui sont couronnées de succès. Lyautey entre à Ouezzane en octobre accompagné du sultan qui reçoit un accueil triomphal et peut aller faire ses dévotions au mausolée du saint, ancien grand maître du soufisme[24]:244-248. À la même époque, il envoie deux colonnes dans le grand sud contre des tribus insoumises de la région de Tarfaya (Cap Juby) mais il s'agit d'une zone d'influence espagnole et il est stoppé net par Paris[24]:280-281. Au printemps 1923, une nouvelle campagne doit être lancée pour réduire la tache de Taza, qui bloque le passage vers l'Algérie. Elle est menée par le fidèle Poeymirau et donne lieu à de violentes batailles. Sur le terrain, on retrouve Henri de Bournazel et sa légendaire tunique rouge, Durosoy, pas encore aide de camp de Lyautey, Blacque-Belair, laissé pour mort à El Mers[80], et un jeune et déjà brillant capitaine : Jean de Lattre.

Difficultés fatales[modifier | modifier le code]

Lors de son second séjour de Lyautey doit affronter deux types de difficultés : personnelles avec une santé de plus en plus chancelante, et politiques avec l'opposition grandissante des colons, l'administration qui lui échappe et le gouvernement qui lui est de plus en plus hostile. Ces difficultés l'amènent à présenter trois fois sa démission, fin 1923 après le départ ou la disparition de plusieurs de ses fidèles, en après le départ d'Alexandre Millerand qui le soutenait, et en 1925 après la nomination de Pétain pour diriger les opérations militaires[81].

Il accumule notamment les crises de foie : une en 1915, une autre après son départ du ministère qui l'oblige à un mois de cure à Vichy[55](112). En , de retour d'Alger en voiture, il manque d'y rester, réussit à regagner Fès où les médecins diagnostiquent une crise de vésicule biliaire qui nécessite une opération. Il est intransportable. La foule se rassemble sous ses fenêtres et les oulémas lui font réciter des prières, l'iman de Moulay Idriss vient avec un flacon d'eau de la source du lieu et des cierges qu'il place au pied du lit du maréchal. Le lendemain, il se sent mieux et on crie au miracle[15]:161. Une semaine plus tard, il peut envisager de partir à Paris se faire opérer. Début 1924, nouvelle crise et nouvelle opération. Il passe plusieurs mois à Paris jusqu'aux élections. À Lucien Saint qui l'accompagne à la gare de Lyon, il dit : « Je ne retourne à Rabat que pour faire mes malles… les élections, ma santé, c'est bien fini »[24]:303-304.

Lyautey était contre la colonisation de peuplement mais il n'a pas pu s'opposer à ce déferlement qui a accompagné les premières années de son proconsulat. Hors les risques de conflit avec la population locale sur l'appropriation des terres ou des emplois, il craignait que ceux, très nombreux, qui venaient du reste de l'Afrique du Nord ne veuillent transposer au Maroc le régime algérien de l'administration directe.

Le problème avec les colons se double d'un problème avec l'administration. Ses cadres français ne comprennent pas la nécessité de partager le pouvoir avec des indigènes et ont une tendance naturelle à l'accaparer. D'où un dérapage continu pendant la guerre qui amène Lyautey à taper du poing sur la table en 1920 : c'est le fameux texte dit « du coup de barre », en fait, une lettre au président du Conseil du  : « Voici le moment de donner un sérieux coup de barre au point de vue de la politique indigène et de la participation de l'élément musulman aux affaires publiques. Il faut regarder bien en face… la situation du monde musulman et ne pas se laisser devancer par les événements. Ce n'est pas impunément qu'ont été lancées à travers le monde les formules du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et les idées d'émancipation… Il faut bien se garder de croire que les Marocains échappent ou échapperont longtemps à ce mouvement général… Ce serait absolument une illusion de croire que les Marocains ne se rendent pas compte de la mise à l'écart des affaires publiques dans laquelle ils sont tenus. Ils en souffrent et ils en causent… Ils ne sont ni barbares, ni inertes… Il se forme chez eux une jeunesse qui se sent vivre et veut agir, qui a le goût de l'instruction et des affaires. À défaut des débouchés que notre administration lui donne si maigrement et dans des conditions si subalternes, elle cherchera sa voie ailleurs… Il faut donc entrer résolument et vite dans une nouvelle voie »[n 11]. Le problème est que la classe politique n'est pas prête à entendre un tel discours, mais Lyautey s'inquiète des revendications d'indépendance qu'il commence à percevoir. La solution qu'il préconise dans ce texte et tente de mettre en œuvre est celle de la formation d'élites marocaines, qui prendront peu à peu la relève. Il rappelle qu'il a en 1916 proposé de former des jeunes issus des collèges musulmans en leur procurant des stages dans la fonction publique mais que cette proposition est restée lettre morte.

L'école militaire de Dar El-Beïda à Meknès

Autour de 1914, Lyautey a fondé des collèges musulmans à Fès (collège Moulay Idriss) et à Rabat (collège Moulay Youssef), puis en 1918 à Meknès (école militaire de Dar El-Beïda[82]). Leur inconvénient est le manque de débouchés car ils ne permettent pas de passer le baccalauréat. Néanmoins, l'intégration d'élèves officiers de Dar El-Beïda dans l'armée est facilitée. En application du programme transmis au gouvernement, Lyautey décide en 1921 que les trois premiers de chaque promotion de Dar El-Beïda se verront offrir des postes à la Résidence, au Makhzen et au renseignement, mais comme leur bagage est insuffisant, il organise pour chaque promotion des stages et voyages en France, avec visite des principales institutions de la République et rencontres avec les hauts responsables de l'État[83]. Parallèlement, il crée en 1920 l'Institut des Hautes Études marocaines à Rabat, dont l'animateur est le grand arabisant Évariste Lévi-Provençal, avec mission d'acculturer à petites doses l'élite de la société[84]. Aux congrès de l'Institut, Lévi-Provençal tient d'ailleurs ses discours en arabe. Ces réformes ne suffisent pas pour vaincre les résistances de l'administration qui sont renforcées par l'arrivée de nouveaux résidents généraux.

La guerre du Rif[modifier | modifier le code]

Abd El Krim

Après l'arrivée au pouvoir du cartel des gauches, les instructions envoyées à Lyautey changent : « Le Maroc a assez coûté, il faut maintenant qu'il rapporte[24]:305 ». On veut pour cela qu'il modifie la structure du pays et adopte celle de la métropole, en d'autres termes, qu'il passe à l'administration directe. Lyautey s'y refuse en s'abritant derrière les traités. En réponse, ses crédits sont rognés, ses décisions critiquées[24]:306. Il s'apprête à démissionner quand Abd El Krim, en révolte depuis trois ans contre l'Espagne dans les montagnes du Rif, invite ses compatriotes à se retourner contre la France. Du coup, le gouvernement change de discours et demande à Lyautey de rester. Il accepte et défait ses bagages. L'adversaire qu'il affronte a étudié à l'université Al Quaraouiyine, à Fès, et été nommé cadi de Mellila, avant d'être jeté en prison pour s'être opposé à la politique de conquête espagnole. Lyautey est resté dans l'expectative au début du conflit, peut-être lorgnait-il du côté de Larache et Tanger, mais il était surtout préoccupé d'empêcher une jonction entre les tribus qui contrôlent la tâche de Taza (qu'il combat de façon discontinue depuis 1914) et celles du Rif. Les choses changent quand le sultan Moulay Youssef refuse en 1924 de rejoindre le combat d'Abd El Krim ; ce dernier appelle donc directement à la révolte contre la France. Lyautey peut d'autant moins reculer qu'Abd El Krim a franchi la ligne rouge en contestant l'autorité du Sultan et en parlant ouvertement de le remplacer[15]:174, comme El Hiba dans le sud dix ans auparavant[n 12]. Déjà, dans toute la zone, les oulémas disent la prière en son nom[24]:318.

En 1924, Abd El Krim se contente d'établir une ligne de postes fortifiés face à ceux des Français. Lyautey demande à l'automne combien la métropole peut lui envoyer de troupes en cas d'assaut. Onze bataillons, répond l'état-major[24]:322. Les premières attaques surviennent en avril 1925 dans la région de l'Ouergha. Les troupes résistent péniblement. Une deuxième offensive a lieu au début de l'été, visant l'est et l'ouest du premier front : Taza et Ouezzane ; offensive à nouveau stoppée. Abd El Krim, qui se vantait d'être à Fès le , n'y est pas et c'est au contraire Moulay Youssef qui y vient et exhorte son peuple à la résistance[85]. Lyautey constate qu'une grande partie des tribus est restée fidèle au Makhzen[24]:337, mais il est très fatigué car il n'a dormi que quatre heures par nuit pendant l'offensive ; il demande donc qu'on lui envoie un général pour assurer la conduite des opérations sur le terrain, qui remplace en quelque sorte Poeymirau, mort l'année précédente. Le gouvernement choisit le général Naulin.

Lyautey souhaite ménager Abd El Krim, dont il a reconnu la valeur, qu'il ne désespère pas d'amener à résipiscence et verrait bien comme un caïd du Rif, reconnaissant l'autorité du Makhzen[n 13]. C'est pourquoi il ne poursuit pas l'offensive contre lui, il veut juste, en plein accord avec Naulin, continuer sa bonne vieille méthode : l'alternance de la diplomatie et de l'usage de la force. Militairement, il n'envisage pour l'instant que de récupérer le terrain perdu, en donnant au passage une leçon aux tribus qui ont trahi, dont les Beni Zeroual[85]:258-259. Attitude incompréhensible pour le gouvernement qui est toujours dans le même état d'esprit que pendant la Grande Guerre et veut écraser l'adversaire. On se souvient du refus d'une paix séparée avec l'Autriche qui aurait pourtant épargné bien des vies humaines. Il est donc décidé à Paris de décharger Lyautey de toute responsabilité militaire, de passer des accords avec l'Espagne pour une offensive conjointe de grande ampleur et de nommer Pétain comme commandant en chef des forces armées. Décision prise le mais tenue secrète sur le moment. Pétain, que Painlevé avait envoyé au Maroc en juillet pour une évaluation de la situation, y revient le avec cette fois les pleins pouvoirs. La guerre qu'il livre de concert avec Primo de Rivera et Franco, en alignant quelque 400 000 hommes, est conforme aux vœux des politiques : les forces d'Abd El Krim sont écrasées sans merci et l'usage d'armes chimiques fait des ravages dans la population civile.

Démission et retour[modifier | modifier le code]

Plaque au domicile parisien du maréchal Lyautey, no 5 rue Bonaparte.

Son état-major est retiré à Lyautey dès l'arrivée de Pétain, qui lui signifie « que son temps est révolu et qu'il ne va pas tarder à être remplacé par un Résident civil »[24]:344. Il est de fait convoqué à Paris fin août. Une fois dans la capitale, ses amis lui dépeignent l'hostilité qui règne à son égard dans les milieux politiques. Il a vite confirmation qu'on veut sa tête et repart sans avoir vu les ministres. Il met ses affaires en ordre et rédige le sa lettre de démission : « Du jour où la menace rifaine s'est réalisée, je n'ai plus eu d'autre pensée que de tenir le coup avec les moyens réduits dont je disposais au début, et de sauver la situation. Aujourd'hui, on peut sincèrement affirmer que le danger est écarté et que, avec les effectifs à pied d'œuvre, l'avenir peut être envisagé avec confiance. C'est donc en toute sécurité de conscience que je demande à être relevé de mes fonctions [24]:345». Cet état des lieux rend difficilement compréhensible l'hécatombe qui a suivi l'intervention de Pétain et de ses alliés.

Le maréchal entame ensuite une tournée d'adieux de dix jours. Sa dernière entrevue, le , est pour le Sultan. Les tribus lui envoient une lettre d'adieux dans laquelle elles adressent « leurs remerciements à l'homme plein de sollicitude qui, par sa grande et belle œuvre… étend partout le manteau de l'ordre, jette à bas les citadelles de l'anarchie et fait toujours en sorte qu'il n'y ait aucun conflit entre la civilisation et les coutumes anciennes du pays »[15]:179-180. Le à Casablanca où il embarque sur l'Anfa, le port est noir de monde. Dans la foule compacte, Lyautey circule presque en silence, serrant des mains, murmurant quelques mots. Sur le pont, il fait un signe d'adieu et se retourne : « Les officiers sont effrayés de voir l'expression de son visage, c'est celui d'un homme terrassé par le chagrin »[24]:348. Au passage de Gibraltar, la flotte anglaise lui rend les honneurs militaires. L'arrivée à Marseille est glaciale : aucune troupe, aucun officiel, juste les amis au premier rang desquels d'Ormesson, qui émet une vigoureuse protestation dans Le Figaro sous la forme d'une lettre ouverte au Président du Conseil[55](196-199).

C'est encore dans la période pendant laquelle Lyautey est résident général, qu'Urbain Blanc, Secrétaire général du Protectorat, promulgue le 21 septembre 1925 l'interdiction du commerce public des esclaves et précise les conditions de leur affranchissement[86].

La fin de sa vie en Lorraine[modifier | modifier le code]

château de Thorey
Château de Thorey.
La Grande Mosquée de Paris.
Le Palais de la Porte Dorée.
Le bureau de Lyautey au Palais de la Porte Dorée

Après l'incendie et le pillage par les troupes allemandes de la propriété familiale à Crévic, effectués en représailles du traité de protectorat du Maroc, le maréchal Lyautey a décidé de s'installer à Thorey, village qui adjoint à son nom celui de son célèbre résident. À partir de 1922, il y fait construire par Albert Laprade un château sur l'édifice d'une gentilhommière héritée de sa tante maternelle, Mlle de Villemotte, dont il était très proche et s'y installe en 1925, à 71 ans. Cette vaste demeure comprend une grande bibliothèque, une salle marocaine et une salle lorraine, ornée des portraits des ducs. Lyautey a décidé de s'intéresser de près à sa province de naissance. Il soutient le musée lorrain dont il préside la société d'amis. Il est membre de l'académie de Stanislas. Il fait construire un nouveau pavillon pour les étudiants catholiques de Nancy. Son amitié avec le prince Sixte de Bourbon-Parme lui donne l'occasion de renforcer ses liens avec sa sœur, l'impératrice Zita et à travers elle, avec toute la Maison de Habsbourg-Lorraine. En accord avec eux, il fait dire une messe annuelle à la mémoire des ducs de Lorraine en l'église des Cordeliers de Nancy[n 14] et reçoit à son domicile parisien l'archiduc héritier, Otto de Habsbourg-Lorraine.

Le a lieu l'inauguration de la Grande Mosquée de Paris. Lyautey n'y est pas invité[87]. Il compte pourtant parmi les promoteurs du projet, qu'il a toujours ardemment soutenu, pour lequel il a mis ses architectes à disposition et dont il a présidé la cérémonie de pose de première pierre le . À cette occasion, il a rappelé le mot de Maurice Colrat à propos de cette construction : « Il ne montera vers le beau ciel de l'Ile-de-France qu'une prière de plus, dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses »[88],[89]. Le gouvernement a pris soin d'inviter le sultan Moulay Youssef. Quand ce dernier arrive à Paris et constate la situation, sa réaction est éloquente : aussitôt après la cérémonie, il file à Thorey avec toute sa suite saluer le maréchal[90].

Pavillon du Maroc à l'Exposition coloniale

En 1927, il accepte le poste de commissaire général de l'Exposition coloniale qui se tient à la Porte Dorée à Paris en 1931. Aidé par une poignée de ses anciens, avec Gérard de Launay en chef de cabinet, il réussit le tour de force de présenter des reproductions des monuments des cinq continents, tels que les temples d'Angkor, des mosquées, des ksour, la maison de George Washington, des paillotes tahitiennes, avec force animations, et de tenir son budget en équilibre grâce aux 33 millions de billets vendus[15]:188. Au milieu de ces constructions éphémères trône le Palais de la Porte Dorée, un chef-d'œuvre art déco signé d'Albert Laprade, ancien architecte de Lyautey au Maroc. Après l'exposition, le palais abrite un musée des colonies, remplacé récemment par un musée de l'Histoire de l'immigration. Le bureau de Lyautey, quintessence de l'art déco, a néanmoins été conservé, mais sans son portrait par László qui a été transféré au musée du Quai Branly. Il subsiste une attraction voulue par lui sur place : l'aquarium tropical abrité par le Palais.

En est inauguré le monument Barrès (une lanterne des morts) sur la colline de Sion voisine de Thorey. Après la mort de Maurice Barrès en 1923, la construction de ce monument sur la « colline inspirée » avait été décidée et c'est Lyautey qui a présidé le comité chargé de son érection. En 1929, de concert avec Foch et Fayolle, il encourage le colonel de La Rocque à prendre la tête des Croix-de-Feu. Il a maintenu des liens d'amitié avec La Rocque, dont il partage les idées et qui le vénère[55](203). Il lui fait connaître, au début des années 1930, Robert Garric, qui s'inscrit dans la lignée d'Albert de Mun et Eugène-Melchior de Vogüé, le catholicisme social, et a fondé en 1920 les Équipes sociales, qui œuvrent en milieu ouvrier ; Lyautey a adhéré dès 1922 à ce mouvement. Il lui présente aussi Georges Lamirand, un centralien, promoteur en Lorraine des Équipes sociales et auteur en 1932 du livre Le Rôle social de l'ingénieur, préfacé par le maréchal. Dans son importante étude sur les Croix-de-Feu, Albert Kechichian parle à propos de La Rocque de « ses nombreuses et chaleureuses séances de travail au domicile » [parisien] « du maréchal Lyautey, avec Robert Garric et Georges Lamirand, entre 1931 et 1933 »[91]. Lyautey est très intéressé à discuter du programme des Croix-de-Feu mais prudent à l'égard du mouvement auquel il n'adhère pas. Le patronage de Lyautey est acquis mais il n'a rien d'exclusif : « Le maréchal ne ménageait pas les encouragements, mais de loin et sans interférer, ni donner à penser qu'il avait délégué une mission »[92]. Par contre, il est clair que La Rocque cherche à le récupérer, comme en témoigne la cérémonie de pose en d'une plaque à Saint-Germain en souvenir de l'article sur le rôle social de l'officier, où les troupes Croix-de-Feu paradent et qu'ils qualifient de « magnifique réunion de propagande »[93].

Jusqu'au début des années 1930, Lyautey est membre du conseil d'administration de l'École libre des sciences politiques[94].

Le Sultan Mohammed chez Lyautey à Thorey

Le maréchal meurt à Thorey le , âgé de 79 ans, quinze jours après avoir reçu la visite du Sultan, accompagné de son jeune fils Hassan. Lyautey a demandé que ses obsèques aient lieu à Nancy et son inhumation au Maroc. Le gouvernement lui accorde des obsèques nationales mais, contrairement à la tradition, il accepte qu'elles n'aient pas lieu à Paris mais à Nancy. Après une messe à Thorey, le cortège funèbre gagne Nancy le et la foule défile pendant trois jours devant son cercueil dans l'église des Cordeliers. Le , une messe solennelle est célébrée en la cathédrale de la ville en présence du président Albert Lebrun, puis les honneurs militaires lui sont rendus place Stanislas. Le corps est ensuite déposé dans la crypte de la cathédrale. À l'annonce de sa mort, le Sultan du Maroc, qui était à Marseille et allait s'embarquer, vient s'incliner devant la dépouille du grand homme : « Il pleurait » nous dit André Maurois[15] :189.

Tombeau de Lyautey aux Invalides

Un an après, sa dépouille est inhumée à Rabat dans un mausolée, un mur entier de la salle mortuaire étant occupé par l'épitaphe composée par lui-même avec une traduction en langue arabe et qui résume sa vision : « Ici repose Louis Hubert Lyautey, qui fut le premier Résident Général du Maroc, de 1912 à 1925. Décédé dans la religion catholique, dont il reçut, en pleine foi, les derniers sacrements. Profondément respectueux des traditions ancestrales et de la religion gardée et pratiquée par les habitants du Maghreb auprès desquels il a voulu reposer, en cette terre qu'il a tant aimée. Dieu ait son âme dans la paix éternelle »[24]:377-378. En 1961, le Maroc s'inquiète du sort du mausolée de Lyautey, une koubba, située dans le parc de la Résidence, à l'époque encore ambassade de France, dont une partie des locaux a commencé à être rétrocédée. Le roi Mohammed V ne veut pas prendre le risque que le tombeau soit profané et demande le rapatriement de la dépouille du maréchal. Son homme de confiance, Si Mammeri, vient à Paris exposer son point de vue et suggère que Lyautey repose aux Invalides. Le général de Gaulle accepte[24]:383-384. Les inscriptions suivantes, tirées de déclarations du maréchal, sont gravées sur les côtés de son tombeau[n 15] :

  • D'un côté en Français, « Être de ceux auxquels les hommes croient ; dans les yeux desquels des milliers d'yeux cherchent l'ordre ; à la voix desquels des routes s'ouvrent, des pays se peuplent, des villes surgissent »[n 16].
  • Et de l'autre côté, en Arabe : « Plus je vis au Maroc, plus je suis persuadé de la grandeur de ce Pays »[95].

Parcours religieux[modifier | modifier le code]

Gagné dans les années 1880 par un scepticisme religieux qui l'angoisse, le capitaine Lyautey entame un long cheminement spirituel. Le questionnement intense auquel il se soumet[96] ne l'éloigne cependant pas définitivement de l'idée de Dieu et de son admiration pour l'Église, dont il reste culturellement proche et dont il partage la plupart des positions morales, sociales et politiques. Il reste particulièrement lié à son condisciple le docteur Paul Michaux, figure emblématique de l'intelligentsia catholique parisienne et fondateur en 1898 de la Fédération gymnastique et sportive des patronages de France.

L'approfondissement se construit pour Lyautey en trois étapes : recherche et questionnement de jeunesse face à son scepticisme naissant (« Je voudrais aimer Dieu, mais je n'arrive pas à le faire par gratitude » - ), fascination dans sa vie d'homme pour le Dieu des idées (« Mais l'admiration n'est pas l'amour ») et redécouverte apaisée du Dieu-Amour dans sa vieillesse[97]. À côté de Thorey se trouve la « colline inspirée », Sion, lieu de pèlerinage depuis des siècles. Un monastère confié aux missionnaires oblats y existe depuis le milieu du XIXe siècle ; le maréchal le fréquente assidûment et reçoit les frères chez lui. Lyautey achève pleinement sa réconciliation avec l'Église le jeudi saint 1930 (), lorsque, après s'être confessé, il reçoit la communion du curé de Thorey, source d'une immense joie dont il s'ouvre quelques jours plus tard à son ami Wladimir d'Ormesson[55](222) et qui ne le quitte plus jusqu'à sa mort.

Il redécouvre aussi la foi par le scoutisme et fait la connaissance d'un chef scout en route vers le sacerdoce, le futur père Patrick Heidsieck[98]. Une correspondance naît entre le jeune prêtre qui devait partir pour la Pologne et le vieil officier qui, dès 1930, de par ces échanges, reprend le chemin de l'Église, de la confession et de la prière à genoux tous les soirs. Lyautey brisait ainsi une longue période de traversée du désert religieuse et renouait avec une jeunesse où sa foi était ardente.

Vie privée[modifier | modifier le code]

Selon les historiens[modifier | modifier le code]

En 1907, ayant dépassé la cinquantaine, le général Lyautey fait la connaissance d'Inès de Bourgoing qu'il épouse deux ans plus tard, le , à Paris. Celle qu'on appellera « la maréchale Lyautey », issue d'une vieille famille du Nivernais, avait épousé en premières noces à 18 ans le capitaine d'artillerie Joseph Fortoul, mais celui-ci avait mis fin à ses jours en 1900 [99]. Faisant preuve d'un grand dévouement, elle œuvra de concert avec son mari, qui disait d'elle qu'elle était « son meilleur collaborateur ».

Si l'homosexualité de Lyautey semble avérée[n 17],[n 18], certains auteurs parlent plutôt d'une « sensualité homophile » et nombre de ses biographes esquivent cet aspect de sa personnalité afin, selon Arnaud Teyssier, de ne pas entacher sa réputation[100]. Ce n'est qu'à partir des années 1970 qu'il est fait mention d'une inclination qui se retrouve dans les écrits de l'officier, dans différents ouvrages français sur l'homosexualité[101].

L'historien militaire Douglas Porch souligne le paradoxe des fréquentations de ce conservateur, proche de cercles artistiques dont les vues politiques étaient assez éloignées des siennes[102].

En littérature[modifier | modifier le code]

On prête à Clemenceau un bon mot sur l'orientation sexuelle de Lyautey, dont un certain nombre d'auteurs se sont emparés avec délectation. Christian Gury en parle dans son livre Lyautey-Charlus[103], consacré aux rapports entre Lyautey et l'homosexualité. Gury essaie notamment de montrer de quelle façon Lyautey aurait pu servir de modèle au baron de Charlus, le célèbre personnage d’À la recherche du temps perdu de Marcel Proust, bien que le modèle le plus généralement reconnu de Charlus soit Robert de Montesquiou et que la vie parisienne de Lyautey ait été fort limitée. Guy Dupré évoque également l'homosexualité de Lyautey dans son livre Les Manœuvres d'automne[104] et Angelo Rinaldi en fait état à plusieurs reprises dans Service de presse[105].

Jean Cocteau, qui le connaissait bien, dit que Lyautey lui avait demandé un exemplaire de son Livre blanc, un livre semi-clandestin paru en 1928 sans nom d'auteur, plus tard illustré de dessins homoérotiques dans le style aisément reconnaissable de Cocteau[106].

Le maréchal Lyautey est au centre de deux intrigues publiées sous forme de polars ésotériques (tenant en compte la rareté de ce genre littéraire au Maroc) :

Lyautey et les affaires étrangères[modifier | modifier le code]

Turquie[modifier | modifier le code]

Mustafa Kemal

Parallèlement à ses activités officielles, Lyautey s'est intéressé de près à trois dossiers : la Turquie, l'Europe et les pays méditerranéens. Il suit le dossier turc depuis l'entrée en guerre des puissances alliées contre ce pays car le sultan Mehmed V n'est pas seulement un chef politique, il est aussi le Calife de l'Islam[n 19]. Les Allemands ont profité de cette situation pour le pousser à déclarer la guerre sainte. Lyautey s'inquiète encore plus quand il voit les conséquences du traité de Sèvres, imposé en 1920 à la Turquie. L'Empire ottoman est littéralement dépecé et de nombreux pays sont créés artificiellement en application des accords Sykes-Picot de 1916, la Turquie elle-même est amputée de larges parties de son territoire et mise sous étroite tutelle. On connaît la suite : les Turcs se révoltent sous la conduite de Mustafa Kemal, qui refuse le traité et va destituer le sultan ; il a installé sa capitale pour l'instant provisoire à Angora (future Ankara). Lyautey juge alors de son devoir d'intervenir pour sauver l'amitié franco-turque et à travers elle l'amitié franco-arabe. Il écrit le au président du Conseil, Georges Leygues, une lettre dans laquelle il critique le fait que les lieux saints soient passés sous le contrôle d'un État vassal des Occidentaux, fait part de l'inquiétude que ce conflit a suscitée chez les Marocains et réclame qu'une paix véritable soit recherchée avec la Turquie, qui serait accueillie au Maroc avec un véritable soulagement[24]:290. Par l'intermédiaire d'une amie, Berthe Georges-Gaulis[n 20], il entre en contact avec Mustafa Kemal et tient le gouvernement au courant de ces échanges. Il obtient d'Aristide Briand l'envoi d'une mission parlementaire à Ankara, conduite par Henri Franklin Bouillon, qui propose que la France se retire de la coalition des ennemis de la Turquie, considère le traité de Sèvres comme nul et non avenu, et accorde au peuple turc une paix équitable et l'indépendance[24]:291. La ratification de cet accord a lieu en octobre 1921 après un ultime effort de Lyautey pour convaincre le gouvernement. Le de la même année, Mustafa Kemal écrit à Lyautey pour lui exprimer sa profonde reconnaissance. Il ajoute : « Parmi ceux qui, dans une claire vision des intérêts supérieurs de la France et de la situation qu'elle occupe dans la Méditerranée, se sont déclarés pour le maintien de la politique traditionnelle de la France au Proche-Orient, Votre Excellence figure au premier rang et nul ne doute que votre haute intervention ait fait pencher la balance dans ce sens »[24]:292.

Europe[modifier | modifier le code]

Émile Mayrisch, par Théo van Rysselberghe

Guillaume de Tarde a dit de Lyautey jeune : « Spectacle étonnant que celui de ce capitaine de cavalerie qui a horreur de la guerre et qui considère que le Pouvoir a pour objectif essentiel de l'éviter »[107]. Il conservera toute sa vie cet objectif : lutter pour la paix en Europe. En 1897, il estime fratricide la guerre de 1870, «qui avait brisé dans l'œuf l'Europe unie, logique, historique que préparait le long travail des siècles»[16]. Ceci explique aussi sa réaction horrifiée à l'annonce de la guerre de 14 qu'il qualifie de guerre fratricide, ou de guerre civile européenne. Certes, en , il refuse d'intervenir en faveur d'une paix séparée avec l'Autriche comme le lui demande le roi Alphonse XIII, alors même que celui qui est à la manœuvre est son ami le prince Sixte de Bourbon-Parme, frère de l'impératrice Zita, mais il sait qu'il va se heurter à l'opposition irréductible de Clemenceau. Après la guerre, il déplorera cette occasion manquée de faire avancer la paix et d'épargner des vies humaines. Une lettre du à sa sœur nous en dit plus sur son état d'esprit après l'armistice : « On se grise follement de Metz et Strasbourg en perdant de vue tout ce qui importe le plus pour la reconstruction de demain. Je n'ai aucune confiance dans notre Premier [Clemenceau] pour le trop connaître… Sa haine jacobine des trônes l'emporte et lui a fait faire la pire faute, l'insulte gratuite à l'empereur d'Autriche il y a dix mois [le rejet de ses offres de paix] et ensuite la dislocation de cette même Autriche, sur qui il fallait construire notre point d'appui européen. Nous allons nous retrouver dans le vide entre l'Allemagne reconstituée en démocratie industrielle et impérialiste, l'Italie si fortifiée et que nous retrouverons avant peu recollée à l'Allemagne sans le contrepoids de l'Autriche, l'Espagne hostile par notre faute[24]:237 ». Il fait des propositions en vue du traité de Versailles, dont la création d'un état indépendant en Sarre[108], mais elles sont refusées, de même que sa demande que le Maroc participe à la signature du traité.

L'esprit revanchard qui règne de part et d'autre du Rhin dans les années 1920 le préoccupe vivement et, une fois retraité à Thorey, il va mettre sur pied en 1926 avec son ancien équipier Pierre Viénot un Comité franco-allemand d'information pour lutter contre les campagnes de presse hostiles dans les deux pays et tenter un rapprochement entre eux. Ce projet est soutenu en France par Wladimir d'Ormesson, l'ambassadeur Charles Laurent, André Siegfried, Henri de Peyerimhoff, Henri Chardon, Lucien Romier, Jean Schlumberger, Edme Sommier, Félix de Vogüé, etc. Il est prévu que le comité siège au Luxembourg, hébergé par les membres du groupe de Colpach animé par le grand Européen Émile Mayrisch, dont Viénot va épouser la fille[55](206-207). Dans le même temps, il applique un principe qui lui est cher : montrer sa force pour ne pas avoir à s'en servir, et accepte la présidence du Comité français de propagande aéronautique fondé par André Michelin. Au sein de ce comité, il va militer pour que la France ne se laisse pas distancer par l'Allemagne, tant en ce qui concerne l'aviation militaire que civile. À son instigation, une émanation de ce comité est créée en 1929 qui s'occupera de défense passive contre les bombardements aériens : la Commission de défense aérienne, transformée en 1931 en Ligue de défense aérienne, présidée par La Rocque[109].

En 1933, le danger nazi devient prégnant ; Charles Maurras et ses troupes sont vent debout contre le nazisme. Sur suggestion du général Lachèvre, un éditeur maurassien, Fernand Sorlot, décide de traduire Mein Kampf sans l'autorisation de Hitler et sans faire de coupes. Il est curieusement rejoint par un mouvement de l'autre bord, la LICA, ancêtre de la LICRA, qui offre de partager le tirage. À tous, il paraît essentiel que les Français soient mis au courant du programme liberticide et raciste d'Hitler, et de sa haine de la France, alors que nombreux sont ceux, en France, qui sont aveuglés par le pacifisme. Lyautey approuve l'opération et la traduction paraît en aux Nouvelles Éditions latines avec sur la couverture un bandeau : « Tout Français doit lire ce livre », signé Lyautey[110]. La réaction des avocats d'Hitler est immédiate : ils obtiennent la saisie du livre avant la parution d'une édition expurgée en 1938.

Maghreb[modifier | modifier le code]

Si Kaddour ben Ghabrit.

Parmi les idées les plus surprenantes de Lyautey, il faut mentionner celle d'un califat occidental. L'idée n'est pas nouvelle : mille ans auparavant, un califat a existé à Cordoue, porté par une branche des Omeyyades. Comme les saadiens descendent du Prophète par la branche dite chérifienne, l'un d'entre eux, Ahmed al-Mansour a tenté de se présenter comme calife[111]. L'idée est reprise par la France et l'Angleterre à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Les Anglais souhaitent faire du chérif de La Mecque, Hussein ben Ali, appartenant à la dynastie hachémite[112], un calife, pour faire pièce au sultan ottoman. Les Français s'inquiètent de cette situation et craignent que ce calife n'étende son pouvoir à l'Afrique du Nord. Dans ce contexte naît l'idée d'un califat occidental, qui pourrait étendre son influence aux nouveaux territoires sous mandat français du Proche-Orient. Selon Jalila Sbai[113], c'est en 1915 que Lyautey songe à l'instauration de ce califat. Mais il se heurte à l'opposition des responsables algériens, qui y voient une tentative hégémonique de la France. En réaction, Lyautey prépare avec les Anglais une intervention militaire sur le Hedjaz. À la manœuvre, un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères spécialiste des questions religieuses : Si Kaddour Benghabrit, futur promoteur de la Grande Mosquée de Paris. Cette expédition, lancée en 1916, a trois objectifs :

  • militaire : stopper et même repousser les Ottomans, qui avaient le contrôle de la région ;
  • religieux : faciliter les pèlerinages aux lieux saints, où les épidémies prolifèrent en l'absence de toute hygiène et de toute structure médicale, et où l'infrastructure hôtelière est très insuffisante ;
  • politique : aider matériellement le chérif des lieux saints, Hussein ben Ali, avec l'arrière-pensée que contrôler à deux le futur calife limiterait les risques.

Le chef de la mission militaire sera le colonel Édouard Brémond, ancien du Maroc où il a opéré de 1907 à 1914. Il sera accompagné d'une cinquantaine d'officiers et sous-officiers, dont plusieurs sont musulmans. En outre, un millier d'hommes sera tenu en réserve du côté de Suez. Quant à Si Kaddour ben Ghabrit, Guillaume Jobin nous dit que sur les instructions confidentielles de Lyautey, il va jouer un rôle à la fois d'ambassadeur informel de France à La Mecque, et surtout de véritable commissaire politique et religieux du détachement français[114]. Le déroulement et le bilan de la mission ont été décrits par Pascal Le Pautremat dans un excellent article[115]. Le principal succès concerne l'accueil des pèlerins : grâce à Si Kaddour, il a été possible de contourner l'obstacle de l'interdiction faite à des chrétiens d'acheter des immeubles. Il a en effet créé une société ad hoc, la Société musulmane des Habous des lieux saints, contrôlée par des musulmans d'A.F.N., qui va racheter les immeubles à transformer en hôtellerie, à Médine et à La Mecque. Les premiers pèlerinages depuis le début de la guerre commencent en  ; le paquebot Orénoque a été affrété pour les transporter. Si Kaddour aura néanmoins fort à faire, car un agitateur a distribué aux pèlerins une brochure où il est expliqué que les Français ont l'intention de s'emparer de la Kaaba pour la transporter au Musée du Louvre[116] ! Mais la mission est un large échec sur les plans politique et militaire, d'abord à cause du caractère velléitaire du chérif Hussein, qui pourtant avait demandé l'aide des Français, mais revient sur sa décision d'autoriser une force militaire à opérer sur place, ensuite parce qu'un obstacle imprévu va surgir en la personne du fameux Lawrence d'Arabie, qui considère que la France opère sur sa chasse gardée et s'ingénie à lui mettre des bâtons dans les roues. Le gouvernement en tirera les conséquences en transférant son effort militaire du Hedjaz à la Palestine en 1917. Lyautey en gardera une certaine amertume à l'égard de nos alliés, comme en témoigne sa lettre au président du Conseil du citée plus haut.

Après la guerre, il souhaite profiter de l'effacement de l'Allemagne et du mandat français au Liban pour lancer en 1922 une fédération franco-musulmane des pays de la Méditerranée[24]:294-297. Cette proposition n'aura pas de suite immédiate mais sera reprise beaucoup plus tard par les promoteurs de l'Union pour la Méditerranée. Lyautey obtient juste de Millerand l'institution d'une conférence annuelle des gouverneurs et résidents généraux d'Afrique française du Nord destinée à coordonner leurs actions[24]:298.

Opinions[modifier | modifier le code]

D'origine aristocratique par sa mère et descendant de Saint Louis, Lyautey affiche des opinions monarchistes. Défenseur de la cause légitimiste, il est en désaccord avec son père, fervent orléaniste. L'aïeule de Lyautey pour ses 80 ans aurait déclaré devant sa nombreuse descendance rassemblée pour l'occasion : « Vous êtes ici plusieurs centaines, et je bénis le ciel que, s'il y a des légitimistes, des orléanistes, des bonapartistes, il ne se trouve pas un seul républicain »[117]. Il a longtemps manifesté une adoration presque fétichiste pour le « comte de Chambord », puis fréquenté au Maroc les membres de la famille d'Orléans qui y résidaient. Il cultive ses liens d'amitié et d'estime avec le roi Alphonse XIII d'Espagne. Mais il a aussi une inclination, comme chez certains Lorrains, pour les descendants de leurs anciens ducs, membres de la Maison de Habsbourg-Lorraine[117].

Il s'est rallié néanmoins à la République à la fin des années 1890 après un entretien privé avec le pape Léon XIII, acceptant de la servir sans pour autant renier ses convictions. Ainsi, en 1897, il affirme que la France est forte malgré la République, à cause de la qualité de son peuple : « Il faut que la pâte individuelle française soit d'une rude qualité pour avoir résisté à un régime pareil »[118].

« Moi, je suis un homme du Nord, un Lorrain, un Normand, un Rhénan ; il y a de tous ces sangs-là dans mon sang ; mais rien qui vienne d'au-dessous de la Loire… Je n'ai jamais pu regarder un Toulousain comme un compatriote. »
« […] Dieu sait si j'aime la Lorraine – c'est mon pays… Mais quand je sortais de Lorraine pour aller en Alsace, je trouvais un ordre, une propreté, une discipline qui contrastaient avec le fumier des rues de nos villages, le laisser-aller. L'Alsace m'offrait le spectacle de tout ce que j'aime dans la vieille France et de tout ce que j'admire dans l'Allemagne – ce qu'il y a de meilleur dans l'une et dans l'autre… Je n'aime pas la Prusse. Mais l'Allemagne, c'est un grand peuple et qui a fait de grandes choses. Et j'espérais que tout cela serait maintenu dans l'Alsace, étendu à toute la France pour son profit… »
L'Alsace, la Lorraine – les « pays », quoi… c'est du réel, de l'humain… Après la guerre, j'avais cru, j'avais espéré qu'en respectant là-bas ce qu'il fallait respecter, on pourrait faire quelque chose d'intéressant, de neuf, dont le reste du pays aurait pu ensuite s'inspirer et aurait recueilli le bénéfice. Un régionalisme vivant, souple, aéré… Mais non ! Il fallait tout centraliser, tout unifier, tout ramener au gabarit, et cette illusion-là est allée rejoindre les autres illusions de la victoire »
[119]

En 1895, au cœur de l'affaire Dreyfus, Lyautey exprime dans ses lettres ses doutes sur la culpabilité de l'accusé : « Ce qui ajoute à notre scepticisme, c'est qu'il nous semble discerner là une pression de la soi-disant opinion ou plutôt de la rue, de la tourbe […] Elle hurle à la mort contre ce Juif, parce qu'il est Juif et qu'aujourd'hui, l'antisémitisme tient la corde »[120]. Clemenceau s'en est souvenu plus tard, qui l'a soutenu au cours de sa carrière ministérielle et à la présidence de la Commission des armées. Selon le général Mordacq qui fut le chef de cabinet de Clemenceau et connaissait le maréchal depuis le Tonkin en 1895, « le Tigre » aurait regretté la mise à l'écart de Lyautey puis son départ du Maroc lors de la guerre du Rif, où le gouvernement dit du « cartel des gauches » lui adjoignit sur le plan militaire Philippe Pétain, ce qui le poussa à donner sa démission[121].

Son jugement sur l'État-major, depuis les colonies : « Coteries d'admiration mutuelle, adorateurs des clichés et des formules, à l'écart des grands courants sincères que la troupe seule révèle, forts en thème, portant au Ministère, près du haut commandement, les petites vilenies de collège, flatteries au pion, recherche du satisfecit, rétractation de la personnalité et de l'indépendance d'esprit. C'est pourquoi, il y a quatre ans, sitôt le pied sur le bateau, il m'a paru que je m'échappais d'une geôle »[15]:46.

À Albert Laprade, Lyautey déclare : « Quelle chance vous avez d'être architecte ! Au moins de vous il restera des pierres, des arbres énormes. Tandis que de moi, il ne restera rien. Les hommes sont des ingrats »[122]. Lyautey déclara au député Birot qui avait considéré le Maroc comme une « colonie française » : Alors que nous sommes en Algérie depuis plus de quatre-vingt ans, en Tunisie depuis trente-cinq ans, nous n’avons pris pied au Maroc qu’il y a huit ans, et notre protectorat y date de moins de quatre ans.

Devise[modifier | modifier le code]

Sa devise, attribuée au poète anglais Percy Bysshe Shelley[123], mais en fait tirée de William Shakespeare[n 21], est restée célèbre : « La joie de l'âme est dans l'action. »

Distinctions, décorations et honneurs[modifier | modifier le code]

Académies[modifier | modifier le code]

Réception de Lyautey à l'Académie française. Louis Duchesne, à droite, préside la séance

Il est élu (avec 27 voix) à l'Académie française le au fauteuil 14. Il ne sera reçu qu'après la guerre, le , accueilli par l'historien moderniste Louis Duchesne qui prononcera son discours de réception.

Il est associé-correspondant de l'académie de Stanislas depuis 1900.

À la fondation de l'académie des sciences d'outre-mer en 1923, il y est élu membre titulaire[124].

Décorations[modifier | modifier le code]

Le , il est fait grand-croix de la Légion d'honneur, et le , il reçoit la médaille militaire. Parmi ses autres décorations : officier du Mérite agricole, grand cordon de l'Ordre de Léopold de Belgique, officier de l'Ordre du Soleil levant (Japon), chevalier de l'Ordre du Christ (Portugal) et de l'Ordre de Saint-Stanislas de Russie, commandeur de l'Ordre royal du Cambodge, de l'Ordre du Dragon d'Annam et de l'Ordre de l'Étoile d'Anjouan. Au Maroc, il a reçu la médaille coloniale avec barrettes, la médaille commémorative du Maroc, l'Ordre du Mérite militaire chérifien et le grand cordon du Ouissam Alaouite.

Lyautey, académicien, en 1920. Il porte la plaque de grand-croix de la Légion d'honneur, la médaille militaire et le Ouissam Alaouite.

Il est élevé à la dignité de maréchal de France le . Le même jour, il reçoit[n 22] du prétendant orléaniste au trône de France, Philippe d'Orléans, la plaque de l'ordre du Saint-Esprit[n 23]. L'année suivante, il entre au Conseil supérieur de la guerre. Il est aussi élevé à la dignité de grand-croix de l'ordre de Saint-Grégoire-le-Grand (Vatican) en 1930.

Décorations françaises[modifier | modifier le code]

Décorations étrangères[modifier | modifier le code]

Armoiries en tant que chevalier de l'Ordre de Charles III d'Espagne.

Honneurs[modifier | modifier le code]

Membre du comité de patronage des Éclaireuses Éclaireurs de France aussitôt après leur fondation (1911), ainsi que de celui des Éclaireuses et Éclaireurs unionistes de France, il se voit offrir la présidence d'honneur des scouts de France en 1929. Le château de Thorey-Lyautey abrite aujourd'hui un musée du scoutisme.

En 1926, il devient président du Comité français de propagande aéronautique créé à l'initiative d'André Michelin. Il est nommé en 1927 commissaire général de l'exposition coloniale internationale tenue en 1931 et, à ce titre, fait construire le Palais de la Porte Dorée. Son portrait par Laszlo était accroché dans ce bâtiment.

Il devient membre du Jockey Club, le , parrainé par le duc de Doudeauville et par le général de Mac Mahon, duc de Magenta.

Héritage[modifier | modifier le code]

Dans une déclaration faite le au conseil de politique indigène, Lyautey a fixé le cap : «Il est à prévoir… que dans un temps plus ou moins lointain, l'Afrique du Nord évoluée, civilisée, vivant de sa vie autonome se détachera de la Métropole. Il faut qu'à ce moment-là - et ce doit être le but suprême de notre politique - cette séparation se fasse sans douleur et que les regards des indigènes continuent toujours à se tourner avec affection vers la France… Je n'ai pas cessé d'espérer créer entre ce peuple et nous un état d'âme, une amitié, une satisfaction intime qui font qu'il restera avec nous le plus longtemps possible, mais qui auront pour résultat final que si les événements le détachent politiquement de nous, toutes ses sympathies resteront françaises. C'est la pensée avec laquelle je vis, qui me porte »[125].

Théodore Steeg, qui succède à Lyautey en 1925, est un homme politique classé à gauche et ancien ministre. Daniel Rivet dit de lui qu'il rétablit avec fermeté la primauté des civils sur les soldats, amplifie la colonisation officielle financée par l'État et ouvre grand les vannes du fonctionnariat[126]. En fait, depuis le départ de Lyautey jusqu'à l'indépendance, les terres de colonisation vont presque doubler. Après lui, Lucien Saint est responsable du dahir berbère de 1930 si décrié, qui applique le diviser pour régner et entraîne des réactions nationalistes. En 1936, faible lueur d'espoir avec la désignation comme ministre de tutelle de Pierre Viénot, ancien de Lyautey. On note juste qu'il nomme deux de ses collègues au Maroc : Charles Noguès comme Résident général et Aimery Blacque-Belair comme directeur du Tourisme, avec pour mission secrète de maintenir des contacts avec les nationalistes[127].

Hommages[modifier | modifier le code]

En 1931 à Paris, le sultan Mohammed ben Youssef a déclaré : « En venant admirer l'Exposition Coloniale, cette belle réussite de votre génie, il nous est particulièrement agréable de profiter de cette occasion pour apporter notre salut au grand Français qui a su conserver au Maroc ses traditions ancestrales, ses mœurs et ses coutumes, tout en y introduisant cet esprit d'organisation moderne sans lequel aucun pays ne saurait vivre désormais. Pouvons-nous oublier, en effet, qu'à votre arrivée au Maroc, l'empire chérifien menaçait ruine. Ses institutions, ses arts, son administration branlante, tout appelait un organisateur, un rénovateur de votre trempe pour le remettre dans la voie propre à le diriger vers ses destinées[55](212-3) ».

Le , à l'occasion du transfert des cendres du maréchal, le général de Gaulle a déclaré aux Invalides : « Dans un monde où tout change, la flamme qui l'animait est vivante, l'exemple qu'il donna reste bon, la leçon qu'il a léguée demeure féconde. Vingt sept années après sa mort… voici qu'il nous apparaît comme un homme d'à présent, car ce que fit ce grand romantique de la pensée et de l'action porte l'empreinte d'une œuvre classique, c'est-à-dire valable en tous cas et en tous temps parce que ce fut une œuvre immense ».

La compagnie Paquet, qui dessert le port de Casablanca depuis Marseille, a lancé en 1924 un paquebot Maréchal Lyautey, construit aux chantiers navals de la Seyne-sur-Mer, remplacé en 1952 par un paquebot Lyautey, construit aux mêmes chantiers.

Le , par arrêté viziriel[128], la ville marocaine de Kénitra, qui avait été l'objet de tous les soins du maréchal (urbanisme et port fluvial), devient Port-Lyautey, jusqu'à la fin du protectorat. Elle fut ensuite rebaptisée « Kénitra » (située à environ 30 km au nord de la capitale, Rabat). En 1936, Marcel L'Herbier tourne le film Les Hommes nouveaux, d'après le roman de Claude Farrère qui se passe au Maroc, avec Gabriel Signoret jouant le rôle de Lyautey.

Au Maroc, le lycée Lyautey de Casablanca est l'un des plus grands lycées français de l'étranger. Le portrait du maréchal Lyautey qui orne l'établissement a été réalisé dans les années 1990, sur une proposition de la direction, et a soulevé un débat parmi les élèves quant au regard à porter sur l'œuvre et les responsabilités du maréchal Lyautey.

Un hôpital militaire situé à Strasbourg, aujourd'hui fermé, a porté le nom de Lyautey. Dans le foyer étudiant du GEC à Nancy, un bâtiment porte le nom du général Lyautey ainsi que sa signature gravée sur le béton. Des écoles élémentaires portent son nom à Allonnes, Caen, Riedisheim et Vichy. Un collège porte son nom à Contrexéville.

La corniche Lyautey du lycée militaire d'Aix-en-Provence est également placée sous son patronage depuis 1956. La 17e promotion du collège interarmées de défense porte son nom[129]. Le 1er escadron du 4e régiment de chasseurs basé à Gap (Hautes-Alpes) a été commandé par le maréchal Lyautey et porte son nom. Plusieurs troupes de scouts portent aussi son nom[130].

En 1947, Fernand Chaussat écrit une pièce radiophonique en deux actes consacrée à Lyautey[131]. En 1980, Gilles Grangier réalise un téléfilm en plusieurs épisodes intitulé L'Aéropostale, courrier du ciel, où le rôle de Lyautey est bien expliqué. Le téléfilm est diffusé de à .

Devant l'ancienne gendarmerie de Nancy s'élève une statue d'Hubert Lyautey sculptée par François Cogné[132].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Armoiries[modifier | modifier le code]

Figure Blasonnement

D'azur à une foi d'or sommée d'un soleil du second et soutenus de trois cinquefeuilles d'argent.[133]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Il y avait deux frères Glaoui : l'aîné, Madani, était pacha de Marrakech et grand vizir du sultan de 1908 à 1911. À sa mort en 1918, le cadet, Thami, lui a succédé ; il est mort en 1955
  2. Près de Khenifra, l'armée subit un grave revers en novembre 1914 avec une colonne anéantie par suite de l'imprudence de son chef, le colonel Laverdure. Voir Maurois
  3. Lyautey dit de Tranchant : « C'est lui qui a inventé l'architecture des maisons marocaines actuelles… Ce n'était pas facile de combiner le goût indigène… avec notre goût des fenêtres et balcons extérieurs. Tranchant leur a fabriqué des immeubles… que les indigènes daignent accepter, et qui enchantent les Européens. Je ne sais comment il s'y est pris, mais les résultats sont là » (Voir Claude Farrère, Lyautey créateur)
  4. Pas encore de sucrerie à l'époque. C'est Saint-Louis à Marseille qui fournit le Maroc. La première raffinerie de canne, la COSUMA, sera fondée en 1929.
  5. Cette phrase manque à toutes les biographies de Lyautey mais figure à la page 23 de l'ouvrage de Maurois, Dialogues sur le commandement, écrit en collaboration avec un ancien du cabinet de Lyautey, Aimery Blacque-Belair, et le philosophe Alain .
  6. Économiste aux préoccupations sociales affirmées, Max Lazard, de la famille de banquiers du même nom, a été cofondateur avant-guerre des Universités populaires et après-guerre du Bureau International du Travail.
  7. Les deux membres du cabinet de Lyautey qui ont servi au Maroc le plus longtemps sont Georges Hutin et Aimery Blacque-Belair.
  8. Lire en ligne la notice Joseph Roig.
  9. Peintre de talent, d'origine berbère algérienne et cousin de Si Mammeri, le précepteur du roi Mohammed V, Azouaou Mammeri est intégré en 1928 dans le corps des inspecteurs des arts indigènes
  10. Dans Lyautey créateur, Claude Farrère cite cette confidence du maréchal : « Pierre Loti… par la seule puissance de son génie, a su faire admettre à l'Europe entière que les Turcs sont des hommes comme nous. Il a retourné pour eux l'opinion mondiale »
  11. De plus larges extraits de ce texte fondamental se trouvent dans Wladimir d'Ormesson, op. cit., p. 170-176.
  12. El Hiba est mort en 1919, mais son frère a continué la lutte
  13. Dans son Lyautey, Arnaud Teyssier écrit qu'« il avait espéré jusqu'au bout qu'il pourrait ramener Abd El Krim dans le giron du protectorat, au prix de quelques concessions, un fief ».(p. 391)
  14. Cette messe est toujours dite en octobre. L'archiduc Otto de Habsbourg s'est marié dans cette église en 1951 et y a célébré ses noces d'or
  15. Dessiné par Albert Laprade à la demande de Malraux
  16. Phrase tirée des Lettres du Tonkin, mais tronquée par Pierre Lyautey, ce qui change quelque peu les choses. Dans la version d'origine, Lyautey écrit avant : « J'ai cru que peut-être j'allais… », et après : « Je me suis bercé de tout cela » Voir Arnaud Teyssier, Lyautey, p. 549-550.
  17. Marc Oraison écrit dans La Question homosexuelle, Paris, Le Seuil, (lire en ligne), p. 10 : « Sait-on habituellement qu'un homme de l'envergure de Lyautey était homosexuel ? Et cela n'avait rien de sordide, bien au contraire. »
  18. Son épouse, en sortant de la tente du maréchal, s'adresse en ces termes aux jeunes officiers : « Messieurs, j'ai le plaisir de vous informer que cette nuit je vous ai fait tous cocus ».
  19. Un de ses ancêtres a obtenu ce titre d'un membre de la branche du Caire de la dynastie abbasside, après l'avoir vaincu en 1517
  20. Berthe Georges-Gaulis est l'auteure de La France au Maroc, l'œuvre du général Lyautey, paru en 1919. En 1921, elle est en train d'écrire un autre livre sur le nationalisme turc
  21. Comme l'a signalé Charles-André Julien dès 1946, qui l'a reprécisé dans son ouvrage Le Maroc face aux impérialismes : 1415-1956, Les Éditions du Jaguar, Paris, 2011, la devise de Lyautey, Joy's soul lies in the doing n'est pas de Shelley, mais de William Shakespeare : Troilus and Cressida, Acte I, scène II (The Dramatic Works of William Shakespeare with a life by Thomas Campbell, London, George Routledge and Sons, 1866, p. 607).
  22. Lyautey et son épouse assisteront néanmoins dix ans plus tard aux obsèques du prétendant légitimiste au trône de France, Jacques de Bourbon : « Obsèques de Don Jaime de Bourbon, duc d'Anjou et de Madrid », Figaro, vol. 106, no 281,‎ , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).
  23. Laissé s'éteindre par Louis-Philippe à partir de 1830 mais, par la suite, porté et conféré par divers prétendants au trône de France.
  24. La médaille militaire se porte en avant la LH pour les officiers généraux ayant commandé au front ; attention : selon la Grande Chancellerie aucun texte officiel n'existe et il s'agit d'une simple habitude.
  25. Voir Général Yves de Boisboissel, Dans l'ombre de Lyautey, éd. L'Harmattan,  :

    « Dans sa chambre à coucher, dans son bureau, ses fanions de commandements successifs, ses bibelots préférés, ses gravures : la Grèce, l'Italie, ses photographies : le comte de Chambord, le pape Léon XIII, sa famille, "ses jeunes et ses morts", ses amis et ses amies. Une vitrine renfermait les pièces les plus précieuses : la plaque de l'ordre du Saint-Esprit offerte par le duc de Vendôme le jour où il fut élevé à la dignité de maréchal de France, la médaille militaire de Canrobert donnée par sa fille, et la médaille de Sainte-Hélène du grand-père d'un de ses paysans lorrains : la synthèse de toutes les gloires militaires de la France. Le grand-père, dit-on, destinait cette médaille à son fils mais celui-ci mourut à la guerre.L'ordre du Saint-Esprit a été remis par le duc de Vendôme à la demande du duc d'Orléans qui à l'époque était en exil.Lyautey était de famille très orléaniste et à cet égard il n'était pas en accord avec son père sur le légitimisme ; on a pu dire qu'il était légitimiste par romantisme, mais outre ses liens d'amitié, il appréciait les Orléans et l'orléanisme pour leur modération. »

Références[modifier | modifier le code]

  1. Lire en ligne
  2. lire en ligne la généalogie
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  5. a et b Paul Doury, « La Grande Maladie de Lyautey », Histoire des sciences médicales, t. XXVII, no 2,‎ , p. 155 (lire en ligne [PDF]).
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  7. Gilbert Mercier, Lyautey, le prince lorrain, Éditions de l'Est, , p. 17.
  8. Michel Guy, Bâtisseurs d'empire, J. de Gigord, , p. 78.
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  10. a et b Georges Blondel, « En souvenir du maréchal Lyautey », Revue d'économie sociale et rurale, 10e série, no 9,‎ , p. 257 (lire en ligne).
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  13. Jean Garrigues et Philippe Lacombrade, La France au XIXe siècle : 1814-1914, Paris, Armand Colin, , 191 p. (ISBN 978-2-20035-318-6, OCLC 662425153, lire en ligne), p. 194.
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  20. Pascal Venier, Lyautey et l'idée de protectorat de 1894 à 1902 : Genèse d'une doctrine coloniale, Outre-Mers. Revue d'histoire, Année 1991, 293, pp. 499-517
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  25. Armand Teyssier, Lyautey, Paris, ed Perrin, , 468 p. (ISBN 2-262-01822-7), p. 204-205
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  27. Jean Brignon et alii, Histoire du Maroc, p. 341
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  29. Lettre à Albert de Mun, citée par André Maurois, p. 112
  30. Lettre à Albert de Mun, citée par André Maurois, p. 112-113
  31. « Lyautey et l'Europe », sur Fondation Lyautey (consulté le )
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  35. Albert Laprade, blessé en février 1915, il est réclamé par Lyautey sur le conseil de Prost. Il arrive à Casablanca en août.
  36. Le plus connu, Grandes villes et systèmes de parcs, de 1908, a été réédité depuis
  37. a b et c lire en ligne sur Maroc pluriel
  38. lire en ligne sur Rabat-Maroc.net
  39. lire en ligne sur Rabat-Maroc.net
  40. Marc Méraud, Histoire des A.I., le service des Affaires indigènes du Maroc, La Koumia, 1990
  41. André Hardy, Sidi el Hakem, mémoires d'un contrôleur civil au Maroc, 1931-1956
  42. Roger Gruner, Le contrôle civil au Maroc, p. 27
  43. Roger Gruner, op. cit., p. 20-21
  44. Mylène Theliol, Le service des Beaux-Arts, Antiquités et Monuments historiques, clé de voûte de la politique patrimoniale française au Maroc sous la résidence de Lyautey, Outre-mers, 2011, vol. 98, no 370, p. 186.
  45. Mylène Theliol, op. cit., p. 187
  46. Mylène Theliol, op. cit., p. 191.
  47. Mylène Theliol, op. cit., p. 187-188
  48. Mylène Theliol, op. cit., p. 192
  49. Hubert Lyautey, Paroles d'action, p. 489-490
  50. Lire en ligne
  51. Négib Bouderbala, Les Terres collectives au Maroc dans la première période du Protectorat, Revue du monde musulman et de la Méditerranée, vol. 79 (1996), numéro 1, p. 147-150
  52. Général Patrick Garreau, En relisant Galliéni et Lyautey, colloque 2008 de la Saint-Cyrienne
  53. lire en ligne l'excellent article de Jean-Yves Puyo sur la politique forestière de Lyautey, qui déborde le cadre strictement forestier et donne de précieuses informations sur les structures du pays
  54. lire en ligne cette notice, qui dresse aussi un bilan de la foire de Fès sur Gallica
  55. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s et t Wladimir d'Ormesson, Auprès de Lyautey, p. 159-160
  56. Blacque-Belair écrit à ce propos en 1922 : « Le maréchal s'entoure trop facilement de gigolos, qui débarquent de Paris, passent à Rabat six mois par an et traitent tout un peu à la légère. Porteurs souvent que d'un beau nom ou d'un physique plaisant, ils sont peu disposés à être les porte-parole et les réalisateurs des idées admirables du Maître. Celui-ci a bien perdu en perdant des hommes comme les colonels Delmas et Berriau,». Le même pense aussi que Lyautey fait un peu trop confiance, car certains membres de l'équipe ont « l'improbité prospère », une accusation qu'il n'est pas le seul à formule
  57. Il venait d'épouser Simone Bossis (Simone Berriau).
  58. Voir de Bertrand Desmazières, Pierre de Sorbier de Pougnadoresse, le Colbert de Lyautey.lire en ligne
  59. lire en ligne la bio de ce futur ministre et futur héros de la Résistance.
  60. lire en ligne sa notice.
  61. lire en ligne l'article de Samir Saul sur l'électrification du Maroc.
  62. lire en ligne cet Historique de l'aéronautique au Maroc
  63. Lire en ligne
  64. Lire en ligne
  65. P.G. Latécoère, Correspondance, présentée par Laurent Albaret, p. 78
  66. P.G. Latécoère, Correspondance, présentée par Laurent Albaret, p. 27. Il rappelle que Roig est un ancien du cabinet de Lyautey
  67. Henry-Hervé Bichat et Maurice de Vaulx, « La Politique agricole de Lyautey », Lyautey, paroles d'action pour aujourd'hui, ASAF, 2014, p. 23-26.
  68. Daniel Rivet, Lyautey et l'institution du protectorat français au Maroc, tome III, p. 65 et 68
  69. Jamal Hossaini-Hilali, Des Vétérinaires au Maroc sous le Protectorat français
  70. Lire en ligne
  71. Les relevés en sont faits à l'aquarelle par Gabriel Rousseau
  72. Mylène Theliol, op. cit., p. 188-189
  73. lire en ligne l'article de Mylène Theliol, dans Rives méditerranéennes
  74. Réalisés au cours d'un séjour de six mois en 1832.
  75. Philippe Champy, op. cit., p. 82-83
  76. Lire en ligne
  77. Lire en ligne
  78. Albert Laprade, « Souvenirs sur Jean Giraudoux et le maréchal Lyautey », Bulletin de la Société d'émulation du Bourbonnais, tome 54, 1966, 1er trimestre
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  81. Arnaud Teyssier, Lyautey, p. 494
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  83. Daniel Rivet, Lyautey et l'institution du protectorat français au Maroc, tome III, p. 243-244
  84. Daniel Rivet, op. cit., p. 245-246
  85. a et b Vincent Courcelle-Labrousse et Nicolas Marmié, La Guerre du Rif, p. 229-230
  86. François-Paul Blanc et Albert Lourde, L’esclavage au Maroc au temps du protectorat, Esclavage et droit. Du Code noir à nos jours, Artois Presses Université, 2010, p. 91-124.
  87. lire en ligne sur L'histoire par l'image
  88. Lire en ligne sur Mosquée de Paris
  89. lire en ligne sur Radio France
  90. lire en ligne sur kronobase
  91. Albert Kechichian, Les Croix-de-Feu à l'âge des fascismes, p. 107
  92. Jacques Nobécourt, Le Colonel de La Rocque, p. 241-242
  93. Jacques Nobécourt, op. cit., p. 241
  94. Gérard Vincent et Anne-Marie Dethomas, Sciences po: Histoire d'une réussite, Plon (réédition numérique FeniXX), (ISBN 978-2-259-26077-0, lire en ligne)
  95. Lyautey, Paroles d'action, discours de 1922, p. 423
  96. Voir les écrits regroupés par Patrick Heidsiek dans son ouvrage Présence de Lyautey (1944).
  97. André Le Révérend, Lyautey écrivain : 1854-1934, Orphrys, 1976 (p. 41).
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  106. Claude Arnaud, Jean Cocteau, p. 414.
  107. Guillaume de Tarde, Lyautey, p. 61
  108. Jean-François Thull, Le Retour de Lyautey en Lorraine, Annales de l'Est, numéro spécial 2004, p. 136 (Actes du colloque Lyautey de Nancy)
  109. Jacques Nobécourt, Le Colonel de La Rocque, p. 132
  110. Et non une préface de Lyautey comme certains l'ont écrit
  111. Voir Nabil Mouline, Le Califat imaginaire d'Ahmad al-Mansûr.
  112. Ultérieurement à la tête de l'Irak et de la Jordanie.
  113. Lire en ligne.
  114. lire en ligne l'article de Guillaume Jobin, qui parle aussi du projet de califat occidental.
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  116. lire en ligne l'article de Sylvia Chiffoleau.
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  121. Général Mordacq, Clemenceau au soir de sa vie, II, p. 74-77
  122. Albert Laprade, Souvenirs sur Jean Giraudoux et le maréchal Lyautey, bulletin de la Société d'émulation du Bourbonnais, 1966, p. 32
  123. « The soul's joy lies in doing »
  124. Lire en ligne.
  125. Cité par beaucoup. Chez Wladimir d'Ormesson, p. 184-185
  126. Daniel Rivet, Histoire du Maroc, p. 311
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  128. op. cit. Laplanche 1986, p. 77.
  129. La 17e promotion (2009-2010) du Collège interarmées de défense, promotion maréchal Lyautey.
  130. Hubert Lyautey sur Scoutopedia
  131. BNF, Arts du spectacle, document dactylographié
  132. « Monument à Hubert Lyautey – Rue des Cordeliers – Nancy », sur e-monumen.net.
  133. www.heraldique-europeenne.org.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Archives[modifier | modifier le code]

Les papiers personnels d'Hubert Lyautey sont conservés aux Archives nationales sous la cote 475 AP : [Salle des inventaires virtuelle, site des Archives nationales]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • André Maurois, Lyautey, Plon, 1931.
  • Sonia E. Howe, Lyautey, Du Tonkin au Maroc par Madagascar et le Sud-Oranais, Malfère, 1938.
  • Marie André, Un ami des scouts : Lyautey, Éditions Alsatia, 1940.
  • Guillaume de Tarde, L'Enseignement de Lyautey, Firmin-Didot, 1942.
  • Raymond Postal, Présence de Lyautey, Éditions Alsatia, 1946.
  • Raymond Dumay, Lettres d'aventures, Éditions Julliard, 1948.
  • Jean Mauclère, Lyautey, prince lorrain, Paris, Spes, 1951.
  • Général Catroux, Lyautey Le Marocain, 1952.
  • Général de Boisboissel, Dans l'ombre de Lyautey, Bonne, 1953.
  • Général Durosoy, Lyautey : Mon général, 1956, préface du maréchal Juin.
  • Guillaume de Tarde, Lyautey, le chef en action, Gallimard, 1959.
  • Fuat Pekin, Atatürk et le Maréchal Lyautey, Nancy, Publications de la Fondation Lyautey, 1961.
  • Wladimir d'Ormesson, Auprès de Lyautey, Flammarion, 1963.
  • Jean Brignon, Abdelaziz Amine, Brahim Boutaleb, Guy Martinet, Bernard Rosenberger, Histoire du Maroc, Hatier 1968
  • (en) Alin Scham, Lyautey in Marocco, University of California Press, 1971.
  • André Le Révérend, Lyautey écrivain, préface de Jean Guitton, Ophrys, 1976.
  • Général Durosoy, Avec Lyautey. Homme de guerre, homme de paix, Éditions Nel, 1976.
  • André Le Révérend, Un Lyautey inconnu, 1980.
  • Général Durosoy, Lyautey, maréchal de France : 1854-1934, Lavauzelle, 1984.
  • André Le Révérend, « Le maréchal Lyautey et la mise à l'index de l'Action française », Études maurrassiennes, Aix-en-Provence, vol. 1, no 5,‎ , p. 263-266
  • H.-L. Laplanche, Kénitra (ex Port-Lyautey) : Historique de la ville européenne sous le Protectorat Français 1911-1956, Recherches fondées, en partie, sur des témoignages, Faculté des Lettres et Civilisations (Univ. Jean-Moulin Lyon III), coll. « Mémoires de Maîtrise d'Histoire », , 160 p., p. 6 qui fondèrent le comptoir de Thymiateria (ou Thymiaterion) sur l'emplacement de l'actuelle Mehdia au Ve siècle av. J.-C.
  • Daniel Rivet, Lyautey et l'institution du protectorat français au Maroc, 1912 - 1925 (3 volumes), 1988, L'Harmattan.
  • André Le Révérend, Lyautey, Fayard, 1983, réed. 1990.
  • Gilbert Mercier, Lyautey, le prince lorrain, Éditions de l'Est, 1994.
  • William A. Hoisington, Lyautey and the French Conquest of Morocco, Palgrave Macmillan, 1995.
  • Hervé de Charette, Lyautey, JC Lattès, 1997.
  • Pascal Venier, Lyautey avant Lyautey, L'Harmattan, 1997.
  • Gérard Cholvy, « Lyautey : itinéraire d’un colonisateur », Bulletin de l'Académie des sciences et lettres de Montpellier, t. 37,‎ , p. 167-178 (lire en ligne [PDF]).
  • Christian Gury, Lyautey-Charlus, Éditions Kimé, 1998.
  • William A. Hoisington, L'Héritage de Lyautey, 2000.
  • Arnaud Teyssier, Lyautey : Le ciel et les sables sont grands, Perrin, 2004.
  • Lyautey, Actes du colloque de Nancy 17-, Annales de l'Est, N° spécial 2004.

Filmographie[modifier | modifier le code]

Cinéma[modifier | modifier le code]

Documentaires[modifier | modifier le code]

  • 1935 : La Pacification du Maroc : L'œuvre de Lyautey, réalisé par René Moreau.
  • 1946 : Lyautey bâtisseur d'empire, réalisé par René Lucot.
  • 1961 : « Lyautey » [vidéo], sur Institut national de l'audiovisuel, Films documentaires, (consulté le ) Documentaire de 11 min 53, produit par Les Actualités françaises, sur le transfert de la « dépouille mortelle » de Lyautey de « Rabat en France pour résider aux Invalides », avec une allocution de Charles de Gaulle.
  • 2021 : Lyautey le marocain, réalisé par Zouhair Chebbale.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]