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Gilligan est connue pour son travail sur les relations éthiques et l'[[éthique de la sollicitude]]. Son ouvrage le plus célèbre est ''[[Une voix différente]]''<ref>Carol Gilligan, ''[[Une voix différente|In a Different Voice]]'', Harvard University Press 1982, trad. française chez Flammarion en 2008 par Annick Kwiatek.</ref>, qui propose une critique de [[Stades de développement moral|l'échelle du développement moral de Kohlberg]] selon laquelle les filles atteindraient un niveau de développement moral moindre que les garçons<ref name="dissertation">{{article |langue=en |nom1=Kohlberg |prénom=Lawrence |lien auteur=Lawrence Kohlberg |titre=The Development of Modes of Thinking and Choices in Years 10 to 16 | journal=Ph. D. dissertation, University of Chicago |année=1958}}.</ref>.
Gilligan est connue pour son travail sur les relations éthiques et l'[[éthique de la sollicitude]]. Son ouvrage le plus célèbre est ''[[Une voix différente]]''<ref>Carol Gilligan, ''[[Une voix différente|In a Different Voice]]'', Harvard University Press 1982, trad. française chez Flammarion en 2008 par Annick Kwiatek.</ref>, qui propose une critique de [[Stades de développement moral|l'échelle du développement moral de Kohlberg]] selon laquelle les filles atteindraient un niveau de développement moral moindre que les garçons<ref name="dissertation">{{article |langue=en |nom1=Kohlberg |prénom=Lawrence |lien auteur=Lawrence Kohlberg |titre=The Development of Modes of Thinking and Choices in Years 10 to 16 | journal=Ph. D. dissertation, University of Chicago |année=1958}}.</ref>.

Carol Gilligan, étant l'assistante de [[Lawrence Kohlberg]], connaissait bien son travail. Pour Kohlberg, un développement de la morale élevée se traduit par une abstraction des circonstances, ce qui permet un jugement juste sur le geste posé. Cela assure le respect des droits individuels. Pour lui, l’apogée du développement moral est l’atteinte d’une autonomie permettant la prise de décisions morales qui permettront d’acquérir davantage de liberté et d’autonomie. Carol Gilligan développe l’éthique du ''care'' lorsqu’elle remarque que certaines personnes étaient exclues des études sur le développement moral, entre autres, les femmes. Elle affirme que les distinctions entre les hommes et les femmes sont dues à l’éducation, aux préjugés aux rôles sociaux. De ce fait, la société insiste pour que les femmes soient dotées d’empathie, d’écoute, de douceur et toutes les qualités requises pour le maternage. De plus, leur rôle étant de prendre soin d’autrui, elles valorisent l’attachement et les relations avec les autres qui leur permettent de grandir et de mieux se connaître<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Nadine Jammal|titre=Égales et différentes?|passage=89-92|lieu=Canada|éditeur=Athéna éditions|date=2015|pages totales=229|isbn=978-2-924142-27-1|consulté le=29 mars 2022}}</ref>. Selon la philosophe, ces enseignements mènent les femmes à acquérir une éthique relationnelle, aussi nommée [[éthique de la sollicitude]] et éthique du ''care''. Cela signifie considérer les circonstances, les besoins et les personnes dans une situation.  Les femmes ne peuvent donc pas être élevées sur l’échelle de classement de moralité de Kohlberg puisqu’elles ne répondent pas aux critères patriarcaux qu’il a développé<ref>{{Article|langue=fr|auteur1=Patricia Paperman|titre=Éthique du care , un changement de regard sur la vulnérabilité|périodique=article scientifique|date=2010|lire en ligne=https://www.cairn.info/revue-gerontologie-et-societe1-2010-2-page-51.htm|accès url=libre|format=doc}}</ref>. En effet, les valeurs qu’elles se font inculquer comme l’importance des relations et de l’entraide vont complètement à l’encontre de sa définition de la maturité, qui est d’être indépendant et individualiste. Carol Gilligan critique cette échelle de développement moral puisqu’elle fait paraître les femmes, ainsi que tous ceux pensant aux autres, comme déviants moralement. Avec l’éthique du ''care'', la psychologue veut donc démontrer qu’il doit y avoir des modifications faites dans l’évaluation de la moralité. D’après elle, il faut prendre en compte la subjectivité, le rapport avec les autres et l’éducation qui sont des éléments différents chez chaque individu<ref>{{Article|langue=fr|auteur1=Marie Garrau, Alice Le Goff|titre=Care, justice et dépendance, Introduction aux théories du care|périodique=revue scientifique|date=2010|lire en ligne=https://cairn-maisonneuve.proxy.collecto.ca/care-justice-et-dependance--9782130576211.htm|format=doc|pages=6,7}}</ref>.


Un des aspects de la théorie de [[Lawrence Kohlberg]] que critique Gilligan est fondé sur un problème posé à un garçon et à une fille : {{citation|un homme se demande s'il doit ou s'il ne doit pas voler un médicament qu'il n'a pas les moyens d'acheter pour sauver la vie de sa femme}}. Le garçon résout le dilemme en considérant que l'homme doit voler le médicament et donc transgresser la loi s'il veut sauver sa femme. La fille quant à elle considère que l'homme devrait aller à la rencontre du pharmacien, lui exposer sa situation et lui expliquer qu'offrir ce médicament permettrait de sauver une vie. En reconfigurant le problème de la sorte, l'homme ne transgresse pas la loi, il sauve sa femme et le pharmacien accomplit un acte altruiste. Selon Kohlberg, la petite fille fait preuve d'une certaine naïveté et n'a pas conscience des principes de la justice universelle.
Un des aspects de la théorie de [[Lawrence Kohlberg]] que critique Gilligan est fondé sur un problème posé à un garçon et à une fille : {{citation|un homme se demande s'il doit ou s'il ne doit pas voler un médicament qu'il n'a pas les moyens d'acheter pour sauver la vie de sa femme}}. Le garçon résout le dilemme en considérant que l'homme doit voler le médicament et donc transgresser la loi s'il veut sauver sa femme. La fille quant à elle considère que l'homme devrait aller à la rencontre du pharmacien, lui exposer sa situation et lui expliquer qu'offrir ce médicament permettrait de sauver une vie. En reconfigurant le problème de la sorte, l'homme ne transgresse pas la loi, il sauve sa femme et le pharmacien accomplit un acte altruiste. Selon Kohlberg, la petite fille fait preuve d'une certaine naïveté et n'a pas conscience des principes de la justice universelle.

Version du 1 avril 2022 à 21:10

Carol Gilligan est une philosophe et psychologue féministe américaine, née le . Elle est professeure honoraire de psychologie sociale, spécialiste des relations sociales et fondatrice de l'éthique de la sollicitude (ou éthique du care). Elle est connue pour son ouvrage paru en 1982, Une voix différente, qui propose des éléments de cette éthique.

Biographie

Gilligan étudie la littérature anglaise et la psychologie clinique et soutient une thèse de doctorat en psychologie sociale de l'université Harvard[1]. Elle mène ensuite une carrière universitaire, d'abord à l'université Harvard en 1967, puis à l'université de Cambridge de 1992 à 2002. En 2002, elle est ensuite professeur à l'université de New York (School of Education and the School of Law) où elle finit sa carrière d'enseignante.

Éthique du care et féminisme

Gilligan est connue pour son travail sur les relations éthiques et l'éthique de la sollicitude. Son ouvrage le plus célèbre est Une voix différente[2], qui propose une critique de l'échelle du développement moral de Kohlberg selon laquelle les filles atteindraient un niveau de développement moral moindre que les garçons[3].

Carol Gilligan, étant l'assistante de Lawrence Kohlberg, connaissait bien son travail. Pour Kohlberg, un développement de la morale élevée se traduit par une abstraction des circonstances, ce qui permet un jugement juste sur le geste posé. Cela assure le respect des droits individuels. Pour lui, l’apogée du développement moral est l’atteinte d’une autonomie permettant la prise de décisions morales qui permettront d’acquérir davantage de liberté et d’autonomie. Carol Gilligan développe l’éthique du care lorsqu’elle remarque que certaines personnes étaient exclues des études sur le développement moral, entre autres, les femmes. Elle affirme que les distinctions entre les hommes et les femmes sont dues à l’éducation, aux préjugés aux rôles sociaux. De ce fait, la société insiste pour que les femmes soient dotées d’empathie, d’écoute, de douceur et toutes les qualités requises pour le maternage. De plus, leur rôle étant de prendre soin d’autrui, elles valorisent l’attachement et les relations avec les autres qui leur permettent de grandir et de mieux se connaître[4]. Selon la philosophe, ces enseignements mènent les femmes à acquérir une éthique relationnelle, aussi nommée éthique de la sollicitude et éthique du care. Cela signifie considérer les circonstances, les besoins et les personnes dans une situation.  Les femmes ne peuvent donc pas être élevées sur l’échelle de classement de moralité de Kohlberg puisqu’elles ne répondent pas aux critères patriarcaux qu’il a développé[5]. En effet, les valeurs qu’elles se font inculquer comme l’importance des relations et de l’entraide vont complètement à l’encontre de sa définition de la maturité, qui est d’être indépendant et individualiste. Carol Gilligan critique cette échelle de développement moral puisqu’elle fait paraître les femmes, ainsi que tous ceux pensant aux autres, comme déviants moralement. Avec l’éthique du care, la psychologue veut donc démontrer qu’il doit y avoir des modifications faites dans l’évaluation de la moralité. D’après elle, il faut prendre en compte la subjectivité, le rapport avec les autres et l’éducation qui sont des éléments différents chez chaque individu[6].

Un des aspects de la théorie de Lawrence Kohlberg que critique Gilligan est fondé sur un problème posé à un garçon et à une fille : « un homme se demande s'il doit ou s'il ne doit pas voler un médicament qu'il n'a pas les moyens d'acheter pour sauver la vie de sa femme ». Le garçon résout le dilemme en considérant que l'homme doit voler le médicament et donc transgresser la loi s'il veut sauver sa femme. La fille quant à elle considère que l'homme devrait aller à la rencontre du pharmacien, lui exposer sa situation et lui expliquer qu'offrir ce médicament permettrait de sauver une vie. En reconfigurant le problème de la sorte, l'homme ne transgresse pas la loi, il sauve sa femme et le pharmacien accomplit un acte altruiste. Selon Kohlberg, la petite fille fait preuve d'une certaine naïveté et n'a pas conscience des principes de la justice universelle.

Selon Gilligan, la résolution différentielle du dilemme du pharmacien met en lumière deux rapports à la morale :

  • le premier (plutôt connoté masculin) est fondé sur un rapport au monde logique et juridique ;
  • le second (plutôt connoté féminin) est fondé sur le dialogue, le sens de la responsabilité et l'attention à autrui qui sont les fondements de l'éthique de la sollicitude.

Joan Tronto reprend cette éthique mais lui donne un sens plus politique et moins essentialiste[7].

Les travaux de Gilligan sur l'éthique du care ont été mobilisés par plusieurs universitaires pour penser les crises et notamment la crise démocratique[8], mais aussi le Covid-19[9].

Publications

En français

  • Carol Gilligan, Sandra Laugier et Patricia Paperman, « Le care, éthique féminine ou éthique féministe ? », Multitudes, vol. 2, nos 37-38,‎ , p. 76-78 (lire en ligne, consulté le ).
  • Carol Gilligan, Une si grande différence, Paris, Flammarion, 1986.
    1ère traduction française de A Different Voice.
  • Carol Gilligan (trad. de l'anglais par Annick Kwiatek et Vanessa Nurock, préf. Sandra Laugier et Patricia Paperman), Une voix différente : La morale a-t-elle un sexe ? [« In a Different Voice »], Paris, Flammarion, coll. « Champs essais », (1re éd. 1986), 336 p. (ISBN 978-2-08-147938-8).
  • Contre l'indifférence des privilégiés. À quoi sert le care, avec Joan Tronto et Arlie Hochschild, Paris, Payot, 2013.
  • Pourquoi le patriarcat ?, avec Naomi Snider, Flammarion, 2019.

En anglais

  • In a Different Voice, Harvard University Press, 1982.
  • Mapping the Moral Domain: A Contribution of Women's Thinking to Psychological Theory and Education, Harvard University Press, 1989.
  • Making Connections: The Relational Worlds of Adolescent Girls at Emma Willard School, Harvard University Press, 1990.
  • Meeting at the Crossroads: Women's Psychology and Girls' Development, Harvard University Press, 1992.
  • Between Voice and Silence: Women and Girls, Race and Relationships, Harvard University Press, 1997.
  • The Birth of Pleasure, Knopf, 2002.
  • Kyra, Random House, 2008.
  • The Deepening Darkness: Patriarchy, Resistance, & Democracy's Future, Cambridge University Press, (2009) (avec David A.J. Richards).
  • Why does patriarchy persist?, Cambridge: Polity Press, 2018 (avec Naomi Snider).

Notes et références

  1. (en) « Carol Gilligan », Webster.edu, (consulté le )
  2. Carol Gilligan, In a Different Voice, Harvard University Press 1982, trad. française chez Flammarion en 2008 par Annick Kwiatek.
  3. (en) Lawrence Kohlberg, « The Development of Modes of Thinking and Choices in Years 10 to 16 », Ph. D. dissertation, University of Chicago,‎ .
  4. Nadine Jammal, Égales et différentes?, Canada, Athéna éditions, , 229 p. (ISBN 978-2-924142-27-1), p. 89-92
  5. Patricia Paperman, « Éthique du care , un changement de regard sur la vulnérabilité », article scientifique,‎ (lire en ligne Accès libre [doc])
  6. Marie Garrau, Alice Le Goff, « Care, justice et dépendance, Introduction aux théories du care », revue scientifique,‎ , p. 6,7 (lire en ligne [doc])
  7. Wolfram Eilenberger, « Joan Tronto. « Yes, we care ! » », sur Philosophie Magazine, (consulté le ).
  8. Alexandre Gefen (dir.) et Sandra Laugier (dir.), Le Pouvoir des liens faibles, Paris, CNRS Éditions (lire en ligne).
  9. Claire Legros, « Le souci de l’autre, un retour de l’éthique du « care » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Françoise Digneffe, « Morale de justice ou morale de responsabilité : un débat entre L. Kohlberg et C. Gilligan à propos du développement du jugement moral », Déviance et société, vol. 10, no 1,‎ , p. 21-38 (lire en ligne, consulté le ).
  • Clémence Ledoux, « Care », dans Catherine Achin et Laure Bereni, Dictionnaire genre & science politique, Paris, Presses de Sciences Po, (ISBN 9782724613810).
  • Vanessa Nurock (dir.), Carol Gilligan et l'éthique du care, Paris, PUF, 2010, coll. « Débats philosophiques », 192 p., (ISBN 9782130573449).
  • Patricia Paperman, « L'éthique du care et les voix différentes de l'enquête », Recherches féministes, vol. 28, no 1,‎ , p. 29-44 (lire en ligne, consulté le ).
  • Nathalie Savard, « Développement moral et jugement moral : réexamen de la controverse Kohlberg-Gilligan », Horizons philosophiques, vol. 7, no 1,‎ , p. 113-124 (lire en ligne, consulté le ).

Articles connexes

Liens externes

En anglais