« Yaoi » : différence entre les versions

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{{Titre en italique|ja-Latn}}[[Fichier:JackXArik.png|vignette|alt=Dessin couleur de style manga, où deux jeunes hommes s'embrassent sous un parapluie.|Deux ''{{lang|ja-Latn|[[bishōnen]]}}'' qui s'embrassent, situation typique dans une œuvre ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''.]]{{Confusion|Yayoi (homonymie)}}
{{Unicode japonais}}
Le {{japonais|'''''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'''''|やおい}}, aussi appelé '''''{{lang|en|boys' love (BL)}}''''', est dans la culture populaire [[japon]]aise un genre d'œuvres de fiction centré sur les relations sentimentales et/ou sexuelles entre personnages masculins. Le genre du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' concerne essentiellement la [[littérature]] ainsi que le monde du [[manga]] et de l’''{{lang|ja-Latn|[[anime]]}}'', mais se retrouve aussi à plus petite échelle dans le cadre des [[jeu vidéo|jeux vidéo]], de la [[télévision]] et du [[cinéma]], ainsi que d'autres types de supports. L'équivalent féminin du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' est le ''{{lang|ja-Latn|[[yuri]]}}''.
{{Sources secondaires}}


Bien que centré sur les relations homosexuelles masculines, le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' est un genre qui est principalement supposément destiné au public féminin. Il cohabite avec le ''{{lang|en|[[men's love]]}}'', un autre genre qui traite de l'homosexualité masculine, cette fois destiné à un public gay. Ces deux genres, bien que possédant des différences thématiques et stylistiques, possèdent aussi des points communs et s'inter-alimentent. La frontière entre les deux est donc parfois poreuse, et il arrive que les deux genres soient confondus. Le public est aussi partiellement partagé, avec des hommes gays qui lisent du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' et des femmes qui lisent du ''{{lang|en|men's love}}''.
Le {{japonais|'''''yaoi'''''|やおい}} est un genre de [[manga]]s (mais aussi d'[[anime]]s et de [[jeux vidéo]]), dessiné surtout par des femmes à destination d'un public féminin, dans lequel l'intrigue est centrée autour d'une relation homosexuelle entre personnages masculins, et comportant souvent des scènes sexuelles. Il s'agit généralement de relations idéalisées avec des personnages masculins.


Le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' est réputé pour sa forte communauté amateur dans les cercles ''{{lang|ja-Latn|[[dōjinshi]]}}''. Ces productions amateurs peuvent être des créations originales ou bien des parodies d'œuvres ou de personnes existantes. Là encore la littérature et les mangas forment la majeure partie des créations ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' amateurs.
Le ''yaoi'' est à distinguer
* du ''[[shonen-ai]]'', dans lequel la romance homosexuelle n'atteint pas le stade du sexe. Les relations sont essentiellement platoniques ou au stade du tendre baiser ;
* du ''[[bara (genre)|bara]]'', genre homosexuel plus réaliste, qui est dessiné essentiellement par des hommes et à destination d'un public homosexuel masculin ;
* du ''[[shotacon|shota]]'', où les protagonistes (ou au moins l'un d'entre eux) sont des enfants pré-adolescents, et qui est souvent associé à de la pédophilie.


Des œuvres de type ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ou approchant sont apparues tout au long du {{XXe siècle}}, mais il ne s'établit comme genre à part entière qu'au cours des années 1970 au sein des ''{{lang|ja-Latn|[[shōjo|shōjo manga]]}}''. Au fil des décennies qui suivent le genre se diversifie, et bien que toujours fortement lié aux démographies féminines, il touche un public de plus en plus large et diversifié en termes de sexes, de [[Genre (sciences sociales)|genres]] et de sexualités. Depuis les années 2000, la production tant professionnelle qu'amateur de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' s'est globalisée à l'international, se mêlant à la pratique occidentale du ''{{lang|en|[[Slash (fiction)|slash]]}}''.
== Définition ==
[[Image:Yaoi Books by miyagawa.jpg|250px|right|Section « ''yaoi'' » dans une librairie à Kinokuniya (japon)|thumb]]
''Yaoi'' serait l'acronyme de {{japonais|'''ya'''ma nashi, '''o'''chi nashi, '''i'''mi nashi|ヤマなし、オチなし、意味なし}} -- qu'on peut traduire par "sans paroxysme, sans dénouement, sans signification" -- boutade lancée par les auteurs établis de l'époque qui opposaient le yaoi au shounen-ai, considéré plus complexe et moins croustillant.


== Définitions ==
À l'origine, le terme a été inventé pour désigner des ''[[dōjinshi]]'' (mangas auto-édités, le plus souvent dessinés par des amateurs) comportant des scènes
Au cours de l'histoire, différents termes ont été utilisés pour désigner tout ou partie du genre ainsi que ses sous-genres. Les universitaires spécialistes en manga Mark McLelland et James Welker considèrent qu'il y a eu quatre principaux termes historiques, qu'ils définissent ainsi{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=5}} :
[[érotisme|érotiques]] entre personnages masculins issus de mangas, de [[série animée|séries animées]] ou de jeux vidéo populaires (''[[Saint Seiya]]'', ''[[Captain Tsubasa]]'', ''[[Gundam Wing]]'', ''[[Final Fantasy VII]]'', ''[[Inazuma Eleven]]'' etc.).
La popularité des histoires mettant en scène des couples homosexuels, avec ou sans graphisme sexuel, a été grandissante parmi le public féminin japonais durant les années 1970-1980. Il en a suivi une production d'œuvres originales réalisées par des auteurs professionnels : c'est la naissance du genre à part entière, aujourd'hui appelé {{japonais|''Boy’s Love''|ボーイズラブ}}.


;{{japonais|''{{lang|ja-Latn|Shōnen'ai}}''|少年愛}}
Si « yaoi » ne désigne au [[Japon]] que les ''dōjinshi'', le terme est aujourd'hui souvent utilisé abusivement par les fans occidentaux pour désigner toute forme de romance entre deux hommes, même si elle est uniquement suggérée. Il ne faut pas non plus confondre le ''yaoi'' avec le ''[[yuri]]'' qui parle des relations homosexuelles entre femmes.
:Ce terme a été largement utilisé pendant les années 1970 et 1980 pour désigner les ''{{lang|ja-Latn|shōjo manga}}'' mettant en scène l'homosexualité masculine. Aujourd'hui il est parfois utilisé rétroactivement afin de désigner les œuvres ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' de cette époque, mais dans le discours japonais actuel le terme a repris son sens premier, où il désigne la [[pédérastie]].
;''{{lang|ja-Latn|JUNE}}''
:Ce terme est dérivé d'un [[June (magazine)|magazine ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' éponyme]] qui était publié de la fin des années 1970 au milieu des années 1990, et a été utilisé pour nommer le type de mangas publié dans ce magazine. Il a aussi été utilisé pour désigner des créations ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' amateurs, essentiellement les créations originales et non les parodies.
;{{japonais|''{{lang|ja-Latn|Yaoi}}''|やおい}}
:Est un acronyme pour ''{{lang|ja-Latn|yama nashi, ochi nashi, imi nashi}}'' qui peut se traduire par {{citation|pas de [[climax]] [dans la narration], pas de chute [au récit], pas de sens [à l'histoire]{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=5}}}}. Ce nom auto-dérisoire est établi en 1979 et a été diffusé par un cercle ''{{lang|ja-Latn|dōjinshi}}'' influent. Il s'est popularisé au cours des années 1980 et désigne depuis les créations amateurs du genre, mais est aussi parfois utilisé comme terme-parapluie pour désigner l'ensemble des créations amateurs et professionnelles.
;{{japonais|''{{lang|en|Boys' love}}''|ボーイズラブ}}
:Généralement écrit en [[katakana]] ou par son acronyme {{citation|BL}}. Ce terme apparaît au début des années 1990 pour désigner les productions ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' professionnelles, mais est aussi utilisé comme terme-parapluie pour désigner l'ensemble de la production amateur et professionnelle.


Ces termes représentent des concepts qui se chevauchent les uns les autres, il n'y a pas de frontière exacte entre chacun d'eux{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=9-12}}. De plus en Occident le sens de ces termes a tendance à changer en fonction des pays{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=5}}, notamment le terme {{lang|ja-Latn|''shōnen'ai''}} est souvent utilisé en Occident pour désigner les amours suggérées ou platoniques{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=6}}.
== BL, shōnen-ai et shota ==
Le terme moderne utilisé par les maisons d'éditions japonaises pour catégoriser les œuvres commerciales ayant pour intrigue une romance entre hommes et destinées à un public féminin est [[Boy's Love]] ('''BL''').


D'autres termes sont régulièrement utilisés dans la culture ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', sans toutefois être limités à cette dernière. Par exemple{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=6}} : {{japonais|''{{lang|ja-Latn|tanbi}}''|耽美||{{citation|esthète}} ou {{citation|esthétique}}}}, {{japonais|''{{lang|ja-Latn|aniparo}}''|アニパロ||contraction de {{citation|''{{lang|en|anime parody}}''}}}}, {{japonais|''{{lang|ja-Latn|sōsaku}}''|創作||création originale}}, {{japonais|''{{lang|ja-Latn|niji sōsaku}}''|二次創作||création dérivée}} et {{japonais|''{{lang|ja-Latn|sanji sōsaku}}''|三次創作||création dérivée d'une création dérivée}}.
On retrouve aussi encore le terme désuet [[shōnen-ai]] que les fans occidentaux utilisent pour désigner une romance homosexuelle sans relation sexuelle dessinée. Or, historiquement, le ''shōnen-ai'' est un sous-genre du [[shōjo]] et était surtout utilisé dans les [[années 1970]] à [[années 1980|80]] pour désigner des œuvres comme ''Kaze to ki no uta'' de [[Keiko Takemiya]] ou ''Thomas no shinzo'' de [[Moto Hagio]] et qui dépeignaient des relations romantiques tragiques entre jeunes garçons.


== Concepts et thématiques ==
Le terme [[shota]] désigne des œuvres dépeignant des relations, platoniques ou non, entre des hommes adultes et des enfants (souvent des garçons) ou entre des mineurs de moins de 16 ans : Cela peut donc être apparenté ou non à de la [[pédophilie]]. C'est pourquoi la plus grande précaution est à prendre quand on parle de ''shota''. Par exemple, certaines fanfictions écrites à partir d'[[Harry Potter]] (avant la fin de la 6{{e}} année des personnages) et la plupart de celles écrites sur [[Gundam Wing]] sont assimilables à du [[shota]].
=== ''{{lang|ja-Latn|Bishōnen}}'' ===
{{article détaillé|bishōnen{{!}}''{{lang|ja-Latn|Bishōnen}}''}}
Les protagonistes de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' sont pour leur majorité des {{japonais|''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}''|美少年||beau garçon}}. Les ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' sont des adolescents ou des jeunes hommes plus ou moins androgynes, que James Welker décrit comme un mélange des {{citation|esthètes et décadents européens du {{XIXe siècle}}}}, des [[Petits Chanteurs de Vienne|petits chanteurs de Vienne]], des célébrités androgynes telles que [[David Bowie]], et de la figure de la {{japonais|''{{lang|ja-Latn|[[bishōjo]]}}''|美少女||belle fille}}{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=842}}. Il ajoute que ces ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' ne sont {{incise|physiquement et mentalement}} ni des hommes et ni des femmes, ce sont des êtres qui vivent en dehors du {{citation|monde [[hétérosexualité|hétéro]]-[[Patriarcat (sociologie)|patriarcal]]}}, ils appartiennent en quelque sorte à un troisième sexe. Ils sont essentiellement homosexuels, c'est-à-dire qu'ils sont romantiquement et sexuellement attirés par d'autres ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'', bien que ce ne soit pas toujours de façon exclusive ; ils peuvent aussi avoir des relations avec des hommes ou des femmes{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=842}}{{,}}{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=856}}.


Plusieurs mangakas et d'autres académiciens, telle Yukari Fujimoto de l'[[université Meiji]], considèrent que les ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' sont des {{citation|femmes dans des corps d'hommes}}, et sont la continuation des femmes travesties en hommes des ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas telles que Saphir de ''[[Princesse Saphir]]'' ou Oscar de ''[[La Rose de Versailles]]''{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=137}}{{,}}{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=80-83}}, directement inspirés des ''{{lang|ja-Latn|otokoyaku}}'' de la [[revue Takarazuka]]{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=846}}. Ce {{citation|travestissement}} permet aux femmes d'échapper à la relation hétérosexuelle qui est perçue comme violente{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=137}} et effrayante, assimilable à un viol ou à du [[masochisme]], où la femme y est systématiquement la victime{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=136}}. Les relations entre ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' sont au contraire {{citation|sans-danger}} et {{citation|pures}}, ce qui permet aux femmes d'expérimenter le sexe en toute sécurité{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=78-79}}.
D'autres termes ont été en usage par le passé (''June'', ''Tanbi'') mais sont tombés en désuétude.


Cette vision des ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' comme étant des {{citation|femmes dans des corps d'hommes}} fait que ces ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ne cherchent aucunement à décrire l'homosexualité masculine{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=137}}, et qu'au contraire, ils autorisent une lecture lesbienne{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=843}}. James Welker compare ainsi les ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' à la définition du mot {{citation|lesbienne}} de la théoricienne lesbienne [[Bonnie Zimmerman]] : {{citation|elles sont des perturbatrices de l'hétérosexualité, elles incarnent une figure en dehors du patriarcat, une faille dans la dualité du [[Genre (sciences sociales)|genre]]{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=842}}.}}
== Caractéristiques ==
Le [[Boy's Love|BL]] en général et le ''yaoi'' en particulier sont destinés en principe à un public féminin.


=== ''{{lang|ja-Latn|Seme}}'' et ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' ===
Ces œuvres sont écrites par des femmes et pour des femmes, si bien qu'elles mettent en scène les fantaisies féminines et les fantasmes projetés par des femmes sur les univers homosexuels masculins. La relation homosexuelle dépeinte, sentimentale et physique, obéit en effet largement aux codes et aux normes imposées au couple hétérosexuel.
[[Fichier:Lesson 1 Private Tutor.jpg|vignette|alt=Dessin manga couleur, ou deux hommes à moitié déshabillés se font face à face, l'homme de gauche étant dans une posture dominante par rapport à l'homme de droite.|Représentation d'un couple ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' (à gauche) et ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' (à droite).]]
La dynamique entre la figure du ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' et la figure du ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' apparaît dans les œuvres amateurs ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' au cours des années 1980 avant d'être repris et généralisé par les BL commerciaux, devenant un standard du genre{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=77}}. Le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' désigne {{citation|l'attaquant}}, le membre qui domine le couple et qui lors du rapport sexuel pénètre l'autre. Le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' est quant à lui le {{citation|receveur}}, il est le membre dominé et qui lors du rapport sexuel est pénétré{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=10}}.


Ces deux termes ont été empruntés au monde du sport japonais, avec les deux verbes {{japonais|''{{lang|ja-Latn|semeru}}''|攻める||attaquer}} et {{japonais|''{{lang|ja-Latn|ukeru}}''|受ける||recevoir, subir}} employés dans les [[arts martiaux japonais]]. L'usage d'un tel vocabulaire peut ainsi signifier que le rapport sexuel obéit à ses propres règles et codes{{sfn|Namtrac|2008|id=Namtrac 2008|p=81}}.
On y retrouve souvent un modèle du couple homme-femme, selon une rhétorique basique, avec un partenaire viril dominant (''seme'' - du verbe ''semeru'', attaquer) et son amant efféminé et vulnérable à la psychologie « toute féminine » (''uke'' - du verbe ''ukeru'', recevoir).


Des critiques du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' tels que Keith Vincent de l'[[université de Boston]] voient dans cette dynamique ''{{lang|ja-Latn|seme}}''/''{{lang|ja-Latn|uke}}'' un écho à la dynamique hétérosexuelle, notant que le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' est généralement efféminé, naïf, et sujet aux attentions et aux désirs des hommes autour de lui, quand le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' apparaît comme une sorte de {{citation|prince}}. Il considère ainsi que la seule différence entre les romances hétérosexuelles et ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' vient du fait que puisque les deux protagonistes sont des hommes, aucun n'est socialement bridé, notamment dans le cadre du monde du travail{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=73-74}}.
Ce stéréotype évolue dans certaines œuvres : ainsi le ''uke'' devient le ''seme'' avec le même partenaire (''Haru wo Daiteita'' de Nitta Youka, ''Le Jeu du chat et de la souris 2'' de Setona Mizushiro) ou avec d'autres.


D'autres critiques, telles que la spécialiste littéraire Yōko Nagakubo récusent cette lecture hétérosexuelle de la dynamique ''{{lang|ja-Latn|seme}}''/''{{lang|ja-Latn|uke}}''. Nagakubo note que si le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' est essentiellement féminin, il conserve des traits masculins, et que le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' possède lui aussi des traits tant masculins que féminins{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=84}}. De plus elle note que le rôle sexuel des deux membres du couple est déterminé par le contraste entre ces traits masculins et féminins, ce qui fait qu'un personnage peut être selon la situation un {{citation|prince}} ou une {{citation|princesse}}, et que selon le partenaire, le personnage peut changer de rôle. Pour Nagabuko les caractéristiques masculines et féminines ne sont ainsi plus des contraintes imposées par le modèle [[Patriarcat (sociologie)|patriarcal]], mais deviennent des libertés, qui peuvent être explorées de différentes façons.
== Yaoi et Hentai ==
De par sa définition d'œuvre à caractère sexuel, on croit abusivement que le ''yaoi'' n'est qu'une simple œuvre pornographique centrée sur le sexe, rien de plus que du [[hentai]] ou pornographie pour fille. Or les mangas, romans et animes ''yaoi'' offrent en fait un vaste panel de genres, de la comédie à la science-fiction, des robots géants à la romance de collégiens, avec en général des intrigues longues et complexes. L'acte sexuel y apparaît le plus souvent comme un acte d'amour, la romance servant toujours de toile de fond principale. Nombre de mangas ''yaoi'' sont même peu explicites.


L'essayiste Yumiko Watanabe considère que la répartition des rôles entre le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' et le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' est soumise à trois facteurs différents : le statut social, la stature physique et la spiritualité du personnage. Ces trois facteurs permettent de jouer avec les rôles, ce qui a permis de créer de nombreux archétypes et stéréotypes, tels que le {{citation|''{{lang|ja-Latn|sasoi uke}}''}} (quelqu'un de mentalement ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' mais physiquement ''{{lang|ja-Latn|uke}}''), le {{citation|''{{lang|ja-Latn|hetare zeme}}''}} (un ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' ''{{lang|en|loser}}''), le {{citation|''{{lang|ja-Latn|jō uke}}''}} (un ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' qui a le port d'une fière princesse), le {{citation|''{{lang|ja-Latn|keigo zeme}}''}} (un ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' qui s'adresse à son partenaire avec révérence), le {{citation|''{{lang|ja-Latn|yancha uke}}''}} (un ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' pervers), le {{citation|''{{lang|ja-Latn|gekokujō}}''}} (lorsque le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' se met à dominer son ''{{lang|ja-Latn|seme}}''), et d'autres encore. Tous ces archétypes et stéréotypes sont construits pour être contradictoires{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=85}}.
On notera d'ailleurs la tendance à ne pas dessiner les organes génitaux, même dans des [[anime]]s ''yaoi'' très axés sur les relations intimes. Il n'y a guère que les ''dōjinshi yaoi'' cités précédemment qui minimisent l'intrigue au profit de l'acte sexuel.


Pour Yukari Fujimoto, cette fluidité entre les [[Genre (sciences sociales)|genres]] offerte par la dynamique ''{{lang|ja-Latn|seme}}''/''{{lang|ja-Latn|uke}}'' permet tant à l'auteur qu'au lecteur de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' de {{citation|jouer avec le genre}}, en combinant les facteurs du genre et les dynamiques de domination comme il l'entend. Comme l'histoire se passe entre hommes et qu'il n'y a plus de différence physique entre les partenaires, l'œuvre ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' autorise au lecteur, tant féminin que masculin d'essayer de nouvelles possibilités vis-à-vis des caractéristiques genrées traditionnelles, en s'identifiant au ''{{lang|ja-Latn|seme}}'', au ''{{lang|ja-Latn|uke}}'', ou en adoptant une position voyeuriste{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015|p=85}}.
== Diffusion ==
Le marché des œuvres ''yaoi'' s'est énormément développé ces dernières années et touche un public de plus en plus large, au Japon comme à l'étranger.


=== ''{{lang|ja-Latn|Yaoi}}'' et ''{{lang|en|slash}}'' ===
De nombreux [[shōjo manga]]s incluent des éléments BL, comme des relations ambiguës entre personnages masculins secondaires, sans pour autant en faire leur intrigue principale. Voir par exemple des œuvres telles que [[Angel sanctuary]], [[Cardcaptor Sakura]], [[X (manga)|X]], [[Tsubasa Reservoir Chronicle]] ou [[Ouran High School Host Club|Host Club]], s'adressant à un large public.
{{article détaillé|slash (fiction){{!}}''{{lang|en|Slash}}''}}
Une part importante des ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' amateurs consiste en des ''{{lang|en|[[fanfiction]]s}}'' où une relation amoureuse ou sexuelle entre deux personnages masculins est imaginée. Cette pratique de {{citation|mise en couple}} du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' est l'équivalent du ''{{lang|en|slash}}'' pratiquée en Occident, si bien que les deux pratiques sont aujourd'hui généralement confondues{{sfn|Sylvius|2008|id=Sylvius 2008|p=27}}.


La création du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' commence par la recherche du ''{{lang|ja-Latn|[[moe (Japon)|moe]]}}'', une réponse affective pour un personnage fictionnel, ou dans le cas du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', une réponse affective sur la relation partagée entre deux personnages. Le terme {{citation|personnage}} est relativement large : il concerne aussi bien des personnages de fictions existantes, des personnalités réelles ou des personnes de l'entourage du créateur de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' qui ont été {{citation|fictionnalisées}}, ainsi que des représentations [[anthropomorphisme|anthropomorphiques]] d'objets, de plantes, d'animaux ou même de concepts{{sfn|Galbraith|2015|id=Galbraith 2015|p=155}}. Si à peu près n'importe quoi peut être ''{{lang|ja-Latn|moe}}'', généralement seul ce qui est originaire d'une fiction ou ce qui est lié aux fictions est sujet au ''{{lang|ja-Latn|moe}}'', une personne réelle doit quant à elle être réappropriée par le créateur comme un personnage fictionnel avant de pouvoir être ''{{lang|ja-Latn|moe}}''. Par ailleurs les personnages réellement gays sont généralement jugés peu intéressants et rarement sujet au ''{{lang|ja-Latn|moe}}''{{sfn|Galbraith|2015|id=Galbraith 2015|p=155-156}}.
De la même façon que des artistes amateurs ont détourné les personnages de leurs séries favorites pour écrire et dessiner des ''dōjinshi yaoi'', des fans du monde entier ont adhéré à cette subversion appelée désormais '''[[Slash (fiction)|Slash]]''' (nommé d'après la [[barre oblique]] appelée 'slash' en anglais, utilisée pour séparer les noms de deux personnages que les fans mettent en couple). Le slash reprend le principe de l'utilisation des personnages d'une œuvre et de leur mise en scène dans une relation homosexuelle, quelle que soit leur orientation dans l'œuvre d'origine. Une telle pratique s'exerce artistiquement dans les œuvres écrites dites [[fanfiction]]s ou graphiques dites [[fan art|fanarts]]. Il n'est pas rare de voir confondus [[Slash (fiction)|Slash]] et Yaoi dans les [[fanfiction]]s et [[fan art|fanarts]] à caractère sexuel.


Lorsque le ''{{lang|ja-Latn|moe}}'' est établi entre deux personnages, la fantaisie peut commencer. Cette fantaisie consiste principalement à {{citation|jouer avec la sexualité}} et {{citation|jouer avec le genre}} selon les modalités de la dynamique entre ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' et ''{{lang|ja-Latn|uke}}''{{sfn|Galbraith|2015|id=Galbraith 2015|p=154}}.
== Yaoi-Con ==


=== Thématique du viol ===
La première convention entièrement centrée autour du BL en général et du ''yaoi'' en particulier est la [[Yaoi-Con]] qui se tient tous les ans à San Francisco, et réunit des fans de tous les États-Unis (où le BL est le plus porteur) et du monde. Cette convention est destinée aux adultes et l'âge d'entrée minimal est 18 ans.
{{...}}
Lors du premier rapport sexuel entre un ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' et un ''{{lang|ja-Latn|uke}}'', il n'est pas rare que ce dernier soit relativement violent, le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' forçant le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'', ce qui s'apparente à un [[viol]]{{sfn|Namtrac|2008|id=Namtrac 2008|p=70}}. Pour autant le ''{{lang|ja-Latn|uke}}'' finit par répondre positivement au rapport sexuel et atteint la jouissance. Aux yeux des auteurs et des lecteurs japonais ce {{citation|viol apparent}} est en fait l'expression la {{citation|plus brute du désir et des sentiments}} que le ''{{lang|ja-Latn|seme}}'' a pour le ''{{lang|ja-Latn|uke}}''. Cette dynamique et cet acte du viol est similaire aux situations que l'on retrouve dans les ''{{lang|ja-Latn|[[shōjo]]}}'' mangas érotiques et pornographiques hétérosexuels, où le personnage féminin est elle aussi régulièrement violée par le personnage masculin{{sfn|Namtrac|2008|id=Namtrac 2008|p=70-71}}. Rare est l'apparition de scènes de viol "réalistes" où les victimes ont des répercussions psychologiques suivant les actes qu'elles ont subis. Under Grand Hotel, une histoire qui se passe dans une prison, est une des œuvres qui mettent en scène l'acte violent qu'est le viol. La victime/le ''uke'' s'y fait violer à maintes reprises par son "amoureux"/''seme''.


== Histoire ==
Il est à noter qu'au Japon, de très nombreux évènements organisés par des fans permettent aux cercles de vendre des ''doujinshi yaoi''. Ces conventions sont toutefois en général assez discrètes (sur invitation seulement pour certaines d'entre elles).
=== Avant 1970 : les prémices du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ===
La pratique de l'homosexualité tant masculine que féminine ainsi que la mise en valeur de l'[[androgynie]] ont été historiquement et traditionnellement acceptées au Japon, notamment dans la classe des [[samouraï]]s, au sein des établissements [[bouddhisme|bouddhistes]] ou encore dans l'environnement autour du théâtre ''{{lang|ja-Latn|[[kabuki]]}}''{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=133-134}}{{,}}{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=6-7}}. Mais au cours de l'[[ère Meiji]] (1868-1912) le pays s'ouvre au monde occidental, et entre autres choses il importe la [[sexologie]] hollandaise qui considère l'homosexualité comme une pathologie{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=136}}, ainsi que le concept de {{citation|l'amour romantique}} (attraction spirituelle entre un homme et une femme) qui n'existait jusqu'à présent pas dans la conscience japonaise. Cette nouvelle notion de l'amour, nommée ''{{lang|ja-Latn|ren'ai}}'', remplace rapidement les autres formes d'amour qui existaient jusqu'à présent au Japon. Ces autres formes d'amour (dont l'amour homosexuel) sont alors considérées comme {{citation|barbares}} et {{citation|féodales}}{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=7}}.


Bien que l'homosexualité devienne de plus en plus mal perçue dans la société japonaise, certains artistes continuent d'exploiter le thème, mais de façon détournée{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=7-8}}. Le plus célèbre d'entre eux dans le Japon d'avant-guerre est le peintre lyrique [[Kashō Takabatake]] qui travaille notamment pour les magazines ''{{lang|ja-Latn|[[shōnen]]}}'' de l'époque. Les illustrations de garçons qu'il publie pour le magazine ''{{lang|ja-Latn|Nihon shōnen}}'' deviennent rapidement l'image du {{citation|garçon idéal du Japon}}, ou ''{{lang|ja-Latn|[[bishōnen]]}}''. Ce ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' est notamment caractérisé par ses {{citation|ambivalentes passivité, fragilité, fugacité et douceur}}{{sfn|Hartley|2015|id=Hartley 2015|p=22}}, et est généralement représenté dans un monde [[homosocialité|homosocial]], où règne une certaine tension [[homoérotisme|homoérotique]]. La large diffusion des illustrations de Takabatake au sein du public masculin (et dans une moindre mesure féminin{{sfn|Hartley|2015|id=Hartley 2015|p=26}}) homoérotisent sensiblement des environnements masculins, notamment la marine japonaise et quelques établissements scolaires, dont certains sont réputés pour leur {{citation|chasse aux [[éphèbe]]s}}{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=136-137}}. À leur tour ces environnements masculins homoérotiques inspirent des écrivains, dont le célèbre écrivain [[Mori Ōgai]]{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=137}}{{,}}{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=77}}.
== Éditeurs ==


[[Mari Mori]], fille de Mori Ōgai et romancière, rédige une trilogie mettant en scène une histoire homosexuelle entre hommes dont le premier volume, ''A Lovers' Forest'', est publié en 1961. Cette trilogie est généralement considérée comme l'œuvre fondatrice du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=64}}, même si Mori refuse d'être considérée comme la précurseur du genre{{sfn|Hartley|2015|id=Hartley 2015|p=24}}. L'auteur de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' [[Kaoru Kurimoto]] confesse ainsi avoir été directement inspirée par l'œuvre de Mori{{sfn|Nagaike|2012|id=Nagaike 2012|p=37}}. L'œuvre de Mori est influencée par la littérature européenne et notamment la [[Roman gothique|littérature gothique]]{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=67}}, et pose les bases de ce qui plus tard deviendra des [[Lieu commun|lieux communs]] du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', tels que l'exotisme occidental, la haute éducation et richesse des protagonistes, la différence d'âge relativement importante entre les deux membres du couple, ou encore le caractère fantaisiste voire surréaliste de l'environnement{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=65-67}}.
'''Collections'''
{|
|valign="top" width=25%|
* Boy's love de [[Tonkam]]
|valign="top" width=25%|
* Boy's love d'[[Asuka (éditions)|Asuka]]
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* Double H des [[Éditions H]]
|valign="top" width=25%|
* Yaoi de [[Taifu Comics]]
|}


Du côté des mangas, des changements s'opèrent avec la naissance du genre ''{{lang|ja-Latn|[[gekiga]]}}'' en 1957, qui se veut plus réaliste et plus ancré dans la société japonaise. Le ''{{lang|ja-Latn|gekiga}}'' inspire une recherche de rapports humains plus réalistes dans le manga, ce qui ouvre la voie au traitement de la sexualité dans les œuvres non-érotiques et pornographiques{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=7}}. Notamment la mangaka [[Hideko Mizuno]] débute en 1969 le ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' manga ''{{lang|en|[[Fire! (manga)|Fire!]]}}'' qui met en scène l'amour homosexuel masculin dans le milieu du [[rock]] américain et qui érotise ses protagonistes masculins. La même année une autre mangaka, Hiromi Minegishi, publie le manga ''{{lang|ja-Latn|Jūjika}}'' qui est très similaire à ''{{lang|en|Fire!}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=45}}. Toutes les pièces sont désormais en place pour l'établissement du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' en tant que genre à part entière.
'''Magazines de prépublication'''


=== 1970-90 : du ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' au ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ===
{|
Les années 1970 voient l'arrivée d'une nouvelle génération de femmes mangakas de ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas. Les plus célèbres d'entre elles sont collectivement connues sous le nom du [[Groupe de l'an 24]]. Ces dernières introduisent dans les ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas une plus grande diversité de thèmes ainsi que des intrigues et personnages plus profonds. Pour arriver à un tel résultat elles s'inspirent de la littérature, du cinéma, de l'histoire, et des mythes, qui viennent autant du Japon que de l'étranger{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=44}}. Deux d'entre elles, [[Moto Hagio]] et [[Keiko Takemiya]] commencent à travailler sur des histoires mettant en scène l'homosexualité masculine : le manga ''{{lang|en|In the Sunroom}}'' de Takemiya est publié en 1970, suivit en 1971 par ''{{lang|ja-Latn|Le pensionnat de novembre}}'' de Hagio. Ces deux mangas sont considérés comme les premiers d'un nouveau genre ; le ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=47}}.
* ''[[BExBOY Magazine]]'', magazine de prépublication ''yaoi'' (15 numéros depuis [[2009]] - publication terminé depuis [[juillet 2012]]), [[Paris]], [[Asuka (maison d'édition)|Asuka]]
|}


Hagio et Takemiya continuent par la suite à créer de nouveaux mangas ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' et sont rejointes par d'autres mangakas, telles que [[Toshie Kihara]] ou encore [[Ryōko Yamagishi]]{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=51}}. Les deux œuvres ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' de cette époque les plus populaires sont ''[[Le Cœur de Thomas]]'' (1974-75) de Hagio et ''{{lang|ja-Latn|[[Kaze to Ki no Uta]]}}'' (1976-84) de Takemiya{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=51}}. Ces mangas ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' mettent en scène des romances tragiques entre jeunes ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' particulièrement androgynes et se déroulent le plus souvent dans une Europe historique et romantique{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=45}}{{,}}{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=842}}. Bien que normalement destinés aux adolescentes et jeunes femmes, ces premiers ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' attirent aussi un public masculin{{sfn|McLelland|Welker|2015|id=McLelland Welker 2015|p=9}}, ainsi que gay et lesbien<ref>{{Chapitre|auteur1=Karen Merveille|titre chapitre=La révolte du lys|sous-titre chapitre=une odyssée du ''{{lang|ja-Latn|yuri}}''|titre ouvrage=Le manga au féminin|sous-titre ouvrage=Articles, chroniques, entretiens et mangas|lieu=[[Versailles]]|éditeur=Éditions H|collection=Manga {{Formatnum:10000}} images|numéro dans collection=3|passage=65-66|mois=septembre|année=2010|pages totales=256|oclc=753865392|isbn=978-2-9531781-4-2}}.</ref>{{,}}{{sfn|Welker|2006|id=Welker 2006|p=843}}.
'''Revue d'étude'''


C'est aussi pendant les années 1970 qu'apparaissent les premiers magazines gays, dits {{citation|''homo''}}. Le premier d'entre eux est le magazine ''{{lang|ja-Latn|[[Barazoku]]}}''{{sfn|McLelland|2000|id=McLelland 2000|p=136}}, publié pour la première fois en 1971. Ces magazines contiennent de nombreuses illustrations, fictions littéraires et mangas d'artistes tels que [[Gengoroh Tagame]] ou [[Sadao Hasegawa]]{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=141}}. Ces fictions partagent des points communs avec les ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' : les histoires sont des fantaisies peu réalistes, généralement tragiques{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=141}}. Mais si certaines d'entre elles reprennent le stéréotype du ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' similaire aux ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'', les fictions {{citation|''homo''}} offrent une large variété de stéréotypes, avec par exemple des personnages plus virils ou plus âgés. Les fictions gays sont aussi généralement moins romantiques et plus érotiques ou pornographiques que peuvent l'être les ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}''{{sfn|McLelland|2000|id=McLelland 2000|p=142-145}}. Si ces magazines {{citation|''homo''}} sont principalement à destination des hommes homosexuels ou bisexuels, ils attirent aussi un lectorat féminin{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=52}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=9}}, notamment Takemiya s'inspire du contenu du magazine ''{{lang|ja-Latn|Barazoku}}'' pour créer ses mangas ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=62}}.
{|
* ''Homosexualité et manga : le yaoi'', Manga 10 000 Images, [[Versailles]], Éditions H, [[2008]]
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En 1975 a lieu la première ''{{lang|en|[[Comic Market]]}}'', un rassemblement d'artistes amateurs, organisés en cercles ''{{lang|ja-Latn|[[dōjinshi]]}}'' qui produisent mangas, fictions littéraires, animes et jeux vidéo. Les adolescentes constituent la majorité des participants des premières éditions de la ''{{lang|en|Comic Market}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=54}}, ces dernières sont surtout fans des productions (''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' ou non) du Groupe de l'an 24, mais aussi des groupes de [[glam rock]] et de [[hard rock]] occidentaux, devenus populaires chez les adolescentes à la suite des mangas tels que ''{{lang|en|Fire!}}''. Les premières productions ''{{lang|ja-Latn|dōjinshi}}'' sont surtout des parodies des mangas du Groupe de l'an 24 ou d'artistes et de groupes de rock tels que [[David Bowie]], ''{{lang|en|[[Led Zepplin]]}}'' ou ''{{lang|en|[[Queen]]}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=54}}. Sous l'influence des ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' et des magazines {{citation|''homo''}}, certains ''{{lang|ja-Latn|dōjinshi}}'' deviennent de plus en plus homoérotiques puis ouvertement homosexuels. Par exemple un ''{{lang|ja-Latn|dōjinshi}}'' nommé ''{{lang|en|Island}}'' publié en 1979 représente les deux membres de ''{{lang|en|Led Zepplin}}'' [[Jimmy Page]] et [[Robert Plant]] en train de s'embrasser{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=54-56}}. Le terme ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', d'abord utilisé par certains cercles pour qualifier de façon ironique leur créations, devient associé à l'homosexualité masculine en 1979 par le cercle ''{{lang|ja-Latn|Ravuri}}'' qui produit le ''{{lang|ja-Latn|dōjinshi}}'' homoérotique nommé ''{{lang|ja-Latn|RAPPORI: yaoi tokushū gō}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=55-56}}.
== Mangas ==
{|


Face au succès des ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' et premiers ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', des éditeurs veulent exploiter le marché en créant des magazines consacrés au genre. L'éditeur San shuppan, qui publiait déjà le magazine {{citation|''homo''}} ''{{lang|ja-Latn|Sabu}}'' lance en 1978 le magazine ''{{lang|ja-Latn|[[June (magazine)|June]]}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=59-60}}, suivit par le magazine ''Allan'' en 1980{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=61}}. Ces deux magazines se spécialisent dans la publication de ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'', qu'ils décrivent comme étant {{citation|à mi-chemin entre la littérature ''{{lang|ja-Latn|tanbi}}'' et la pornographie}}{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=59}}. Ces magazines parlent dans leurs articles à la fois de l'homosexualité masculine et du rock et publient des mangas, fictions littéraires et illustrations produits à la fois par des membres du Groupe de l'an 24, des auteurs de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' amateurs et des artistes débauchés de magazines {{citation|''homo''}}{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=60-62}}. Le succès du magazine ''{{lang|ja-Latn|June}}'' est tel que le terme ''{{lang|ja-Latn|June-mono}}'' ou plus simplement ''{{lang|ja-Latn|June}}'' commence à concurrencer le terme ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' pour décrire les fictions homosexuelles masculines{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=62}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=8-9}}.
=== Séries ===
{|
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Deux changements majeurs s'opèrent dans le cours des années 1980 dans les ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' et ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' : dans la scène ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' les ''{{lang|ja-Latn|[[shōnen]]}}'' mangas sont de plus en plus souvent parodiés, principalement ceux du magazine ''{{lang|ja-Latn|[[Weekly Shōnen Jump|Shōnen Jump]]}}''. Le manga/anime ''{{lang|en|[[Captain Tsubasa]]}}'' devient extrêmement populaire et illustre un changement de paradigme dans le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ; l'action se déroule désormais majoritairement au Japon, et non plus en Occident{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=57}}. Du côté du ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' on note aussi une dé-occidentalisation des intrigues, qui deviennent plus réalistes et positives tant dans leurs contextes que leurs graphismes, avec des protagonistes plus âgés que précédemment. ''{{lang|en|[[Banana Fish]]}}'' (1985-1994) d'[[Akimi Yoshida]] et ''{{lang|ja-Latn|Tomoi}}'' (1986) de Wakuni Akisato marquent ce changement{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=51}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=8}}.
* ''[[Comme un chat sur un sol]]'' de [[Tooko Miyagi]] (3 tomes)
* ''[[Crimson spell]]'' de [[Ayano Yamane]] (5 tomes - en cours)
* ''[[Fake (manga)|Fake]]'' de Sanami Matoh (7 tomes)
* ''[[Gakuen Heaven]]'' de You Higuri (4 tomes)
* ''[[Gravitation (manga)|Gravitation]]'' de ''Maki Murakami'' (12 tomes)
* ''[[Gravitation (manga)|Gravitation extra (Gravitation Ex)]]'' de ''Maki Murakami'' (1 tome - en cours)
* ''[[Hana wa saku ka]]'' de Hidaka Shoko (2 tomes)
* ''[[Haru wo daiteita]]'' de [[Nitta Youka]] (14 tomes)
* ''[[Junjou Romantica]]'' de Nakamura Shungiku (12 tomes)
* ''[[Kizuna]]'' de [[Kazuma Kodaka]] (11 tomes)
* ''[[La esperança]]'' de Chigusa Kawai (7 tomes)
* ''[[Le jeu du chat et de la souris]] (Kyuuso Ha Cheese no Yumeomiru)'' et sa suite (''Sojou no koi wa nido haneru'') de [[Setona Mizushiro]] (2 tomes)
* ''[[Love Mode]]'' de Shimizu Yuki (11 tomes)
* ''[[Loveless (manga)|Loveless]]'' de Yun Kouga (9 tomes - en cours)
* ''[[Love pistols (Sex pistols)]]'' de Tarako Kotobuki (6 tomes - en cours)
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* ''[[Maka-maka]]'' de Tarajiro (2 tomes)
* ''[[Okane ga nai|No Money (Okane ga nai)]]'' de Tohru Kousaka (8 tomes)
* ''[[Sakura Gari]]'' de [[Yū Watase]] (3 tomes)
* ''[[Scratch Marks of Love (Koi no Tsumeato)]]'' de Mieko Koide (3 tomes)
* ''[[Sekaiichi Hatsukoi]]'' de Nakamura Shungiku (8 tomes)
* ''[[Seule la fleur sait...]]'' de Takarai Rihito (3 tomes)
* ''Seven days'' de Takarai Rihito (2 tomes)
* ''[[Stupid story]]'' de Ana Hollmann (3 tomes)
* ''[[Summit (manga)|Summit]]'' de Lee Young Hee (7 tomes)
* ''[[Tendre voyou (Warui koto shitai)]]'' de [[Mei Sakuraga]] (8 tomes - en cours)
* ''[[The Tyrant Who Fall In Love (Koisuru Bou-kun)]]'' de [[Hinako Takanaga]] (8 tomes - en cours)
* ''[[Totally Captivated]] '' de YOO Ha jin (6 tomes)
* ''[[Yellow (manga)|Yellow]]'' de Makoto Tateno (4 tomes)
* ''[[Yumeno kadomo]]'' (Children's dream) de Hamada Shoko (6 tomes)
* ''[[ZE]] '' de Shimizu Yuki (11 tomes)
* ''[[Zetsuai 1989]]'' de [[Minami Ozaki]] (5 tomes)
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=== 1990-2000 : explosion du ''{{lang|en|boys' love}}'' et controverse ===
=== One shot ===
Le succès de plus en plus grandissant des ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' intéresse les éditeurs de magazines, qui recrutent plusieurs auteurs de ''{{lang|ja-Latn|yaoi dōjinshi}}''{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=63}}. Les années 1990 voient l'explosion des magazines consacrés au ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', ainsi entre 1990 et 1995, ce n'est pas moins d'une trentaine de magazines consacrés au ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' qui voient le jour{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=64}}. Si certains magazines ont une courte existence, d'autres s'imposent, tel ''{{lang|en|[[BExBOY]]}}'' qui devient l'un des principaux magazines ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' des années 1990{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=9}}. Les mangas de ces magazines sont essentiellement influencés par les ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' et les mangas tels que ''{{lang|en|Banana Fish}}'', ils s'éloignent de plus en plus des standards ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' des années 1970 et début 1980{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=64}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=10}}. Ces magazines disent publier du {{citation|''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''}} ou du {{citation|''{{lang|en|boys' love}}''}}, le terme {{citation|''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}''}} qui était déjà concurrencé par le terme {{citation|''{{lang|ja-Latn|June}}''}} tombe définitivement en désuétude, notamment à cause de sa connotation pédophile, le terme {{citation|''{{lang|ja-Latn|June}}''}} est lui aussi petit à petit remplacé du fait qu'il est lié au magazine éponyme. Finalement les deux termes {{citation|''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''}} et {{citation|''{{lang|en|boys' love}}''}} s'imposent sur le marché et deviennent plus ou moins synonymes{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=65-66}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=10}}. En plus des mangas, on assiste à la multiplication des œuvres ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' sur d'autres supports, tels que les ''{{lang|ja-Latn|[[anime]]}}'', les ''{{lang|en|drama CD}}'' et les ''{{lang|en|[[light novel]]s}}''. C'est aussi durant cette période que les librairies japonaises commencent à créer des rayons consacrés intégralement au genre{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=64-65}}.
{|
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* ''[[Antique Bakery]]'' de [[Fumi Yoshinaga]]
* ''[[Ai no Kotoba]]'' de Rie Honjô
* ''[[Amayakana Toge]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Après l'orage (Arashi No Ato)]]'' de Shoko Hidaka
* ''[[Boy's Next Door]]'' de [[Kaori Yuki]]
* ''[[Caffe latte rhapsody]]'' (カフェラテ・ラプソディ) de [[Tôko Kawai]]
* ''[[Color (manga)|Color]]'' de [[Eiki Eiki]] et Taishi Zaou (pseudo de Mikiyo Tsuda)
* ''[[CUT]]'' de Toko Kawai
* ''[[Dear Myself]]'' de [[Eiki Eiki]]
* ''[[Doushitemo Furetakunai]]'' de [[Kou Yoneda]]
* ''[[Entre les draps]]'' de Erica Sakuragawa
* ''[[Electric hands]]'' de Taishi Zaou
* ''[[Escape (manga)|Escape]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Finder (manga)|Finder]]'' de [[Ayano Yamane]]
* ''[[Flower That Blooms In His Garden]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Fragments d'amour (Honoka na Koi no Danpen Wo)]]'' de Duo Brand
* ''[[Gokujo no Koibito]]'' de Minase Masara
* ''[[Hidoi Otoko]]'' de Minase Masara
* ''[[Ikoku Irokoi Romantan]]'' de [[Ayano Yamane]]
* ''In The End'' par le groupe Pink Psycho (Heath & Nheira)
* ''[[Juste au coin de la rue (Ano Kado wo Magatta Tokoro)]]'' de Tôko Kawai
* ''[[Kôjitusei No Tobira]]'' (Le syndrome du tournesol) de Shoowa
* ''[[Le Jardin de lierre]]'' de Setsuko Katoh
* ''[[Le Labyrinthe des Sentiments]]'' de Yoneda Kou
* ''[[Les larmes d'ange (Tränen eines Engels)]]'' d'Olga Rogalski
* ''[[Lover's Doll]]'' de Kazuhiko Mishima
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* ''[[Love me Hard]]'' de Rie Honjô
* ''[[Name of Love]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Night walk]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Nouveau départ]]'' de Yukari Yashiki
* ''[[Playback (manga)|Playback]]'' de Shimaji
* ''[[Pure Love]]'' de Row Takakura
* ''[[Réminiscences (Sono Kuchibiru ni yoru no tsuyu)]]'' de Yuki Fukai
* ''[[Révélations (Mikkoku)]]'' par Tamaji Fuji
* ''[[Say Please (プリーズ)]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Sensitive Pornograph]]'' de Ashika Sakura
* ''[[Si ton rêve se réalise (Negai Kanaeba)]]'' de Romuco Miike
* ''[[Silence (manga)|Silence]]'' de Azuma Takamiya
* ''[[Shortcut Love]]'' de Minase Masara
* ''[[Student affair]]'' de Row Takakura
* ''[[Sugarmilk]]'' de Jaryu Dokuro
* ''[[Sumanai Masumi-kun!]]'' de Itsuki Kaname
* ''[[Tango (manga)|Tango]]'' de Est Em
* ''[[The Path to Love]]'' de Ren Kitakami
* ''[[Toxic (manga)|Toxic]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Tu es à croquer]]'' de Yaya Sakuragi
* '' [[Two of Heart (Te Wo Tsunaide, Sora Wo)]]'' de Kano Miyamoto
* ''[[Unbalanced Heat]]'' de Minase Masara
* ''[[Uso to Kiss]]'' de Minase Masara
* ''[[Wild Rock]]'' (ワイルド・ロック) de Kazusa Takashima
* ''[[World's End]]'' de [[Eiki Eiki]]
|}


Dans la continuité de ''{{lang|en|Banana Fish}}'' et ''{{lang|ja-Latn|Tomoi}}'', de plus en plus de ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas intègrent des éléments ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' dans leurs intrigues sans en faire le cœur de l'histoire, avec par exemple le collectif [[CLAMP]] qui publie plusieurs mangas contenant des éléments ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', tels que ''[[RG Veda]]'' (1990-95), ''[[Tokyo Babylon]]'' (1991-94) ou encore ''{{lang|en|[[Cardcaptor Sakura]]}}'' (1996-2000). Les ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas de CLAMP font partie des premiers mangas plus ou moins ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' à s'exporter en Occident, et notamment en France. Si aux [[États-Unis]] les éléments ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' de ''{{lang|en|Cardcaptor Sakura}}'' ont été censurés, cela n'a pas été le cas en France{{sfn|Sylvius|2008|id=Sylvius 2008|p=20-23}}.
=== Animes ===
{|
|valign="top" width=25%|
* ''[[Ai no kusabi]]'' (Hard Yaoi)
* ''[[Angel Feather]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Antique Bakery]]''
* ''[[Be-boy kidnapp'n Idol]]''
* ''[[Boku no Pico]]'' (Hard Yaoi)
* ''[[Boku no Sexual Harassment]]'' (Yaoi)
* ''[[Boku wa Kono Mama Kaeranai]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Bronze Zetsuai 1989]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Bronze : Cathexis]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Close the Last Door!]]''
* ''[[Earthian]]''
* ''[[Enzai]]'' (Shota)
* ''[[Fake]]''
* ''[[Fujimi Orchestra]]''
* ''[[Fuyu No Semi]] ''
* ''[[Fish in the Trap]]''
* ''[[Gakuen Heaven]] '' (Shonen Ai)
* ''[[Gokujô no koibito]]|'' (Comic-Movie)
* ''[[Gravitation (manga)|Gravitation]]''
* ''[[Haru Wo Daiteita]]''
* ''[[Houkago no Shokuinshitsu]]''
* ''[[Hey, Class President!]]''
* ''[[Hybrid Child]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Ikoku Irokoi Romantan]]''
* ''[[Junjou Romantica]]'' (Yaoi)
* ''[[Kachou no Koi]]''
* ''[[Kashou no Tsuki]]'' (Shonen Ai)
|valign="top" width=25%|
* ''[[Kaze to ki no uta]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Kimera]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Kirepapa]]''
* ''[[Kizuna]]''
* ''[[Koi suru bokun]]''
* ''[[Kusatta Kyoushi no Houteishiki]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Level C]]''
* ''[[Loveless]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Mirage Blaze]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Marginal Prince]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Maiden Rose]]'' (Yaoi)
* ''[[Okane ga nai]]'' (Yaoi)
* ''[[Papa to kiss in the dark]]'' (Yaoi/Shota?)
* ''[[Ryokunohara Meikyuu]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Sekimatsu Darling]]''
* ''[[Sekaiichi Hatsukoi]]''
* ''[[Sensitive Pornograph]]'' (Hard Yaoi)
* ''[[Sex Pistols]]''
* ''[[Suki na mono wa suki dakara shōganai]]'' (Shonen Ai)
* ''[[The Legend of the Blue Wolves]]''
* ''[[Tight rope]]''
* ''[[Togainu no Chi]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Uragiri wa Boku no Namae wo Shitteiru]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Viewfinder]]'' (Animix)
* ''[[Yami no Matsuei]]'' (Shonen Ai)
* ''[[Yebisu celebrities]]''


Entre 1992 et 1996 a lieu la {{japonais|controverse du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''|やおい論争|yaoi ronsō}}, un important débat par essais interposés dans le magazine féministe ''Choisir''{{sfn|Ishida|2015|id=Ishida 2015|p=214}}. Ce débat oppose d'une part des militants gays et des militantes féministes, qui accusent le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' d'être [[homophobie|homophobe]] en donnant une vision viciée de l'homosexualité masculine{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=70}}{{,}}{{sfn|Nagaike|Aoyama|2015|id=Nagaike Aoyama 2015|p=124}}, et d'être [[hétérosexisme|hétérosexiste]] en renforçant la [[misogynie]] de la société japonaise{{sfn|Ishida|2015|id=Ishida 2015|p=223-224}}. D'autres part se trouvent des auteurs et éditeurs de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'', soutenus par des militants féministes et lesbiennes{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=76}}, qui estiment que le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' est une fantaisie féminine qui n'a pas pour but de décrire l'homosexualité masculine ni d'être réaliste{{sfn|Ishida|2015|id=Ishida 2015|p=215-216}}, et présentent cette fantaisie comme un refuge face à la misogynie de la société{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=71}}, par ailleurs ils adoptent un discours ''{{lang|en|[[queer]]}}'' de confusion des genres, sexes et sexualités{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=73}} et considèrent que ce sont leurs opposants qui font preuve d'hétérosexisme{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=72}}.


Cette controverse fait partie des premières {{citation|études du BL}}, un champ d'étude des sciences humaines sur le BL, qui est désormais considéré comme un pan important de la culture japonaise{{sfn|Nagaike|Aoyama|2015|id=Nagaike Aoyama 2015|p=120}}. Les premières études débutent en 1991 et se focalisent sur l'étude [[psychanalyse|psychanalytique]] de la psyché féminine et sur le rapport entre les femmes et la [[féminité]] dans la société japonaise{{sfn|Nagaike|Aoyama|2015|id=Nagaike Aoyama 2015|p=121}}. La controverse ouvre quant à elle la voie sur l'étude du traitement des minorités dans les BL{{sfn|Nagaike|Aoyama|2015|id=Nagaike Aoyama 2015|p=123-126}}. La controverse a un impact certain sur les créateurs de ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' : par exemple l'écrivaine Kurihara Chiyo abandonne le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' pour se réorienter vers la pornographie hétérosexuelle pour femme, quand d'autres autrices, comme Takamatsu Hisako ont pris en compte les arguments de leurs contradicteurs gays, afin de rendre leurs fictions plus admissibles pour un public gay{{sfn|Vincent|2007|id=Vincent 2007|p=76}}.


=== Depuis les années 2000 : mondialisation du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' ===
|}
La crise économique de la [[Décennie perdue (Japon)|décennie perdue]] commence à toucher le secteur du manga tout à la fin des années 1990 et au début des années 2000, mais le ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' n'est pas affecté par le phénomène de récession globale du marché, au contraire les magazines BL continuent de se développer{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=10}}. Les rayonnages et étages des librairies intégralement consacrés au ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' sont eux aussi en progression{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=142}}, avec notamment la naissance de la {{japonais|''{{lang|en|[[otome road]]}}''|乙女ロード|otome rōdo|route des filles}} en 2004, une rue du quartier [[Ikebukuro]] à [[Tokyo]], connue pour ses nombreux magasins consacrés au BL{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=65}}. Le lectorat masculin, jusqu'à présent minoritaire, est lui aussi en progression ; en 2008 certaines librairies estiment que leur lectorat masculin du BL se situe entre 25 et 30%{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=142}}.


[[Image:Yaoi Books by miyagawa.jpg|vignette|alt=Photo couleur d'une étagère remplie de mangas.|Section « ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' » dans une librairie [[Kinokuniya]] à [[San Francisco]].]]
== Voir aussi ==
La production du BL se développe à l'international, on parle alors de {{citation|''{{lang|en|global BL}}''}} ou de {{citation|''{{lang|en|gloBL}}''}} pour distinguer les productions non-japonaises de BL<ref name=tina>{{interview|last=Tina Anderson |interviewer=Bamboo, Casey, Sara|title=GloBL and Gay Comics |url=http://www.animenewsnetwork.cc/chicks-on-anime/2008-11-25 |program={{lang|en|Chicks on Anime}} |callsign={{lang|en|[[Anime News Network]]}} |date=25 novembre 2008 |accessdate=15 novembre 2015}}</ref>. Le mouvement commence aux États-Unis en 2001 avec l'établissement de la convention ''{{lang|en|YaoiCon}}'' qui a lieu chaque année à [[San Francisco]] en [[Californie]]{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=67}}{{,}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=11}}. À partir de 2004 des éditeurs américains commencent à recruter des auteurs américains ou coréens afin de produire des mangas BL, tels que {{lang|en|Yaoi Press}}, {{lang|en|801 Media}}, ou encore {{lang|en|Yaoi House}}{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=11}}. Un magazine américain, nommé ''{{lang|en|Yaoi Magazine}}'' débute en 2008{{sfn|Brient|2008|id=Brient 2008|p=11}}. Le développement du marché du BL et du ''{{lang|en|gloBL}}'' aux États-Unis est très rapide au cours des années 2000, avant d'accuser une stagnation à partir de 2008. Cette stagnation est attribuée à la fois à la [[Crise économique mondiale des années 2008 et suivantes|crise économique mondiale]] mais aussi à l'exigence des fans : les éditeurs ne peuvent plus se contenter d'éditer le premier BL venu, ils doivent s'orienter vers des titres de qualité. Malgré cette stagnation, le marché américain continue à se développer lentement au cours des années qui suivent{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}{{,}}{{sfn|Welker|2015|id=Welker 2015|p=67}}.
* [[Boy's Love|BL]]

* [[Yuri]]
La [[Corée du Sud]] développe aussi ses propres [[manhwa]]s BL : en 2002 paraît l'anthologie ''{{lang|en|YOUTH}}({{lang|ko|야오이 단편집}})'' intégralement constituée de BL<ref>{{Article|langue=en|auteur1=Amarythia|titre={{lang|en|An Introduction to Korean Manhwa}}|périodique=Aestheticism.com|jour=6|mois=février|année=2004|lire en ligne=http://caseybrienza.com/BRIENZA_MANHWA.pdf|format=pdf}}.</ref>, puis la ''{{lang|ko-Latn|manhwaga}}'' Park Hee Jung commence à intégrer des éléments ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' dans ses manhwas, tels que ''Martin et John'' publié en 2006, et la même année paraît la série BL ''{{lang|en|Crush on you}}'' de Lee Kyung Ha{{sfn|Sylvius|2008|id=Sylvius 2008|p=36-37}}.

En [[Allemagne]], les éditeurs profitent du {{citation|manga boom}} que connaît le pays pendant les années 2000 pour tenter de développer la bande dessinée allemande dont le marché peine à décoller. Ainsi les éditeurs [[Egmont Ehapa Verlag|Egmont]], [[Carlsen (maison d'édition)|Carlsen]] et la filiale allemande de [[Tokyopop]] recrutent des auteurs locaux inspirés par les mangas japonais afin de créer des mangas allemands{{sfn|Malone|2009|id=Malone 2009}}. Les premiers mangas sont créés par des hommes et sont à destination d'un public masculin, mais ne rencontrent pas le succès, aussi les éditeurs se tournent alors vers les femmes mangakas et le lectorat féminin. Cette seconde génération de mangas allemands rencontre cette fois le succès, au point que Paul M. Malone de l'[[université de Waterloo]] compare ces femmes mangakas au [[Groupe de l'an 24]]. À l'instar du Groupe de l'an 24, ces mangakas investissent le genre du BL, qui ne rencontre aucune résistance de la part du lectorat ; le marché allemand de la bande dessinée étant déjà habitué à l'homosexualité, notamment grâce à [[Ralf König]], l'un des rares auteurs de bande dessinée allemande ayant connu le succès, qui dépeint l'homosexualité dans ses BD depuis les années 1980. Parmi ces ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}'' mangas allemands, on peut citer ''Shanghai Passion'' (2005) par Ying Zhou Cheng ou encore ''{{lang|en|[[Stupid Story]]}}'' (2008-2012) par Anna Hollmann. Outre les gros éditeurs, de plus petits éditeurs se spécialisent dans le genre, tels que {{lang|de|Schwarzer Turm}}, {{lang|en|Fireangels}} ou {{lang|en|The Wild Side}}. Ces petits éditeurs ont la particularité d'être très liés à la scène ''{{lang|ja-Latn|[[dōjinshi]]}}'' allemande, leurs mangakas publiant sous le pseudonyme qu'ils utilisent auprès de la communauté.

En France, se tient en [[novembre 2016]] à [[Villejuif]] ([[Île-de-France]]) une convention sur le ''yaoi'', rassemblant plusieurs centaines de personnes, en grande majorité des jeunes femmes. Le yaoi ne fait par exemple pas l'unanimité dans des conventions plus générales consacrées à la [[culture japonaise]] contemporaine, comme la ''[[Japan Expo]]''<ref>Morgane Tual, « Le « Yaoi », des mangas homo-érotiques qui passionnent les jeunes femmes », ''[[Le Monde]]'', 19 novembre 2016 ([https://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/11/19/le-yaoi-des-mangas-homo-erotiques-qui-passionnent-les-jeunes-femmes_5034324_4408996.html lire en ligne])</ref>.

En [[Suisse romande]], des conventions annuelles existent depuis [[2017]], mises sur pied à [[Lausanne]] par l'association Yaoi Generation et l'auteure de yaoi MRB. Elles rassemblent plusieurs centaines de personnes, surtout des jeunes femmes, mais également des hommes. Étant donné le caractère explicite des ouvrages, la convention n'est ouverte qu'aux plus de 16 ans. Des artistes internationaux et des éditeurs de yaoi sont invités à chacune de ces conventions ; comme Hamlet Machine, auteure américaine de Starfighter<ref>{{Lien web |titre=Starfighter |url=https://starfightercomic.com/ |site=starfightercomic.com |consulté le=2023-02-24}}</ref> en 2017 et 2022, Amandine Martel, traductrice française de Manga en 2018, Creative Alchemy en 2020 et Clover Doe en 2020 et 2021. Depuis 2021, la presse suisse commence à s'intéresser au genre yaoi et aux conventions, avec des articles dans les journaux romands [[24 Heures (Suisse)|24 heures]]<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Phénomène dans la bande dessinée – Le Yaoi, un manga qui redessine l’amour au masculin |url=https://www.24heures.ch/le-yaoi-un-manga-qui-redessine-lamour-au-masculin-627966881398 |site=24 heures |consulté le=2023-02-24}}</ref>, [[l'Illustré]]<ref>{{Lien web |langue=fr-CH |titre=«Boys’ Love»: la nouvelle libération sexuelle |url=https://www.illustre.ch/magazine/boys-love-la-nouvelle-liberation-sexuelle-529937 |site=Illustre |consulté le=2023-02-24}}</ref> , La [[Tribune de Genève]]<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Phénomène dans la bande dessinée – Le Yaoi, un manga qui redessine l’amour au masculin |url=https://www.tdg.ch/le-yaoi-un-manga-qui-redessine-lamour-au-masculin-627966881398 |site=Tribune de Genève |consulté le=2023-02-24}}</ref> mais aussi un article en allemand dans l'hebdomadaire national [[Migros Magazine]].

== Édition ==
=== Japon ===
Alors que les mangas japonais BL ont été adaptés au cinéma et en séries télévisées depuis le début des années 2000, ces œuvres étaient commercialisées auprès d'un public cible fans de BL plutôt que vers un public général. Lorsque ces œuvres étaient adaptées pour un public général, les scènes de romance homosexuelle étaient généralement minimisées ou entièrement supprimées, comme dans l'adaptation télévisée d’''[[Antique Bakery]]'' diffusée sur [[Fuji Tv]] en 2001<ref name="PostSeven" />. Le développement de nouvelles séries télévisées japonaises qui se concentrent explicitement sur les thèmes de la BL et de la romance homosexuelle a été stimulé par les critiques positives et du succès de la série télévisée [[TV Asahi|Asahi]] ''[[Ossan's Love]]'' (2016), qui présente un [[triangle amoureux]] entièrement masculin comme intrigue principale{{sfn|Fujimoto|2015|id=Fujimoto 2015}}. Bien qu’''Ossan's Love'' soit une série originale, elle a influencé la création d'œuvres BL adaptées à partir de mangas qui sont commercialisées auprès d'un public de masse. Des exemples notables incluent les séries télévisées ''The Pornographer'' (2018) sur Fuji Tv, ''What Did You Eat Yesterday?'' (2019) sur [[TV Tokyo]], et ''Cherry Magic! Trente ans de virginité peuvent faire de vous un sorcier!'' (2020) sur TV Tokyo, et l'adaptation télévisée de ''[[Le Jeu du chat et de la souris]]'' (2020)<ref name="PostSeven">{{Lien web |langue=ja |titre=男性同士の恋愛描く「BL」作品がメジャー化した理由 |url=https://www.news-postseven.com/archives/20201004_1600668.html?DETAIL |website=News Post Seven |consulté le=5 January 2021 |date=4 October 2020}}</ref>.

=== ''{{lang|ja-Latn|Yaoi dōjinshi}}'' ===
{{...}}

=== ''{{lang|en|Global BL}}'' ===
Le terme ''{{lang|en|Global BL}}'', ou sa version contractée ''{{lang|en|gloBL}}'', désigne les productions BL non-japonaises, qu'elles soient professionnelles ou amateurs, et dans une moindre mesure le terme s'applique aussi à la réappropriation et l’adaptation par les éditeurs et les fans non-japonais des BL japonais{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}.

Les ''{{lang|en|gloBL}}'' reprennent la plupart des conventions des BL, notamment la dynamique ''{{lang|ja-Latn|seme}}''/''{{lang|ja-Latn|uke}}'' et la {{citation|mise en couple}} associée, les protagonistes de type ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' ou encore la fantaisie du ''{{lang|ja-Latn|yaoi}}''{{sfn|Fermin|2013|id=Fermin 2013}}. Mais le ''{{lang|en|gloBL}}'' possède aussi certaines différences avec le BL, notamment la logique de l'exotisme est inversée ; si les BL font appel à l'exotisme occidental et arabe{{sfn|Nagaike|2009|id=Nagaike 2009}}, les ''{{lang|en|gloBL}}'' font appel à l'exotisme extrême-oriental, principalement le Japon, mais aussi la Chine et la Corée{{sfn|Malone|2009|id=Malone 2009}}.

Certaines différences entre ''{{lang|en|gloBL}}'' et BL dépendent du pays : en Allemagne les auteurs de ''{{lang|en|gloBL}}'' tentent de mimiquer le plus possible les mangas japonais au nom d'une {{citation|fausse authenticité}} et au détriment de l'innovation{{sfn|Malone|2009|id=Malone 2009}}. Au contraire les ''{{lang|en|gloBL}}'' américains prennent des libertés par rapport aux mangas japonais, notamment le découpage des planches et le volume des textes suivent les standards des ''{{lang|en|[[Comics]]}}'', de plus les scènes de sexe des ''{{lang|en|gloBL}}'' américains tendent à être graphiquement plus explicites et à moins suivre la convention ''{{lang|ja-Latn|seme}}''/''{{lang|ja-Latn|uke}}'' que leurs équivalents japonais{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}. En autre différence des ''{{lang|en|gloBL}}'' américains : les éditeurs pratiquent une censure en évitant des thèmes relativement courants dans les BL japonais mais qui peuvent porter à controverse en Amérique, notamment les relations [[inceste|incestueuses]] et le ''{{lang|ja-Latn|[[shotacon]]}}''{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}.

Une autre différence majeure entre les ''{{lang|en|gloBL}}'' et les BL concerne le traitement de l'homosexualité et de l'identité gay en elles-mêmes. Au Japon les BL ont une relation ambiguë avec la communauté LGBT et ne cherchent généralement pas à décrire l'homosexualité masculine ou une quelconque identité gay. Ils cohabitent avec les productions de type ''{{lang|en|[[men's love]]}}'' (ML), qui sont publiées dans des rayons voire boutiques différents{{sfn|de Bats|2008|id=de Bats 2008|p=143-144}}. Au contraire, que ce soit en Amérique, en Allemagne ou même aux [[Philippines]], les fans et éditeurs considèrent les BL et ''{{lang|en|gloBL}}'' comme indubitablement gays, même s'ils connaissent la situation au Japon{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}{{,}}{{sfn|Malone|2009|id=Malone 2009}}{{,}}{{sfn|Fermin|2013|id=Fermin 2013}}. Ainsi les fans non-japonais ont des difficultés à appréhender le fait que les ''{{lang|ja-Latn|bishōnen}}'' seraient des {{citation|femmes dans des corps d'hommes}} ou un troisième sexe{{sfn|Fermin|2013|id=Fermin 2013}}. Les ''{{lang|en|gloBL}}'' philippins ont tendance à avoir des protagonistes qui s'identifient comme "gay" et qui doivent faire face à l'homophobie de la société{{sfn|Fermin|2013|id=Fermin 2013}}. L'éditeur américain {{lang|en|Yaoi Press}} cherche à toucher le public gay en plus du public féminin{{sfn|Pagliassotti|2009|id=Pagliassotti 2009}}. En Allemagne l'éditeur {{lang|de|Männerschwarm}}, spécialisé dans la vente de contenu LGBT, publie des productions BL au côté des productions LGBT typiquement occidentales{{sfn|Malone|2009|id=Malone 2009}}. Et d'une façon générale, les lecteurs non-japonais de BL soutiennent les causes LGBT et sont ouverts à l'homosexualité, ce qui est loin d'être le cas au Japon{{sfn|Fermin|2013|id=Fermin 2013}}. De plus les éditeurs occidentaux ne font pas de distinction entre les ML et BL : les rares ML publiés en Amérique ne sont pas publiés en tant que ML, mais en tant que BL{{sfn|Brenner|Wildsmith|2011|id=Brenner Wildsmith 2011|p=98}}.

== Annexes ==
=== Articles connexes ===
* ''{{lang|ja-Latn|[[Dōjinshi]]}}''
* [[Homosexualité dans la bande dessinée]]
* [[Homosexualité dans la bande dessinée]]
* ''{{lang|en|[[Men's love]]}}''
* [[Slash (fiction)|Slash]]
* ''{{lang|en|[[Slash (fiction)|Slash]]}}''
* [[Dōjinshi]]
* ''{{lang|ja-Latn|[[Yuri]]}}''
* [[Bara (genre)|Bara]]

=== Bibliographie ===
==== Publications académiques ====
* {{Article|langue=ja|auteur1=Yukari Fujimoto|titre={{lang|ja|少女マンガにおける「少年愛」の意味}}|traduction titre=Le sens des ''{{lang|ja-Latn|shōnen'ai}}'' dans les ''{{lang|ja-Latn|shōjo}}'' mangas|périodique=ニュー・フェミニズム・レビュー|volume=2|titre numéro={{lang|ja|女と表現──フェミ ニズム批評の現在}}|pages=280-284|mois=mai|année=1991|lire en ligne=http://www.matt-thorn.com/shoujo_manga/fujimoto.php|id=Fujimoto 1991}}.
* {{Ouvrage |langue=en |auteur1=Mark McLelland |titre=Male homosexuality in modern Japan |sous-titre={{lang|en|cultural myths and social realities}} |lieu=Richmond |éditeur=Curzon |année=2000 |pages totales=265 |isbn=978-0-7007-1300-4 |oclc=70724264 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=iESgtRO728IC&printsec=frontcover |id=McLelland 2000}}.
* {{Article|langue=en|auteur1=James Welker|titre={{lang|en|Beautiful, Borrowed, and Bent: “Boys’ Love” as Girls’ Love in}} ''{{lang|ja-Latn|Shōjo Manga}}''|éditeur={{lang|en|[[University of Chicago Press]]}}|périodique=[[Signs (journal)|Signs]]|volume=31|numéro=3|titre numéro={{lang|en|New Feminist Theories of Visual Culture}}|pages=841-870|année=2006|oclc=437159155|doi=10.1086/498987 |id=Welker 2006}}.
* {{Article|langue=en|auteur1=Keith Vincent|titre={{lang|en|A Japanese Electra and Her Queer Progeny}}|éditeur=[[Université du Minnesota]]|périodique=Mechademia|numéro=2|titre numéro={{lang|en|Networks of Desire}}|pages=64-79|mois=décembre|année=2007|oclc=271760622|isbn=978-0-8166-5266-2|id=Vincent 2007}}.
* {{Ouvrage |langue=en |prénom1=Mark |nom1=McLelland |directeur1=oui |titre=Japanese Transnational Fandoms and Female Consumers |éditeur=[[Université nationale australienne]] |collection=Intersections |numéro dans collection=20 |année=2009 |mois=avril |isbn= |issn=1440-9151 |lire en ligne=http://intersections.anu.edu.au/issue20_contents.htm}}
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Kazumi Nagaike|titre={{lang|en|Elegant Caucasians, Amorous Arabs, and Invisible Others}}|sous-titre={{lang|en|Signs and Images of Foreigners in Japanese BL Manga}}|titre ouvrage={{lang|en|Japanese Transnational Fandoms and Female Consumers}}|lire en ligne=http://intersections.anu.edu.au/issue20/nagaike.htm|id=Nagaike 2009}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Dru Pagliassotti|titre={{lang|en|GloBLisation and Hybridisation}}|sous-titre={{lang|en|Publishers' Strategies for Bringing Boys' Love to the United States}} |titre ouvrage={{lang|en|Japanese Transnational Fandoms and Female Consumers}}|lire en ligne=http://intersections.anu.edu.au/issue20/pagliassotti.htm|id=Pagliassotti 2009}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Ting Liu|titre={{lang|en|Conflicting Discourses on Boys' Love and Subcultural Tactics in Mainland China and Hong Kong}}|titre ouvrage={{lang|en|Japanese Transnational Fandoms and Female Consumers}}|lire en ligne=http://intersections.anu.edu.au/issue20/liu.htm|id=Liu 2009}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Paul M. Malone|titre={{lang|en|Home-grown}} ''{{lang|ja-Latn|Shōjo Manga}}'' {{lang|en|and the Rise of Boys' Love among Germany's 'Forty-Niners' }}|titre ouvrage={{lang|en|Japanese Transnational Fandoms and Female Consumers}}|lire en ligne=http://intersections.anu.edu.au/issue20/malone.htm|id=Malone 2009}}.
* {{Ouvrage |langue=en |auteur1=Kazumi Nagaike |titre=Fantasies of Cross-dressing |sous-titre={{lang|en|Japanese Women Write Male-Male Erotica}} |lieu=Boston |éditeur=[[Éditions Brill]] |collection=''{{lang|en|Brill's Japanese Studies Library}}'' |année=2012 |mois=mai |pages totales=238 |isbn=978-90-04-22700-2 |oclc=794328546 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=EQMyAQAAQBAJ&printsec=frontcover |id=Nagaike 2012}}.
* {{Article|langue=en|auteur1=Tricia Abigail Santos Fermin|titre={{lang|en|Appropriating Yaoi and Boys Love in the Philippines}}|sous-titre={{lang|en|Conflict, Resistance and Imaginations Through and Beyond Japan}}|périodique=Electronic journal of contemporary japanese studies|volume=13|numéro=3|mois=octobre|année=2013|lire en ligne=http://japanesestudies.org.uk/ejcjs/vol13/iss3/fermin.html|id=Fermin 2013}}.
* {{Ouvrage |langue=en |titre=Boys Love Manga and Beyond |sous-titre={{lang|en|History, Culture, and Community in Japan}} |lieu=Jackson |éditeur=[[Université du Mississippi]] |année=2015 |mois=janvier |pages totales=303 |isbn=978-1-62846-119-0 |oclc=878837806}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Mark McLelland|auteur2=James Welker|titre chapitre={{lang|en|An Introduction to “Boys Love” in Japan}}|titre ouvrage={{lang|en|Boys Love Manga and Beyond}}|sous-titre ouvrage={{lang|en|History, Culture, and Community in Japan}}|passage=3-20|id=McLelland Welker 2015}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Barbara Hartley|titre chapitre={{lang|en|A Genealogy of Boys Love}}|sous-titre={{lang|en|The Gaze of the Girl and the}} ''{{lang|ja-Latn|Bishōnen}}'' {{lang|en|Body in the Prewar Images of Takabatake Kashō}}|titre ouvrage={{lang|en|Boys Love Manga and Beyond}}|sous-titre ouvrage={{lang|en|History, Culture, and Community in Japan}}|passage=21-41|id=Hartley 2015}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=James Welker|titre chapitre={{lang|en|A Brief History of}} {{lang|ja-Latn|Shōnen'ai, Yaoi}} and {{lang|en|Boys Love}}|titre ouvrage={{lang|en|Boys Love Manga and Beyond}}|sous-titre ouvrage={{lang|en|History, Culture, and Community in Japan}}|passage=42-75|id=Welker 2015}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Yukari Fujimoto|traducteur=Joanne Quimby|titre chapitre={{lang|en|The Evolution of BL as “Playing with Gender”}}|sous-titre chapitre={{lang|en|Viewing the Genesis and Development of BL from a Contemporary Perspective}}|titre ouvrage={{lang|en|Boys Love Manga and Beyond}}|sous-titre ouvrage={{lang|en|History, Culture, and Community in iapan}}|passage=76-92|id=Fujimoto 2015}}.
** {{Chapitre|langue=en|auteur1=Kazumi Nagaike|auteur2=Tomoko Aoyama|titre chapitre={{lang|en|What is Japanese “BL Studies?”}}|sous-titre chapitre={{lang|en|A Historical and Analytical Overview}}|titre ouvrage={{lang|en|Boys Love Manga and Beyond}}|sous-titre ouvrage={{lang|en|History, Culture, and Community in iapan}}|passage=119-140|id=Nagaike Aoyama 2015}}.
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==== Publications de vulgarisation ====
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* {{Ouvrage |langue=jp |titre=BL{{lang|ja|オン・ザ・ラン}}! |traduction titre=Le BL est dans la course ! |volume=44-15 |lieu=Tokyo |éditeur=Seidosha |collection={{lang|ja|ユリイカ}} |numéro dans collection=620 |année=2012 |mois=décembre |pages totales=245 |isbn=978-4-7917-0247-3 |oclc=820021104}}
* {{Lien web |auteur1=Yukari Fujimoto |titre=La culture « boys’ love » changera-t-elle les sociétés japonaise et asiatique ? |site=Nippon.com |date=22/09/2020 |url=https://www.nippon.com/fr/in-depth/d00607/ |consulté le=24/09/2020 |id=Fujimoto 2020}}.


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Dessin couleur de style manga, où deux jeunes hommes s'embrassent sous un parapluie.
Deux bishōnen qui s'embrassent, situation typique dans une œuvre yaoi.

Le yaoi (やおい?), aussi appelé boys' love (BL), est dans la culture populaire japonaise un genre d'œuvres de fiction centré sur les relations sentimentales et/ou sexuelles entre personnages masculins. Le genre du yaoi concerne essentiellement la littérature ainsi que le monde du manga et de l’anime, mais se retrouve aussi à plus petite échelle dans le cadre des jeux vidéo, de la télévision et du cinéma, ainsi que d'autres types de supports. L'équivalent féminin du yaoi est le yuri.

Bien que centré sur les relations homosexuelles masculines, le yaoi est un genre qui est principalement supposément destiné au public féminin. Il cohabite avec le men's love, un autre genre qui traite de l'homosexualité masculine, cette fois destiné à un public gay. Ces deux genres, bien que possédant des différences thématiques et stylistiques, possèdent aussi des points communs et s'inter-alimentent. La frontière entre les deux est donc parfois poreuse, et il arrive que les deux genres soient confondus. Le public est aussi partiellement partagé, avec des hommes gays qui lisent du yaoi et des femmes qui lisent du men's love.

Le yaoi est réputé pour sa forte communauté amateur dans les cercles dōjinshi. Ces productions amateurs peuvent être des créations originales ou bien des parodies d'œuvres ou de personnes existantes. Là encore la littérature et les mangas forment la majeure partie des créations yaoi amateurs.

Des œuvres de type yaoi ou approchant sont apparues tout au long du XXe siècle, mais il ne s'établit comme genre à part entière qu'au cours des années 1970 au sein des shōjo manga. Au fil des décennies qui suivent le genre se diversifie, et bien que toujours fortement lié aux démographies féminines, il touche un public de plus en plus large et diversifié en termes de sexes, de genres et de sexualités. Depuis les années 2000, la production tant professionnelle qu'amateur de yaoi s'est globalisée à l'international, se mêlant à la pratique occidentale du slash.

Définitions[modifier | modifier le code]

Au cours de l'histoire, différents termes ont été utilisés pour désigner tout ou partie du genre ainsi que ses sous-genres. Les universitaires spécialistes en manga Mark McLelland et James Welker considèrent qu'il y a eu quatre principaux termes historiques, qu'ils définissent ainsi[1] :

Shōnen'ai (少年愛?)
Ce terme a été largement utilisé pendant les années 1970 et 1980 pour désigner les shōjo manga mettant en scène l'homosexualité masculine. Aujourd'hui il est parfois utilisé rétroactivement afin de désigner les œuvres yaoi de cette époque, mais dans le discours japonais actuel le terme a repris son sens premier, où il désigne la pédérastie.
JUNE
Ce terme est dérivé d'un magazine yaoi éponyme qui était publié de la fin des années 1970 au milieu des années 1990, et a été utilisé pour nommer le type de mangas publié dans ce magazine. Il a aussi été utilisé pour désigner des créations yaoi amateurs, essentiellement les créations originales et non les parodies.
Yaoi (やおい?)
Est un acronyme pour yama nashi, ochi nashi, imi nashi qui peut se traduire par « pas de climax [dans la narration], pas de chute [au récit], pas de sens [à l'histoire][2] ». Ce nom auto-dérisoire est établi en 1979 et a été diffusé par un cercle dōjinshi influent. Il s'est popularisé au cours des années 1980 et désigne depuis les créations amateurs du genre, mais est aussi parfois utilisé comme terme-parapluie pour désigner l'ensemble des créations amateurs et professionnelles.
Boys' love (ボーイズラブ?)
Généralement écrit en katakana ou par son acronyme « BL ». Ce terme apparaît au début des années 1990 pour désigner les productions yaoi professionnelles, mais est aussi utilisé comme terme-parapluie pour désigner l'ensemble de la production amateur et professionnelle.

Ces termes représentent des concepts qui se chevauchent les uns les autres, il n'y a pas de frontière exacte entre chacun d'eux[3]. De plus en Occident le sens de ces termes a tendance à changer en fonction des pays[1], notamment le terme shōnen'ai est souvent utilisé en Occident pour désigner les amours suggérées ou platoniques[4].

D'autres termes sont régulièrement utilisés dans la culture yaoi, sans toutefois être limités à cette dernière. Par exemple[5] : tanbi (耽美?, « esthète » ou « esthétique »), aniparo (アニパロ?, contraction de « anime parody »), sōsaku (創作?, création originale), niji sōsaku (二次創作?, création dérivée) et sanji sōsaku (三次創作?, création dérivée d'une création dérivée).

Concepts et thématiques[modifier | modifier le code]

Bishōnen[modifier | modifier le code]

Les protagonistes de yaoi sont pour leur majorité des bishōnen (美少年?, beau garçon). Les bishōnen de yaoi sont des adolescents ou des jeunes hommes plus ou moins androgynes, que James Welker décrit comme un mélange des « esthètes et décadents européens du XIXe siècle », des petits chanteurs de Vienne, des célébrités androgynes telles que David Bowie, et de la figure de la bishōjo (美少女?, belle fille)[6]. Il ajoute que ces bishōnen ne sont — physiquement et mentalement — ni des hommes et ni des femmes, ce sont des êtres qui vivent en dehors du « monde hétéro-patriarcal », ils appartiennent en quelque sorte à un troisième sexe. Ils sont essentiellement homosexuels, c'est-à-dire qu'ils sont romantiquement et sexuellement attirés par d'autres bishōnen, bien que ce ne soit pas toujours de façon exclusive ; ils peuvent aussi avoir des relations avec des hommes ou des femmes[6],[7].

Plusieurs mangakas et d'autres académiciens, telle Yukari Fujimoto de l'université Meiji, considèrent que les bishōnen de yaoi sont des « femmes dans des corps d'hommes », et sont la continuation des femmes travesties en hommes des shōjo mangas telles que Saphir de Princesse Saphir ou Oscar de La Rose de Versailles[8],[9], directement inspirés des otokoyaku de la revue Takarazuka[10]. Ce « travestissement » permet aux femmes d'échapper à la relation hétérosexuelle qui est perçue comme violente[8] et effrayante, assimilable à un viol ou à du masochisme, où la femme y est systématiquement la victime[11]. Les relations entre bishōnen sont au contraire « sans-danger » et « pures », ce qui permet aux femmes d'expérimenter le sexe en toute sécurité[12].

Cette vision des bishōnen comme étant des « femmes dans des corps d'hommes » fait que ces yaoi ne cherchent aucunement à décrire l'homosexualité masculine[8], et qu'au contraire, ils autorisent une lecture lesbienne[13]. James Welker compare ainsi les bishōnen à la définition du mot « lesbienne » de la théoricienne lesbienne Bonnie Zimmerman : « elles sont des perturbatrices de l'hétérosexualité, elles incarnent une figure en dehors du patriarcat, une faille dans la dualité du genre[6]. »

Seme et uke[modifier | modifier le code]

Dessin manga couleur, ou deux hommes à moitié déshabillés se font face à face, l'homme de gauche étant dans une posture dominante par rapport à l'homme de droite.
Représentation d'un couple seme (à gauche) et uke (à droite).

La dynamique entre la figure du seme et la figure du uke apparaît dans les œuvres amateurs yaoi au cours des années 1980 avant d'être repris et généralisé par les BL commerciaux, devenant un standard du genre[14]. Le seme désigne « l'attaquant », le membre qui domine le couple et qui lors du rapport sexuel pénètre l'autre. Le uke est quant à lui le « receveur », il est le membre dominé et qui lors du rapport sexuel est pénétré[15].

Ces deux termes ont été empruntés au monde du sport japonais, avec les deux verbes semeru (攻める?, attaquer) et ukeru (受ける?, recevoir, subir) employés dans les arts martiaux japonais. L'usage d'un tel vocabulaire peut ainsi signifier que le rapport sexuel obéit à ses propres règles et codes[16].

Des critiques du yaoi tels que Keith Vincent de l'université de Boston voient dans cette dynamique seme/uke un écho à la dynamique hétérosexuelle, notant que le uke est généralement efféminé, naïf, et sujet aux attentions et aux désirs des hommes autour de lui, quand le seme apparaît comme une sorte de « prince ». Il considère ainsi que la seule différence entre les romances hétérosexuelles et yaoi vient du fait que puisque les deux protagonistes sont des hommes, aucun n'est socialement bridé, notamment dans le cadre du monde du travail[17].

D'autres critiques, telles que la spécialiste littéraire Yōko Nagakubo récusent cette lecture hétérosexuelle de la dynamique seme/uke. Nagakubo note que si le uke est essentiellement féminin, il conserve des traits masculins, et que le seme possède lui aussi des traits tant masculins que féminins[18]. De plus elle note que le rôle sexuel des deux membres du couple est déterminé par le contraste entre ces traits masculins et féminins, ce qui fait qu'un personnage peut être selon la situation un « prince » ou une « princesse », et que selon le partenaire, le personnage peut changer de rôle. Pour Nagabuko les caractéristiques masculines et féminines ne sont ainsi plus des contraintes imposées par le modèle patriarcal, mais deviennent des libertés, qui peuvent être explorées de différentes façons.

L'essayiste Yumiko Watanabe considère que la répartition des rôles entre le seme et le uke est soumise à trois facteurs différents : le statut social, la stature physique et la spiritualité du personnage. Ces trois facteurs permettent de jouer avec les rôles, ce qui a permis de créer de nombreux archétypes et stéréotypes, tels que le « sasoi uke » (quelqu'un de mentalement seme mais physiquement uke), le « hetare zeme » (un seme loser), le « jō uke » (un uke qui a le port d'une fière princesse), le « keigo zeme » (un seme qui s'adresse à son partenaire avec révérence), le « yancha uke » (un uke pervers), le « gekokujō » (lorsque le uke se met à dominer son seme), et d'autres encore. Tous ces archétypes et stéréotypes sont construits pour être contradictoires[19].

Pour Yukari Fujimoto, cette fluidité entre les genres offerte par la dynamique seme/uke permet tant à l'auteur qu'au lecteur de yaoi de « jouer avec le genre », en combinant les facteurs du genre et les dynamiques de domination comme il l'entend. Comme l'histoire se passe entre hommes et qu'il n'y a plus de différence physique entre les partenaires, l'œuvre yaoi autorise au lecteur, tant féminin que masculin d'essayer de nouvelles possibilités vis-à-vis des caractéristiques genrées traditionnelles, en s'identifiant au seme, au uke, ou en adoptant une position voyeuriste[19].

Yaoi et slash[modifier | modifier le code]

Une part importante des yaoi amateurs consiste en des fanfictions où une relation amoureuse ou sexuelle entre deux personnages masculins est imaginée. Cette pratique de « mise en couple » du yaoi est l'équivalent du slash pratiquée en Occident, si bien que les deux pratiques sont aujourd'hui généralement confondues[20].

La création du yaoi commence par la recherche du moe, une réponse affective pour un personnage fictionnel, ou dans le cas du yaoi, une réponse affective sur la relation partagée entre deux personnages. Le terme « personnage » est relativement large : il concerne aussi bien des personnages de fictions existantes, des personnalités réelles ou des personnes de l'entourage du créateur de yaoi qui ont été « fictionnalisées », ainsi que des représentations anthropomorphiques d'objets, de plantes, d'animaux ou même de concepts[21]. Si à peu près n'importe quoi peut être moe, généralement seul ce qui est originaire d'une fiction ou ce qui est lié aux fictions est sujet au moe, une personne réelle doit quant à elle être réappropriée par le créateur comme un personnage fictionnel avant de pouvoir être moe. Par ailleurs les personnages réellement gays sont généralement jugés peu intéressants et rarement sujet au moe[22].

Lorsque le moe est établi entre deux personnages, la fantaisie peut commencer. Cette fantaisie consiste principalement à « jouer avec la sexualité » et « jouer avec le genre » selon les modalités de la dynamique entre seme et uke[23].

Thématique du viol[modifier | modifier le code]

Lors du premier rapport sexuel entre un seme et un uke, il n'est pas rare que ce dernier soit relativement violent, le seme forçant le uke, ce qui s'apparente à un viol[24]. Pour autant le uke finit par répondre positivement au rapport sexuel et atteint la jouissance. Aux yeux des auteurs et des lecteurs japonais ce « viol apparent » est en fait l'expression la « plus brute du désir et des sentiments » que le seme a pour le uke. Cette dynamique et cet acte du viol est similaire aux situations que l'on retrouve dans les shōjo mangas érotiques et pornographiques hétérosexuels, où le personnage féminin est elle aussi régulièrement violée par le personnage masculin[25]. Rare est l'apparition de scènes de viol "réalistes" où les victimes ont des répercussions psychologiques suivant les actes qu'elles ont subis. Under Grand Hotel, une histoire qui se passe dans une prison, est une des œuvres qui mettent en scène l'acte violent qu'est le viol. La victime/le uke s'y fait violer à maintes reprises par son "amoureux"/seme.

Histoire[modifier | modifier le code]

Avant 1970 : les prémices du yaoi[modifier | modifier le code]

La pratique de l'homosexualité tant masculine que féminine ainsi que la mise en valeur de l'androgynie ont été historiquement et traditionnellement acceptées au Japon, notamment dans la classe des samouraïs, au sein des établissements bouddhistes ou encore dans l'environnement autour du théâtre kabuki[26],[27]. Mais au cours de l'ère Meiji (1868-1912) le pays s'ouvre au monde occidental, et entre autres choses il importe la sexologie hollandaise qui considère l'homosexualité comme une pathologie[11], ainsi que le concept de « l'amour romantique » (attraction spirituelle entre un homme et une femme) qui n'existait jusqu'à présent pas dans la conscience japonaise. Cette nouvelle notion de l'amour, nommée ren'ai, remplace rapidement les autres formes d'amour qui existaient jusqu'à présent au Japon. Ces autres formes d'amour (dont l'amour homosexuel) sont alors considérées comme « barbares » et « féodales »[28].

Bien que l'homosexualité devienne de plus en plus mal perçue dans la société japonaise, certains artistes continuent d'exploiter le thème, mais de façon détournée[29]. Le plus célèbre d'entre eux dans le Japon d'avant-guerre est le peintre lyrique Kashō Takabatake qui travaille notamment pour les magazines shōnen de l'époque. Les illustrations de garçons qu'il publie pour le magazine Nihon shōnen deviennent rapidement l'image du « garçon idéal du Japon », ou bishōnen. Ce bishōnen est notamment caractérisé par ses « ambivalentes passivité, fragilité, fugacité et douceur »[30], et est généralement représenté dans un monde homosocial, où règne une certaine tension homoérotique. La large diffusion des illustrations de Takabatake au sein du public masculin (et dans une moindre mesure féminin[31]) homoérotisent sensiblement des environnements masculins, notamment la marine japonaise et quelques établissements scolaires, dont certains sont réputés pour leur « chasse aux éphèbes »[32]. À leur tour ces environnements masculins homoérotiques inspirent des écrivains, dont le célèbre écrivain Mori Ōgai[8],[33].

Mari Mori, fille de Mori Ōgai et romancière, rédige une trilogie mettant en scène une histoire homosexuelle entre hommes dont le premier volume, A Lovers' Forest, est publié en 1961. Cette trilogie est généralement considérée comme l'œuvre fondatrice du yaoi[34], même si Mori refuse d'être considérée comme la précurseur du genre[35]. L'auteur de yaoi Kaoru Kurimoto confesse ainsi avoir été directement inspirée par l'œuvre de Mori[36]. L'œuvre de Mori est influencée par la littérature européenne et notamment la littérature gothique[37], et pose les bases de ce qui plus tard deviendra des lieux communs du yaoi, tels que l'exotisme occidental, la haute éducation et richesse des protagonistes, la différence d'âge relativement importante entre les deux membres du couple, ou encore le caractère fantaisiste voire surréaliste de l'environnement[38].

Du côté des mangas, des changements s'opèrent avec la naissance du genre gekiga en 1957, qui se veut plus réaliste et plus ancré dans la société japonaise. Le gekiga inspire une recherche de rapports humains plus réalistes dans le manga, ce qui ouvre la voie au traitement de la sexualité dans les œuvres non-érotiques et pornographiques[39]. Notamment la mangaka Hideko Mizuno débute en 1969 le shōjo manga Fire! qui met en scène l'amour homosexuel masculin dans le milieu du rock américain et qui érotise ses protagonistes masculins. La même année une autre mangaka, Hiromi Minegishi, publie le manga Jūjika qui est très similaire à Fire![40]. Toutes les pièces sont désormais en place pour l'établissement du yaoi en tant que genre à part entière.

1970-90 : du shōnen'ai au yaoi[modifier | modifier le code]

Les années 1970 voient l'arrivée d'une nouvelle génération de femmes mangakas de shōjo mangas. Les plus célèbres d'entre elles sont collectivement connues sous le nom du Groupe de l'an 24. Ces dernières introduisent dans les shōjo mangas une plus grande diversité de thèmes ainsi que des intrigues et personnages plus profonds. Pour arriver à un tel résultat elles s'inspirent de la littérature, du cinéma, de l'histoire, et des mythes, qui viennent autant du Japon que de l'étranger[41]. Deux d'entre elles, Moto Hagio et Keiko Takemiya commencent à travailler sur des histoires mettant en scène l'homosexualité masculine : le manga In the Sunroom de Takemiya est publié en 1970, suivit en 1971 par Le pensionnat de novembre de Hagio. Ces deux mangas sont considérés comme les premiers d'un nouveau genre ; le shōnen'ai[42].

Hagio et Takemiya continuent par la suite à créer de nouveaux mangas shōnen'ai et sont rejointes par d'autres mangakas, telles que Toshie Kihara ou encore Ryōko Yamagishi[43]. Les deux œuvres shōnen'ai de cette époque les plus populaires sont Le Cœur de Thomas (1974-75) de Hagio et Kaze to Ki no Uta (1976-84) de Takemiya[43]. Ces mangas shōnen'ai mettent en scène des romances tragiques entre jeunes bishōnen particulièrement androgynes et se déroulent le plus souvent dans une Europe historique et romantique[40],[6]. Bien que normalement destinés aux adolescentes et jeunes femmes, ces premiers shōnen'ai attirent aussi un public masculin[44], ainsi que gay et lesbien[45],[13].

C'est aussi pendant les années 1970 qu'apparaissent les premiers magazines gays, dits « homo ». Le premier d'entre eux est le magazine Barazoku[46], publié pour la première fois en 1971. Ces magazines contiennent de nombreuses illustrations, fictions littéraires et mangas d'artistes tels que Gengoroh Tagame ou Sadao Hasegawa[47]. Ces fictions partagent des points communs avec les shōnen'ai : les histoires sont des fantaisies peu réalistes, généralement tragiques[47]. Mais si certaines d'entre elles reprennent le stéréotype du bishōnen similaire aux shōnen'ai, les fictions « homo » offrent une large variété de stéréotypes, avec par exemple des personnages plus virils ou plus âgés. Les fictions gays sont aussi généralement moins romantiques et plus érotiques ou pornographiques que peuvent l'être les shōnen'ai[48]. Si ces magazines « homo » sont principalement à destination des hommes homosexuels ou bisexuels, ils attirent aussi un lectorat féminin[49],[50], notamment Takemiya s'inspire du contenu du magazine Barazoku pour créer ses mangas shōnen'ai[51].

En 1975 a lieu la première Comic Market, un rassemblement d'artistes amateurs, organisés en cercles dōjinshi qui produisent mangas, fictions littéraires, animes et jeux vidéo. Les adolescentes constituent la majorité des participants des premières éditions de la Comic Market[52], ces dernières sont surtout fans des productions (shōnen'ai ou non) du Groupe de l'an 24, mais aussi des groupes de glam rock et de hard rock occidentaux, devenus populaires chez les adolescentes à la suite des mangas tels que Fire!. Les premières productions dōjinshi sont surtout des parodies des mangas du Groupe de l'an 24 ou d'artistes et de groupes de rock tels que David Bowie, Led Zepplin ou Queen[52]. Sous l'influence des shōnen'ai et des magazines « homo », certains dōjinshi deviennent de plus en plus homoérotiques puis ouvertement homosexuels. Par exemple un dōjinshi nommé Island publié en 1979 représente les deux membres de Led Zepplin Jimmy Page et Robert Plant en train de s'embrasser[53]. Le terme yaoi, d'abord utilisé par certains cercles pour qualifier de façon ironique leur créations, devient associé à l'homosexualité masculine en 1979 par le cercle Ravuri qui produit le dōjinshi homoérotique nommé RAPPORI: yaoi tokushū gō[54].

Face au succès des shōnen'ai et premiers yaoi, des éditeurs veulent exploiter le marché en créant des magazines consacrés au genre. L'éditeur San shuppan, qui publiait déjà le magazine « homo » Sabu lance en 1978 le magazine June[55], suivit par le magazine Allan en 1980[56]. Ces deux magazines se spécialisent dans la publication de shōnen'ai, qu'ils décrivent comme étant « à mi-chemin entre la littérature tanbi et la pornographie »[57]. Ces magazines parlent dans leurs articles à la fois de l'homosexualité masculine et du rock et publient des mangas, fictions littéraires et illustrations produits à la fois par des membres du Groupe de l'an 24, des auteurs de yaoi amateurs et des artistes débauchés de magazines « homo »[58]. Le succès du magazine June est tel que le terme June-mono ou plus simplement June commence à concurrencer le terme shōnen'ai pour décrire les fictions homosexuelles masculines[51],[59].

Deux changements majeurs s'opèrent dans le cours des années 1980 dans les shōnen'ai et yaoi : dans la scène yaoi les shōnen mangas sont de plus en plus souvent parodiés, principalement ceux du magazine Shōnen Jump. Le manga/anime Captain Tsubasa devient extrêmement populaire et illustre un changement de paradigme dans le yaoi ; l'action se déroule désormais majoritairement au Japon, et non plus en Occident[60]. Du côté du shōnen'ai on note aussi une dé-occidentalisation des intrigues, qui deviennent plus réalistes et positives tant dans leurs contextes que leurs graphismes, avec des protagonistes plus âgés que précédemment. Banana Fish (1985-1994) d'Akimi Yoshida et Tomoi (1986) de Wakuni Akisato marquent ce changement[43],[61].

1990-2000 : explosion du boys' love et controverse[modifier | modifier le code]

Le succès de plus en plus grandissant des yaoi intéresse les éditeurs de magazines, qui recrutent plusieurs auteurs de yaoi dōjinshi[62]. Les années 1990 voient l'explosion des magazines consacrés au yaoi, ainsi entre 1990 et 1995, ce n'est pas moins d'une trentaine de magazines consacrés au yaoi qui voient le jour[63]. Si certains magazines ont une courte existence, d'autres s'imposent, tel BExBOY qui devient l'un des principaux magazines yaoi des années 1990[50]. Les mangas de ces magazines sont essentiellement influencés par les yaoi et les mangas tels que Banana Fish, ils s'éloignent de plus en plus des standards shōnen'ai des années 1970 et début 1980[63],[64]. Ces magazines disent publier du « yaoi » ou du « boys' love », le terme « shōnen'ai » qui était déjà concurrencé par le terme « June » tombe définitivement en désuétude, notamment à cause de sa connotation pédophile, le terme « June » est lui aussi petit à petit remplacé du fait qu'il est lié au magazine éponyme. Finalement les deux termes « yaoi » et « boys' love » s'imposent sur le marché et deviennent plus ou moins synonymes[65],[64]. En plus des mangas, on assiste à la multiplication des œuvres yaoi sur d'autres supports, tels que les anime, les drama CD et les light novels. C'est aussi durant cette période que les librairies japonaises commencent à créer des rayons consacrés intégralement au genre[66].

Dans la continuité de Banana Fish et Tomoi, de plus en plus de shōjo mangas intègrent des éléments yaoi dans leurs intrigues sans en faire le cœur de l'histoire, avec par exemple le collectif CLAMP qui publie plusieurs mangas contenant des éléments yaoi, tels que RG Veda (1990-95), Tokyo Babylon (1991-94) ou encore Cardcaptor Sakura (1996-2000). Les shōjo mangas de CLAMP font partie des premiers mangas plus ou moins yaoi à s'exporter en Occident, et notamment en France. Si aux États-Unis les éléments yaoi de Cardcaptor Sakura ont été censurés, cela n'a pas été le cas en France[67].

Entre 1992 et 1996 a lieu la controverse du yaoi (やおい論争, yaoi ronsō?), un important débat par essais interposés dans le magazine féministe Choisir[68]. Ce débat oppose d'une part des militants gays et des militantes féministes, qui accusent le yaoi d'être homophobe en donnant une vision viciée de l'homosexualité masculine[69],[70], et d'être hétérosexiste en renforçant la misogynie de la société japonaise[71]. D'autres part se trouvent des auteurs et éditeurs de yaoi, soutenus par des militants féministes et lesbiennes[72], qui estiment que le yaoi est une fantaisie féminine qui n'a pas pour but de décrire l'homosexualité masculine ni d'être réaliste[73], et présentent cette fantaisie comme un refuge face à la misogynie de la société[74], par ailleurs ils adoptent un discours queer de confusion des genres, sexes et sexualités[75] et considèrent que ce sont leurs opposants qui font preuve d'hétérosexisme[76].

Cette controverse fait partie des premières « études du BL », un champ d'étude des sciences humaines sur le BL, qui est désormais considéré comme un pan important de la culture japonaise[77]. Les premières études débutent en 1991 et se focalisent sur l'étude psychanalytique de la psyché féminine et sur le rapport entre les femmes et la féminité dans la société japonaise[78]. La controverse ouvre quant à elle la voie sur l'étude du traitement des minorités dans les BL[79]. La controverse a un impact certain sur les créateurs de yaoi : par exemple l'écrivaine Kurihara Chiyo abandonne le yaoi pour se réorienter vers la pornographie hétérosexuelle pour femme, quand d'autres autrices, comme Takamatsu Hisako ont pris en compte les arguments de leurs contradicteurs gays, afin de rendre leurs fictions plus admissibles pour un public gay[72].

Depuis les années 2000 : mondialisation du yaoi[modifier | modifier le code]

La crise économique de la décennie perdue commence à toucher le secteur du manga tout à la fin des années 1990 et au début des années 2000, mais le yaoi n'est pas affecté par le phénomène de récession globale du marché, au contraire les magazines BL continuent de se développer[64]. Les rayonnages et étages des librairies intégralement consacrés au yaoi sont eux aussi en progression[80], avec notamment la naissance de la otome road (乙女ロード, otome rōdo?, route des filles) en 2004, une rue du quartier Ikebukuro à Tokyo, connue pour ses nombreux magasins consacrés au BL[81]. Le lectorat masculin, jusqu'à présent minoritaire, est lui aussi en progression ; en 2008 certaines librairies estiment que leur lectorat masculin du BL se situe entre 25 et 30%[80].

Photo couleur d'une étagère remplie de mangas.
Section « yaoi » dans une librairie Kinokuniya à San Francisco.

La production du BL se développe à l'international, on parle alors de « global BL » ou de « gloBL » pour distinguer les productions non-japonaises de BL[82]. Le mouvement commence aux États-Unis en 2001 avec l'établissement de la convention YaoiCon qui a lieu chaque année à San Francisco en Californie[83],[84]. À partir de 2004 des éditeurs américains commencent à recruter des auteurs américains ou coréens afin de produire des mangas BL, tels que Yaoi Press, 801 Media, ou encore Yaoi House[84]. Un magazine américain, nommé Yaoi Magazine débute en 2008[84]. Le développement du marché du BL et du gloBL aux États-Unis est très rapide au cours des années 2000, avant d'accuser une stagnation à partir de 2008. Cette stagnation est attribuée à la fois à la crise économique mondiale mais aussi à l'exigence des fans : les éditeurs ne peuvent plus se contenter d'éditer le premier BL venu, ils doivent s'orienter vers des titres de qualité. Malgré cette stagnation, le marché américain continue à se développer lentement au cours des années qui suivent[85],[83].

La Corée du Sud développe aussi ses propres manhwas BL : en 2002 paraît l'anthologie YOUTH(야오이 단편집) intégralement constituée de BL[86], puis la manhwaga Park Hee Jung commence à intégrer des éléments yaoi dans ses manhwas, tels que Martin et John publié en 2006, et la même année paraît la série BL Crush on you de Lee Kyung Ha[87].

En Allemagne, les éditeurs profitent du « manga boom » que connaît le pays pendant les années 2000 pour tenter de développer la bande dessinée allemande dont le marché peine à décoller. Ainsi les éditeurs Egmont, Carlsen et la filiale allemande de Tokyopop recrutent des auteurs locaux inspirés par les mangas japonais afin de créer des mangas allemands[88]. Les premiers mangas sont créés par des hommes et sont à destination d'un public masculin, mais ne rencontrent pas le succès, aussi les éditeurs se tournent alors vers les femmes mangakas et le lectorat féminin. Cette seconde génération de mangas allemands rencontre cette fois le succès, au point que Paul M. Malone de l'université de Waterloo compare ces femmes mangakas au Groupe de l'an 24. À l'instar du Groupe de l'an 24, ces mangakas investissent le genre du BL, qui ne rencontre aucune résistance de la part du lectorat ; le marché allemand de la bande dessinée étant déjà habitué à l'homosexualité, notamment grâce à Ralf König, l'un des rares auteurs de bande dessinée allemande ayant connu le succès, qui dépeint l'homosexualité dans ses BD depuis les années 1980. Parmi ces yaoi mangas allemands, on peut citer Shanghai Passion (2005) par Ying Zhou Cheng ou encore Stupid Story (2008-2012) par Anna Hollmann. Outre les gros éditeurs, de plus petits éditeurs se spécialisent dans le genre, tels que Schwarzer Turm, Fireangels ou The Wild Side. Ces petits éditeurs ont la particularité d'être très liés à la scène dōjinshi allemande, leurs mangakas publiant sous le pseudonyme qu'ils utilisent auprès de la communauté.

En France, se tient en novembre 2016 à Villejuif (Île-de-France) une convention sur le yaoi, rassemblant plusieurs centaines de personnes, en grande majorité des jeunes femmes. Le yaoi ne fait par exemple pas l'unanimité dans des conventions plus générales consacrées à la culture japonaise contemporaine, comme la Japan Expo[89].

En Suisse romande, des conventions annuelles existent depuis 2017, mises sur pied à Lausanne par l'association Yaoi Generation et l'auteure de yaoi MRB. Elles rassemblent plusieurs centaines de personnes, surtout des jeunes femmes, mais également des hommes. Étant donné le caractère explicite des ouvrages, la convention n'est ouverte qu'aux plus de 16 ans. Des artistes internationaux et des éditeurs de yaoi sont invités à chacune de ces conventions ; comme Hamlet Machine, auteure américaine de Starfighter[90] en 2017 et 2022, Amandine Martel, traductrice française de Manga en 2018, Creative Alchemy en 2020 et Clover Doe en 2020 et 2021. Depuis 2021, la presse suisse commence à s'intéresser au genre yaoi et aux conventions, avec des articles dans les journaux romands 24 heures[91], l'Illustré[92] , La Tribune de Genève[93] mais aussi un article en allemand dans l'hebdomadaire national Migros Magazine.

Édition[modifier | modifier le code]

Japon[modifier | modifier le code]

Alors que les mangas japonais BL ont été adaptés au cinéma et en séries télévisées depuis le début des années 2000, ces œuvres étaient commercialisées auprès d'un public cible fans de BL plutôt que vers un public général. Lorsque ces œuvres étaient adaptées pour un public général, les scènes de romance homosexuelle étaient généralement minimisées ou entièrement supprimées, comme dans l'adaptation télévisée d’Antique Bakery diffusée sur Fuji Tv en 2001[94]. Le développement de nouvelles séries télévisées japonaises qui se concentrent explicitement sur les thèmes de la BL et de la romance homosexuelle a été stimulé par les critiques positives et du succès de la série télévisée Asahi Ossan's Love (2016), qui présente un triangle amoureux entièrement masculin comme intrigue principale[95]. Bien qu’Ossan's Love soit une série originale, elle a influencé la création d'œuvres BL adaptées à partir de mangas qui sont commercialisées auprès d'un public de masse. Des exemples notables incluent les séries télévisées The Pornographer (2018) sur Fuji Tv, What Did You Eat Yesterday? (2019) sur TV Tokyo, et Cherry Magic! Trente ans de virginité peuvent faire de vous un sorcier! (2020) sur TV Tokyo, et l'adaptation télévisée de Le Jeu du chat et de la souris (2020)[94].

Yaoi dōjinshi[modifier | modifier le code]

Global BL[modifier | modifier le code]

Le terme Global BL, ou sa version contractée gloBL, désigne les productions BL non-japonaises, qu'elles soient professionnelles ou amateurs, et dans une moindre mesure le terme s'applique aussi à la réappropriation et l’adaptation par les éditeurs et les fans non-japonais des BL japonais[85].

Les gloBL reprennent la plupart des conventions des BL, notamment la dynamique seme/uke et la « mise en couple » associée, les protagonistes de type bishōnen ou encore la fantaisie du yaoi[96]. Mais le gloBL possède aussi certaines différences avec le BL, notamment la logique de l'exotisme est inversée ; si les BL font appel à l'exotisme occidental et arabe[97], les gloBL font appel à l'exotisme extrême-oriental, principalement le Japon, mais aussi la Chine et la Corée[88].

Certaines différences entre gloBL et BL dépendent du pays : en Allemagne les auteurs de gloBL tentent de mimiquer le plus possible les mangas japonais au nom d'une « fausse authenticité » et au détriment de l'innovation[88]. Au contraire les gloBL américains prennent des libertés par rapport aux mangas japonais, notamment le découpage des planches et le volume des textes suivent les standards des Comics, de plus les scènes de sexe des gloBL américains tendent à être graphiquement plus explicites et à moins suivre la convention seme/uke que leurs équivalents japonais[85]. En autre différence des gloBL américains : les éditeurs pratiquent une censure en évitant des thèmes relativement courants dans les BL japonais mais qui peuvent porter à controverse en Amérique, notamment les relations incestueuses et le shotacon[85].

Une autre différence majeure entre les gloBL et les BL concerne le traitement de l'homosexualité et de l'identité gay en elles-mêmes. Au Japon les BL ont une relation ambiguë avec la communauté LGBT et ne cherchent généralement pas à décrire l'homosexualité masculine ou une quelconque identité gay. Ils cohabitent avec les productions de type men's love (ML), qui sont publiées dans des rayons voire boutiques différents[98]. Au contraire, que ce soit en Amérique, en Allemagne ou même aux Philippines, les fans et éditeurs considèrent les BL et gloBL comme indubitablement gays, même s'ils connaissent la situation au Japon[85],[88],[96]. Ainsi les fans non-japonais ont des difficultés à appréhender le fait que les bishōnen seraient des « femmes dans des corps d'hommes » ou un troisième sexe[96]. Les gloBL philippins ont tendance à avoir des protagonistes qui s'identifient comme "gay" et qui doivent faire face à l'homophobie de la société[96]. L'éditeur américain Yaoi Press cherche à toucher le public gay en plus du public féminin[85]. En Allemagne l'éditeur Männerschwarm, spécialisé dans la vente de contenu LGBT, publie des productions BL au côté des productions LGBT typiquement occidentales[88]. Et d'une façon générale, les lecteurs non-japonais de BL soutiennent les causes LGBT et sont ouverts à l'homosexualité, ce qui est loin d'être le cas au Japon[96]. De plus les éditeurs occidentaux ne font pas de distinction entre les ML et BL : les rares ML publiés en Amérique ne sont pas publiés en tant que ML, mais en tant que BL[99].

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Publications académiques[modifier | modifier le code]

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Notes et références[modifier | modifier le code]

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