Ghost in the Shell 2: Innocence

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Innocence : Ghost in the Shell 2
Description de l'image InnocenceLogo.jpg.
Titre original Innocence
Réalisation Mamoru Oshii
Scénario Mamoru Oshii
Acteurs principaux
Pays de production Drapeau du Japon Japon
Durée 135 minutes
Sortie 2004

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Innocence (イノセンス, Inosensu?) est un film d’animation japonais de Mamoru Oshii, sorti en 2004. L’appellation Ghost in the Shell 2 a été opérée pour des raisons commerciales lors de la distribution américaine du film en référence à Ghost in the Shell sorti en 1995. Innocence se déroule dans le même univers que Ghost in the Shell, dont il reprend certains personnages, et son intrigue a lieu chronologiquement après les événements du premier film, mais Innocence développe une histoire autonome, qui ne nécessite pas la connaissance du premier film pour être comprise.

Résumé (Spoiler) :

Innocence débute par une citation paraphrasée de L'Ève future de Auguste de Villiers de l'Isle-Adam  : « Si nos dieux et nos espoirs ne sont rien d'autre que des phénomènes scientifiques, alors notre amour est également scientifique[1]. ».

Batou est un cyborg : un humain amélioré à l'aide de prothèses mécaniques et électroniques, il appartient à l'unité d'élite de la section 9 (anti-terrorisme) œuvrant pour le gouvernement. Il ne peut se défaire du souvenir d'une femme cyborg qu'il a jadis aimée, le major Motoko Kusanagi, disparue dans la matrice, le réseau des réseaux. Épaulé par son partenaire humain Togusa, il va lui falloir déjouer un complot cybernétique. Des gynoïdes (robots androïdes à apparence féminine), servant à assouvir les plaisirs sexuels humains, massacrent leurs acquéreurs avant de se suicider (de s'autodétruire).

Batou est accompagné de la pensée (du ghost) du major Kusanagi, selon ses propres termes son ange gardien ; ou plutôt de l'être issu de la fusion de la conscience du major et du Puppet Master, un programme informatique (connu sous le nom de « projet 2501 ») et agent intelligent autonome né de l'océan de l'information, susceptible de s'incarner dans un corps et qui a échappé à ses concepteurs (voir Ghost in the Shell).

Batou et Togusa vont alors enquêter dans des milieux terroristes et mafieux pour découvrir qui manipule les esprits, afin de connaitre le secret de fabrication et le principe vital qui anime ces gynoïdes tueuses. Ils se retrouveront dans une espèce de musée de l'automate ou de la « vie artificielle », qui peut faire référence au muséum d'histoire naturelle de Ghost in the Shell.

Enfin, Batou découvrira le secret des gynoïdes sur un bateau surarmé qui croise au large dans les eaux internationales et qui sert d'usine de fabrication, en pénétrant grâce à son ange gardien le système informatique surprotégé. Les gynoïdes ont été volontairement altérées pour tuer leur acquéreurs. Le responsable de cette altération a ainsi voulu attirer la police sur la manière de fabriquer les gynoïdes : le trafic de filles dans le but de récupérer leur ghost, et ainsi obtenir des gynoïdes plus réalistes.

Fiche technique

Doublage

Japonais Français
Major Motoko Kusanagi Atsuko Tanaka Melody Dubos
Batou Akio Ōtsuka Daniel Beretta
Togusa Kōichi Yamadera Adrien Antoine
Daisuke Aramaki Tamio Ōki Jean-Claude Sachot
Ishikawa Yutaka Nakano Jean-Yves Chatelais

Production

Innocence est le premier film d'animation à concourir en sélection officielle du Festival de Cannes (2004) depuis La Planète sauvage (1973) et les deux premiers volets de la Saga Shrek . Il n'y a remporté aucun prix.

Analyse

Le nom de l'usine impliquée dans ce complot est « Locus Solus », en référence au titre d'un livre de l'écrivain français Raymond Roussel, titre faisant certainement lui-même référence au « Locus Iste »[2] (Genèse, 28, 17.22), la maison du Dieu créateur. Un autre de ses livres s'appelle L'étoile au front, ce qui n'est pas sans rappeler le mythe juif du Golem, qu'une formule inscrite sur le front permet d'animer. Il en est justement question dans ce film. L'Ève future de Auguste Villiers de l'Isle-Adam, les poupées d'Hans Bellmer et les automates de Vaucanson sont évoqués, comme l'est aussi le souci de l'humain de fabriquer une créature à son image se prenant pour un dieu. Lectisterne ou statue animée ?

Roussel est un inspirateur de l'Oulipo (fondé par Raymond Queneau), et l'on peut se demander si Mamoru Oshii ne pratique pas une sorte d'Oucipo, une des variantes cinématograpique de l'Oulipo, dans une des séquences qui reprend l'histoire, à partir d'un instant précédent, selon des variantes différentes. Cette séquence montre des hallucinations de Togusa connecté à une machine et qui revit des évènements selon des combinaisons différentes. Délivré de cette simulation ou jeu par Batou, celui-ci nous dit qu'il s'est perdu dans les labyrinthes de son esprit. Il est question ici de virtualité et de réalité et de sa perception. Ce thème était déjà présent dans le film Avalon du même réalisateur qui explorait l'univers du jeu en ligne.

Un Oulipien se définit lui-même par l'expression suivante : c'est « un rat qui construit lui-même le labyrinthe dont il se propose de sortir ».

Ces dernières remarques ne résument pas toute la richesse et la complexité du film, qui reprend les thèmes abordés lors du premier épisode, comme la réalité, l'arbre de l'évolution, la course aux armements, la mémoire, la conscience ou le reflet de son image dans un miroir, mais y rajoute des préoccupations sur les états d'âmes des cyborgs et poupées ou autres pantins et marionnettes qui se sentent rejetés après usage et obsolescence par leurs utilisateurs humains. (Image du sacrifice des marionnettes à la fin d'un carnaval asiatique, ressemblant au sacrifice d'enfants innocents à quelques Molochs, comme par exemple dans le Salammbô de Flaubert ou le Metropolis de Fritz Lang).

Metropolis, dans lequel on voit également un robot à l'image d'une femme, est évoqué implicitement lorsque l'on voit l'avion à décollage/atterrissage vertical atterrir sur le toit d'un immeuble ; l'angle de vue est similaire à une image de Metropolis, reprise également par Ridley Scott dans Blade Runner.

Les rapports ambigus entre humains, cyborgs ou jouets et animaux sont abordés, le même chien (un basset hound si cher à l'auteur) que dans Avalon est très présent (on le voit également de manière plus discrète dans Patlabor 2, Ghost in the shell et le récent The Sky Crawlers). On peut y voir une référence au livre Do Androïds Dream of Electric Sheep ? - Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (Blade Runner) de Philip K. Dick, où à la suite de la disparition des animaux sur Terre, les humains s'attachent à des simulacres d'animaux domestiques. La troisième loi de la robotique d'Isaac Asimov est également mentionnée par le médecin-légiste que Togusa et Batou viennent consulter.

Le film est ainsi parsemé de références visuelles, parfois religieuses (par exemple dans le carnaval), et de citations de Platon, Descartes, John Milton, Nicolas Gogol, La Mettrie (auteur de L'homme machine), Confucius, la Bible, Bouddha… voire de considérations Nietzschéennes comme « humains trop humains » ou « cyborgs trop cyborgs ». Sans parler des réflexions sur le cyberféminisme d'une Donna Haraway ou celles postmodernistes des cyberpunks et des transhumanistes (William Bainbridge, Ray Kurzweil, Hans Moravec, Kevin Warwick, Steve Mann…).

Servi par des images et un graphisme remarquables et des techniques numériques mélangeant avec finesse l'animation 2D traditionnelle avec les plus récentes technologies 3D, ainsi que par l'entraînante et remarquable musique du compositeur Kenji Kawai, ce film apparaît plus sombre, plus épiméthéen, plus désenchanté vis-à-vis des promesses prométhéennes de la technique ou de l'évolution de la conscience qu'avait suscité son prédécesseur Ghost in the Shell.

Mamoru Oshii fait implicitement référence à la manière de Jean-Luc Godard en utilisant la technique du collage-brassage d'images et de références culturelles pour accroître la richesse des interprétations laissées au spectateur.

L'innocence est-elle en définitive représentée par les poupées, les enfants ou les animaux ? Sûrement les trois nous suggère Mamoru Oshii pour qui l'esprit humain imprègne jusqu'à nos objets les plus intimes.

Notes et références

  1. « Puisque nos dieux et nos espoirs ne sont plus que scientifiques, pourquoi nos amours ne le deviendraient-ils pas également ? » — L'Ève future p. 276.
  2. « Terribilis est locus iste: hic domus Dei est, et porta caeli; et vocabitur aula Dei. » = Terrible est ce lieu : c'est ici la demeure de Dieu et la porte du ciel ; et elle sera appelée palais de DIeu.

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